Dans ces derniers temps on a souvent critiqué les revenus des dirigeants de sociétés commerciales de n'être dans aucun cas proportionnel au travail fourni. Or, dans l'arrêt du 30 novembre 2004 de la chambre commerciale de la Cour de Cassation, il se pose la question si un dirigeant peut être privé complètement de sa rémunération n'ayant pas respecté sa procédure de fixation.
D'après l'arrêt, les époux Y., dont un était président du conseil d'administration et l'autre directeur général de la société, ont cédé fin décembre 1992 la totalité de leurs actions de la société anonyme Garage Y. Pendant leur activité à la tête de la société, le conseil d'administration avait déterminé en 1988, leur rémunération sans limitation de durée. En 1990 et 1991 il a modifié cette rémunération par deux délibérations. Avant la cession des actions, les époux X ont prix la rémunération pour l'année 1992, sans que le conseil d'administration avait délibéré sur ce sujet. Les acquéreurs des actions assignent les époux Y pour demander le remboursement des rémunérations pour l'année 1992 et d'un usage à des fins personnelles des biens de la société.
La Cour d'appel de Besançon accepte la demande du remboursement des rémunérations pour l'année 1992 par un arrêt du 10 mai 2001. Les époux Y forment alors un pourvoi en cassation.
Les requérants invoquent comme arguments qu'une rémunération sans une limite de durée, a été fixée en 1988 et une telle décision ne nécessitait pas d'être renouvelée chaque année. De plus la cour d'appel n'aurait pas démontré que les délibérations du conseil d'administration des années 1990 et 1991 avaient modifié la rémunération des dirigeants.
Un autre argument concerne l'irrégularité de la rémunération en 1992, qui d'après les requérants n'est que formelle et qu'un remboursement de la rémunération ne devrait avoir lieu qu'en cas de préjudice causé à la société. Mais la cour d'appel n'a pas constaté que les dirigeants avaient travaillé gratuitement où si la rémunération était « la juste contrepartie du travail fournie ».
La chambre commerciale de la Cour de Cassation rejette par un arrêt du 30 novembre 2004 le pourvoi.
Dans cet arrêt, la chambre commerciale doit trancher sur la question des pouvoirs d'attribution des rémunérations du président du conseil d'administration et du directeur général et sur l'irrégularité d'une rémunération sans la délibération du conseil d'administration.
[...] Etant une question de fond, ce raisonnement a été repris par la chambre commerciale. En revanche, le silence du conseil d'administration en 1992 n'a pas été reconnu comme une modification tacite des délibérations de 1990 et 1991. Mais une telle vue est contestable, car les résultats peuvent être très différents selon le moment de l'appréciation des faits. Ainsi, si les requérants avaient cédé leurs parts an un plus tard et le conseil d'administration n'aurait pas non plus délibéré sur les rémunérations dans cette année, on aurait du déduire un retour tacite à une rémunération sans délibération annuelle. [...]
[...] La chambre commerciale n'a pas répondu à ce moyen qui aurait pu être une alternative à la décision prise. Néanmoins elle a pris positions concernant la question d'une régularisation d'irrégularité. Ainsi le conseil d'administration ne peut pas ratifier la décision du président, qui, sans obtenir préalablement une décision du conseil, s'est alloué une rémunération Cela restreint alors le pouvoir du conseil d'administration qui doit se prononcer lui-même sur la rémunération et ne pas simplement approuver une décision déjà prise. Mais on peut déduire de la phrase de la chambre commerciale qu'il n'est pas irrégulier si une intervention est encadrée en amont par un décision d'autorisation et en aval par une ratification du conseil comme le souligne madame le professeur Riassetto. [...]
[...] Il est vrai que cette situation est née de la négligence des requérants mais le raisonnement de la chambre commerciale ne semble pas être équitable. Premièrement il est toujours dangereux que le juge se mette à la place du conseil d'administration pour explorer si une modification tacite a eu vraiment lieu ou non. Deuxièmement on peut se demander si les deux délibérations de 1990 et 1991 qui ne modifiait d'après le moyen des requérants, les modalités d'allocation et non pas une suppression de la rémunération même. [...]
[...] qui est le charnier sur la nomination et les règles concernant le président du conseil d'administration. Cette disposition qui n'a pas été modifié par la loi NRE du 15 mai 2001, règle dans l'alinéa 1er que le conseil d'administration détermine la rémunération du président. L'art. L. 225- 53 C.com. dispose la même règle pour le directeur général. Il se pose alors la question se que signifie déterminer dans le ses de ces articles. Est- ce que cela signifie la fixation d'un montant ou simplement d'une règle de calcul ? [...]
[...] Un président ou un directeur général étant opposé à une suppression ou modification abusive mais motivé de la rémunération, aurait plus de chances devant la chambre commerciale. Finalement, cet arrêt laisse un doute sur la sagesse de la chambre commerciale, car dans l'espèce les requérants se retrouvent, certes avec leur propre contribution, sans rémunération pour toute une année, mais aussi exposé à des potentielles poursuites pénales. [...]
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