Commentaire d'arrêt, Cour de cassation, chambre commerciale, 26 mai 2009, personnalité morale, substitution de la société, immatriculation, associé, substitution, responsabilité solidaire
Le 1er octobre 1992, monsieur X en tant que représentant et gérant de la société Croisinvest en cours de formation, a contracté auprès de la CRCMM un emprunt de 200 000 francs afin de financer l'acquisition de 200 parts de la société Croisières des alizés. Messieurs X et Y en tant qu'associés fondateurs de la société Croisinvest, se sont portés caution à hauteur de 200 000 francs chacun. Le 30 décembre 1993, le prêt a été débloqué par virement direct sur un compte bancaire au nom de la société Croisière des alizés. Les formalités d'immatriculation de la société Croisinvest n'ont pas été accomplies.
[...] Le fait pour un partenaire de participer à un acte de prêt et de s'engager en qualité de caution constitue-t-il un acte nécessaire à la constitution de la société ou entraîne-t-il la requalification en société créée de La chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 26 mai 2009, rejette le pourvoi formé par monsieur Y. Pour rendre sa décision, elle considère que « l'arrêt retient que la société en cours de formation, avait pour objet social l'acquisition des parts de la société Croisière des alizés et que l'emprunt contracté par monsieur au nom de la société, a servi à cette acquisition ; qu'il retient encore que monsieur Y s'était présenté comme l'un des associés de la société dans un courrier adressé à un tiers et avait participé à l'acte de prêt en s'engageant en qualité de caution avec monsieur X envers la CRCMM ; que de ces constatations et appréciations qui rendaient inutiles les autres recherches énoncées à la première branche, la cour d'appel a pu déduire qu'en l'absence d'immatriculation au registre du commerce une société créée de fait s'était substituée à la société en formation et que l'activité développée par messieurs X et Y avait dépassé l'accomplissement des simples actes nécessaires à sa constitution ». [...]
[...] Ainsi, en l'espèce, la caisse en démontrant la présence d'une société créée de fait, peut engager la responsabilité de celui qui a signé l'acte de prêt, mais aussi de son partenaire, celui-ci ayant agi à son égard en qualité d'associé, pour obtenir le remboursement du prêt, et cela sans attendre l'immatriculation de la société. Pour conclure, le sujet soumis à notre réflexion apparaît critiquable pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le juge qualifie la société de société créée de fait, alors que par principe, les associés avaient la volonté d'immatriculer prochainement la société, donc ils avaient conscience d'être dans une société. De plus, normalement, l'acte de prêt est un acte nécessaire à la constitution de la société. [...]
[...] La Cour de cassation est donc intervenue, même si malgré tout elle requalifie comme en l'espèce la société en société créée de fait dans certains cas, ce qui peut être sévère envers les associés. D'un point de vue pratique, le sujet soumis à notre réflexion est donc intéressant dès lors qu'il permet de mieux comprendre les rapports entre les parties au contrat de société du fait d'une possible requalification en raison d'un comportement spécial des partenaires. Une société créée de fait peut-elle se substituer à une société en cours de formation en raison de l'attitude des partenaires malgré une volonté prochaine d'immatriculation ? [...]
[...] Dans ce sens, la société créée de fait n'a pas de personnalité morale, elle n'a pas de patrimoine social, donc elle n'est pas créancière d'une obligation. Ainsi, du fait de cette absence de personnalité juridique, elle ne peut pas être attraite en justice (commerciale juillet 2006). Dès lors, il apparaît logique que comme dans une société en cours de formation, ce soit les associés qui soient responsables, qu'ils prêtent leur personnalité juridique à la société. Cependant, dans une société en cours de formation, seul celui qui a signé l'acte est engagé (et ce jusqu'à la reprise des engagements par la société, une fois l'immatriculation accomplie). [...]
[...] Comme la société n'a alors pas d'existence juridique et donc ne peut pas contracter, elle ne peut pas être engagée, et les juges considèrent alors que l'on se situe dans une société en cours de formation, et pendant cette période ce sont donc les personnes physiques qui ont accompli les différents actes qui vont être engagées. Ainsi, en suivant une exigence européenne, les auteurs des actes leur personnalité juridique à la société, afin de servir d'intermédiaire. Cela assure donc une protection des tiers qui sont alors sûrs d'avoir un cocontractant. Cependant, une fois l'immatriculation de la société réalisée, celle-ci pourra ensuite récupérer ces actes, ce qui entraînera une décharge des associés des engagements qu'ils ont contractée (commerciale novembre 2005). [...]
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