Depuis la rédaction de 1807 du code de commerce l'un des objectifs centraux de la procédure collective est d'assurer le «traitement égal de tout les créanciers». Cet arrêt montre que le principe d'égalité connaît des entorses. Le créancier du débiteur failli qui jouit d'une mise sous séquestre de sa créance potentielle échappe à la rigueur de la procédure collective. En l'espèce un commissionnaire règle pour le compte d'une société (Agripol) des frais de douane. La douane contestant le montant de valeur déclarée. Le commissionnaire a avancé les fonds sous la forme d'une caution. La société s'est engagée conventionnellement à couvrir tout prélèvement fait sur la somme déposée en caution. La convention prévoit que les paiements faits par le commissionnaire ne le seraient qu'au titre de mandataire. Le commissionnaire a demandé à ce que la société laisse en gage sous séquestre à l'ordre des avocats de Paris une somme équivalente à la somme prétendument éludée. Le commissionnaire bénéficiait d'un droit de rétention qui ne pouvait être utilisé que si un jugement d'un tribunal attestait un surplus de paiement fait aux douanes. La société (Agripol) est mise en liquidation judiciaire. Le liquidateur veut obtenir restitution des sommes séquestrées et les fruits afférant. Suite à un jugement, l'une des parties fait appel devant la cour d'appel de Paris. La cour d'appel dans son arrêt du 22 septembre 2005 ne considère pas le commissionnaire comme propriétaire des sommes mais comme un créancier conditionnel né avant la procédure collective qu'on doit déclarer. Il doit donc être soumis à la procédure collective selon la cour d'appel. La cour doit déterminer si les sommes placées sous séquestre sont ou non soumises à la procédure collective. La cour dans un arrêt de cassation considère la somme placée sous séquestre comme extérieure au patrimoine de la société, ce qui la faisait échapper à la procédure collective. De plus le dépositaire étant tenu de restituer les fonds à la personne désignée suite au jugement il ne pouvait pas remettre les sommes au liquidateur judiciaire. La cour a dans un premier temps tenté de définir la nature des fonds séquestrés (I) avant de déterminer le régime découlant de cette qualification (II).
[...] Le cas se présente de façon fréquente dans le cadre de la mise sous séquestre des ventes des fonds de commerce intervenant avant l'ouverture de la procédure collective .Les professionnels proches de la faillite sont souvent tentés de vendre leur fonds de commerce tant qu'ils peuvent encore contrôler cette cession. Le premier réflexe du séquestre est souvent de remettre les sommes détenues au liquidateur judiciaire plutôt que d'interrompre leurs missions. L'arrêt de cour d'appel justifie la position prise par la plupart des séquestres. L'arrêt nous présente les motivations qui avaient fondé la décision de la cour d'appel de Paris. [...]
[...] Une procédure collective produit sur les biens du débiteur ce que nous avons appelé un effet réel (Mr Sénéchal, L'effet réel de la procédure collective essai sur la saisie collective du gage des créanciers) .C'est à dire un effet de saisie qui place le gage commun des créanciers au service de l'intérêt collectif de ces derniers. L'effet réel est la pierre angulaire en matière de procédure collective .La notion reste difficile à cerner ,mais il semble que la saisie collective ait avant tout pour périmètre le patrimoine du débiteur par application de l'article 2092 et 2093 ancien du code civil désormais codifié à l'art 2284 et 2285 du code civil Quiconque s'est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir faut cependant relever qu'en cas d'éventuel reliquat, si une partie des sommes séquestrées est rendue à la société cette partie sera elle soumise à la procédure . [...]
[...] Ce pan de la doctrine considère que l'échange des volontés marque la naissance du contrat. A priori les créances issues de contrats antérieurs à la procédure collective sont considérées comme antérieures (selon R Perrochon entreprise en difficulté instruments de crédit et de paiement 7 éme édition). L'existence d'une clause suspendant l'exigibilité (l'arrêt parle de créance conditionnelle n'a pas d'effet sur la date de naissance de la créance .Celle-ci naît selon la conception Française de l'échange des volontés solo consensu Cependant ce principe connaît un tempérament en matière de bien sur lequel le débiteur à comme en l'espèce un droit de rétention ( conformément à l'art 2082 du code civil, le commissionnaire disposait d'un droit de rétention .Le juge commissionnaire peut aux termes de l'article L.622-7 al autoriser l'administrateur à payer des créanciers antérieurs au jugement pour retirer le gage ou une chose légitimement retenue ».Cette disposition permet d'assurer l'efficacité du droit de rétention .Mais cela ne dispense pas le bénéficiaire du droit de rétention de déclarer sa créance comme tout autre créancier à la procédure. [...]
[...] Les deux acteurs sont certes nommés suite à deux mandats différents mais on voit que le plus souvent en pratique (notamment en matière de vente de fond de commerce) une partie des sommes séquestrées sera remise par le séquestre au parti (en l'espèce le commissionnaire) et le reliquat sera versé au liquidateur, ce qui aura pour effet de ralentir une procédure déjà longue. En effet les sommes ne pourront être versées qu'après une décision définitive du juge sur le devenir du séquestre. Cela risque de paralyser la procédure si les sommes séquestrées correspondent à l'essentiel de l'actif à liquider comme c'est parfois le cas en matière de procédure collective. En outre on a le risque de voir un créancier se déclarer à la procédure et bénéficier d'un séquestre pouvant ainsi être payé deux fois dans chacune des deux procédures. [...]
[...] Commentaire d'arrêt: cour de cassation, chambre commerciale octobre 2007 Cour de cassation chambre commerciale Audience publique du mardi 16 octobre 2007 de pourvoi : 05-21306 Non publié au bulletin Président : Mme FAVRE, président LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Sur le moyen unique : Vu les articles L. 621-43 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et 1956 du code civil ; Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le 6 janvier 1992, la Société maritime finistérienne aux droits de laquelle se trouve la société Union armoricaine des transports (le commissionnaire), commissionnaire agréé en douane, a procédé au dédouanement de tonnes de blé pour le compte de la société Agripole (la société) ; que l'administration des douanes ayant contesté la position tarifaire déclarée, le commissionnaire et sa banque ont mis en place une caution bancaire d'un montant équivalent aux prélèvements agricoles prétendument éludés pour permettre à la société de disposer de la marchandise ; qu'en raison du contentieux douanier, le commissionnaire et la société ont conclu en 1993 un protocole d'accord aux termes duquel la société reconnaissait que "si les prélèvements agricoles étaient effectivement dus à l'administration des douanes, la société ne contestait pas qu'ils seraient intégralement à sa charge", le commissionnaire "n'étant que son mandataire" ; que la convention prévoyait en outre qu"à titre de garantie du paiement des prélèvements agricoles dont serait passible la marchandise importée au titre de la déclaration en douane la société donnait en gage au commissionnaire une certaine somme, conformément aux articles 2073 et suivants du code civil", cette somme, versée entre les mains du séquestre juridique de l'ordre des avocats de Paris, étant "affectée au règlement des prélèvements agricoles dont serait passible la marchandise" litigieuse ; qu'il était enfin prévu que conformément aux dispositions de l'article 2082 du code civil, le commissionnaire disposait d'un droit de rétention sur les sommes nanties, qu'il ne pourrait disposer des fonds gagés qu'au vu d'un avis de recouvrement consécutif à une décision judiciaire définitive obtenue par l'administration des douanes ou d'une transaction conclue avec cette administration ou qu'inversement, le gage s'éteindrait si cette administration était déboutée de ses demandes concernant les droits avancés par le commissionnaire pour le compte de la société ou si la créance était éteinte pour tout motif ; que par jugement du 30 juillet 1999, la société a été mise en liquidation judiciaire, Mme X . [...]
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