Cour de cassation, chambre commerciale, 17 mars 2021, n 19-10.350 Inédit - À quels principes est soumise la révocation d'un directeur général délégué ?

Extraits

[...] En effet elle restreint de facto la liberté contractuelle des actionnaires. Il convient cependant de nuancer ce constat. En effet la SA est une structure particulièrement réglementée faisant l'objet de nombreuses dispositions. C'est par son caractère institutionnel que s'explique cette réglementation. Il est alors logique que la révocation soit contrôlée de manière restrictive par les juges. De plus, on pourrait voir y voir une manifestation du principe de corporatif governance. Cette pratique voudrait que les actionnaires s'investissent davantage dans le fonctionnement de la société. [...]

[...] En effet, nonobstant ces conditions plus restrictives, il semble logique qu'il soit plus difficile d'obtenir la réparation de l'éventuel préjudice par un membre désigné personnellement. D'une part la preuve semble plus difficile à apporter et d'autre part la solvabilité d'un dirigeant de SA est généralement moins garantie que celle de la SA elle-même. Il convient alors de louer le pragmatisme de la solution qui, ouvrant l'action en réparation d'une révocation abusive, pose des conditions restrictives logiques pour une action en responsabilité personnelle d'un membre d'un organe social. [...]

[...] Donner le même régime de révocation, aux organes de direction de la SA, nonobstant leur particularisme, permet une meilleure lecture du droit et in fine une pratique simplifiée (du moins sur cet ordre) de la révocation. Si la révocation du DGD d'une SA est libre, quid de la volonté des actionnaires d'y porter atteinte ? L'exclusion de stipulations contraire à la libre révocabilité La libre révocabilité du DGD se heurte-t-elle à la liberté contractuelle des actionnaires ? Autrement dit, une clause ayant pour effet d'entraver ou de restreindre l'exercice du droit de révocation (selon la formule de la Haute Cour) est-elle valide ? La chambre commerciale répond par la négative. [...]

[...] Les juges de la chambre commerciale rejettent le pourvoi et approuvent ainsi la Cour d'appel de Besançon. Ils affirment d'abord que la révocation du directeur général délégué est soumise au principe de libre révocabilité Les juges répondent ensuite à la seconde question posée par le cas d'espèce en ce qu'un risque d'abus dans la révocation est possible de sorte que la responsabilité personnelle du président du conseil d'administration peut être recherchée, sous certaines conditions (II). De la révocabilité du DGD En droit des sociétés, la révocation des dirigeants est soumise au principe de libre révocabilité. [...]

[...] La chambre commerciale opte pour l'unité de traitement entre le DG et le DGD : la révocation du DGD répond, comme pour le DG, au principe de libre révocabilité. Le pourvoi en fondant son premier argumentaire sur une différence de traitement se voit ainsi rejeté. L'on pourrait discuter de l'opportunité de cette solution. En effet peut-on regretter que les juges fassent fi de la différence de statut entre DG et DGD ? Il convient de répondre par la négative. Si comme leur dénomination l'indique, les DGD sont délégués, ils peuvent dans les faits avoir une fonction de direction importante. [...]