En l'espèce, la société Banchereau avait remis à Chronopost des plis pour une adjudication de la société SFMI. Chronopost s'était engagée à livrer les plis le lendemain de l'envoi avant midi mais cet engagement n'a pas été réalisé, et la société Banchereau a ainsi manqué une occasion de contracter avec la société SFMI. Elle a donc assigné Chronopost en réparation du préjudice, mais celle-ci lui a alors opposé une clause limitative de responsabilité, selon laquelle dans le cas où son engagement de célérité n'aurait pas été respecté, elle ne verserait que de faibles dommages-intérêts qui ne représenteraient que le remboursement du prix engagé pour le prix de transport.
La question que s'est alors posée la Cour de cassation était de savoir si le fait pour une partie au contrat d'y insérer une clause limitant son engagement pouvait être considéré comme un défaut de cause au contrat.
[...] A La clause limitative de responsabilité La société Chronopost, en clamant son engagement de célérité, de ponctualité n'a cependant pas oublié d'insérer une clause prévoyant le cas où ses engagements ne seraient pas respectés, limitant ainsi sa responsabilité. L'exclusion d'une faute lourde La cour d'appel avait fondé sa décision sur le fait que Chronopost n'avait pas commis de faute lourde, malgré son manquement à son engagement, justement en raison de la clause insérée dans le contrat : pour débouter la société Banchereau de sa demande, l'arrêt retient que, si la société Chronopost n'a pas respecté son obligation de livrer les plis le lendemain du jour de l'expédition avant midi, elle n'a cependant pas commis une faute lourde exclusive de la limitation de responsabilité du contrat Autrement dit, la clause est reconnue comme étant parfaitement valable par les juges du fond, et le fait que cette clause limite l'engagement pris, réduisant la contrepartie à une portion congrue, ne semble pas choquer. [...]
[...] Dans son arrêt de cassation, elle a répondu qu'une clause limitative de l'engagement en contredit sa portée, donc la notion de cause contrepartie n'est pas respectée et le contrat est alors sans cause. En effet, dans les contrats synallagmatiques à titre onéreux, la cause de l'obligation de l'un trouve toujours son fondement dans l'objet de l'obligation de l'autre, en gardant en tête l'idée que dans ces contrats onéreux, une partie ne saurait s'engager sans recevoir de contre-prestation de la part de l'autre partie, sans quoi l'utilité économique du contrat serait nulle. [...]
[...] La subjectivisation de la cause contrepartie Ainsi, la Cour de cassation ne recherche ici pas seulement si les parties ont reçu l'une de l'autre des prestations équivalentes, mais si la cause de l'engagement de l'une correspond bien à la prestation fournie par l'autre. Elle n'apprécie donc plus la situation in abstracto, mais in concreto, en subjectivisant la cause du contrat. C'est pourquoi, au lieu d'engager la responsabilité contractuelle de la société Chronopost, elle l'a saisie sur la nullité sur le fondement de l'article 1131, qui sanctionne le défaut de cause que les juges de cassation démontrent grâce à la subjectivisation de leur approche. [...]
[...] La sanction du déséquilibre contractuel absolu L'article 1131 sur la cause du contrat ne vise en fait que le déséquilibre contractuel absolu, c'est-à-dire, selon l'acception classique de la cause dans un contrat synallagmatique, si une partie sert à l'autre une prestation, sans rien recevoir en retour. L'intérêt économique était alors nul, cela ne posait aucun problème car tout était jugé de façon très objective. Ici, c'est cette solution que la cour d'appel suit, puisqu'elle constate qu'il y a bien eu une prestation contre de l'argent, même si la prestation n'était pas exactement celle prévue au départ par les cocontractants puisque Chronopost n'avait pas respecté les délais, mais qu'elle a alors versé de faibles dommages-intérêts, correspondant au surcoût du transport censé être rapide. [...]
[...] Cour de cassation, chambre commerciale octobre 1996 - la clause limitative de responsabilité des engagements de la société L'arrêt du 22 octobre 1996 est le premier d'une longue série que Denis Mazeaud a surnommée la saga Chronopost portant sur la clause limitative de responsabilité des engagements de la société, limitant en l'espèce l'engagement de célérité de Chronopost. En effet, la société Banchereau avait remis à Chronopost des plis pour une adjudication de la société SFMI. Chronopost s'était engagée à livrer les plis le lendemain de l'envoi avant midi mais cet engagement n'a pas été réalisé, et la société Banchereau a ainsi manqué une occasion de contracter avec la société SFMI. [...]
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