Dans la première espèce qui se déroulait devant la juridiction administrative, un propriétaire d'avion a conclu un contrat de location avec une compagnie aérienne (Air Lib'). Mais la société est mise en liquidation judiciaire. La licence d'exploitation accordée à la compagnie est retirée et Aéroports de Paris prend la décision d'immobiliser au sol tous les avions de la compagnie présents sur ses aéroports. Le propriétaire de l'aéronef a saisi le juge des référés du tribunal administratif d'un référé liberté afin qu'il soit mis fin à l'atteinte portée à son droit de propriété et qu'il soit ordonné le retrait des blocs de béton. Débouté par le tribunal, le propriétaire se pourvoit en cassation.
La deuxième affaire a également trait au droit de rétention du rétenteur sur la chose. Un particulier a loué une voiture auprès d'une société. Mais il la dépose chez un garagiste pour effectuer des réparations. N'étant pas réglé, il exerce son droit de rétention sur le véhicule. Le propriétaire de la voiture assigne donc le rétenteur en restitution mais celui-ci fait valoir sa créance au titre des frais de réparation et de gardiennage du véhicule. En première instance, les juges ont ordonné la restitution de la chose. Les juges du second degré ont toutefois condamné le propriétaire au paiement des réparations mais non au paiement des frais de gardiennage.
Ces deux espèces nous amènent à nous interroger sur l'opposabilité du droit de rétention du rétenteur au tiers propriétaire.
[...] Mais n'étant pas payé, il oppose son droit de rétention à la demande en restitution du propriétaire. Conformément à sa jurisprudence antérieure, la Cour de cassation juge qu'en raison de cette connexité matérielle la créance avait pris naissance à l'occasion de la détention du véhicule ce dont il résulte le droit de rétention exercée par le rétenteur lui est opposable. Il est même opposable erga omnes. On comprend alors la position de la Cour de cassation qui a accédé à la demande du garagiste. [...]
[...] Aussi, il a été soulevé que l'affirmation selon laquelle tout droit de rétention est un droit réel serait contestable en ce que cela ruine la diversité des droits de rétention (V. infra). Enfin et surtout, ce droit de rétention ne confère aucun droit de suite ou de préférence au débiteur, ce qui est pourtant caractéristique des droits réels. Cette position est aussi contestable du point de vue, non plus de la nature juridique, mais de l'effet du droit de rétention, c'est-à-dire l'opposabilité. [...]
[...] La Cour de cassation censure la juridiction d'appel au visa de l'article 1948 du Code civil et déduit de la qualification de droit réel du droit de rétention, que ce droit est opposable erga omnes. Dès lors, le propriétaire peut se voir opposer la rétention de la chose. À première vue les jurisprudences administrative et judiciaire divergent Il n'en reste pas moins qu'il ne s'agit que d'une apparence et qu'en réalité, il y a tout lieu de penser que les solutions proposées ne sont pas tant éloignées (II). [...]
[...] A ce propos, dans ce cas de figure, la Cour de cassation offre une solution opposée Droit réel : opposabilité On aurait pu penser que le défaut d'utilisation du terme de droit réel dans l'arrêt du Conseil d'Etat était le signe de l'abandon de la qualification pour le droit de rétention. En réalité, il n'en est rien. En effet, la Cour de cassation fonde sa solution sur cette nature juridique. En visant l'article 1948, la Cour de cassation énonce que le droit de rétention est un droit réel, opposable à tous Cependant, il apparaît clairement que l'utilisation de cette qualification est un moyen d'arriver à une fin, à savoir l'opposabilité du droit de rétention à tous, même aux tiers non tenus de la dette. [...]
[...] Dès lors, on ne distingue pas les deux et on considère que le droit de détention est opposable au propriétaire étranger à la dette. Selon toute vraisemblance, la Cour de cassation adopterait la même position que le Conseil d'Etat si elle statuait sur un droit de rétention fondé sur une connexité juridique pure. Ainsi, le droit de rétention semble opposable par principe. L'exception reste lorsque le droit de rétention est fondé sur une connexité juridique pure étant donné que l'article 1165 du Code civil fait obstacle à la reconnaissance de l'opposabilité du droit de rétention au tiers propriétaire. [...]
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