Dès 1791 et la suppression des corporations, la liberté d'entreprendre n'a cessé de s'établir comme un grand principe de notre société. Mais aujourd'hui il est parfois possible, avec un raisonnement plus ou moins implicite, de remarquer des restrictions à la liberté d'entreprendre et d'installation. La garantie légale d'éviction dans le domaine de la vente du fonds de commerce fait peut-être partie de ces hypothétiques notions limitant cette liberté.
Dans cet arrêt en date du 16 janvier 2001, la chambre commerciale de la Cour de Cassation impulse évidemment des réactions de la doctrine au sujet des conséquences de la garantie légale d'éviction tel qu'exposé et en tout cas déductible de la solution énoncée.
En l'espèce, un couple a vendu à une société un fonds spécialisé dans la construction de vérins, avec une clause de non-rétablissement au titre d'une activité du même type, pendant trois ans. Deux mois après que la durée d'interdiction ait expiré, les vendeurs fondent une société ayant à peu près la même activité et obtient une commande du principal client de leur ancienne société, clientèle censée être comprise dans le transfert du fonds.
L'acheteur assigne alors les vendeurs pour le non-respect de la garantie légale d'éviction de l'article 1626 du code civil. Les défendeurs essaient de se prévaloir de l'achèvement de la garantie conventionnelle qui leur aurait permis de récupérer pleinement leur liberté d'entreprendre. Le 13 août 1998, la cour d‘appel de Poitiers a ordonné une expertise afin d'évaluer le préjudice subi par la société acquéreuse du fonds de commerce et les a condamnés à payer à cette dernière, une indemnité provisionnelle de 250 000 francs.
L'affaire a donc été portée en Cassation et la chambre commerciale devait se poser la question de savoir si la garantie légale d'éviction dans le cadre de la vente d'un fonds de commerce, empêche le vendeur de se rétablir dans une activité similaire, qui plus ait concurrentielle pour récupérer sa clientèle, après l'achèvement du délai prévu dans une clause de non-rétablissement. Le 16 janvier 2001 elle affirme qu'après l'expiration de la clause de non-concurrence, l'acquéreur d'un fonds de commerce demeure fondé à se prévaloir de la garantie légale d'éviction, qui interdit au cédant tout agissement ayant pour effet de lui permettre de reprendre la clientèle du fonds cédé, privant ainsi celui-ci de sa substance.
Il est clair que la Cour a décidé que la clause de non-rétablissement ne se substitue pas exactement aux dispositions prévues dans la loi et que cette dernière garde toute sa portée même après la fin de la durée de la clause (I). En l'espèce, la crédibilité de la solution parait irrévocable mais la portée à long terme peut se révéler problématique si l'on considérait que cette garantie est perpétuelle (II).
[...] En l'espèce le vendeur avait le droit de rouvrir un fonds de commerce. La Cour de Cassation va encore plus loin puisqu'elle retient que c'est le fait d'avoir récupéré sa clientèle qui est sanctionné et non pas celui d'exercer une activité concurrentielle. Donc, le vendeur avait tout à fait le droit, après la fin du délai de trois ans, de se rétablir dans une activité de construction de vérins, dès lors qu' ne récupérait pas la clientèle. Puisque la vente du fonds de commerce comprend la cession de la clientèle, l'article 1626 lui interdit de reprendre cette clientèle puisqu'il l'a vendu La cour de cassation a répondu à la question qui lui été posée en confirmant que la garantie conventionnelle d'éviction dans le cadre de la clause de non- rétablissement, développe et dépasse même les dispositions de la loi. [...]
[...] On peut considérer qu'elle a pour but de préciser la loi et ce pour affirmer une certaine sécurité juridique entre les contractants, plus à l'avantage de l'acheteur. Mais, quel est le sens de cette précision ? Si elle ne fait que rappeler une disposition légale en utilisant une stipulation conventionnelle, elle peut paraître inutile. Dès lors, il semblera plus opportun, à l'aide d'une loi, d'obliger que soit mentionné dans le contrat l'article 1626 du code civil et sa portée. Cette solution ferait certes disparaître des difficultés juridiques mais elle engendrerait l'extinction de ce type de clause. [...]
[...] Il est clair que la Cour a décidé que la clause de non-rétablissement ne se substitue pas exactement aux dispositions prévues dans la loi et que cette dernière garde toute sa portée même après la fin de la durée de la clause En l'espèce, la crédibilité de la solution paraît irrévocable mais la portée à long terme peut se révéler problématique si l'on considérait que cette garantie est perpétuelle Précision de l'étendue de la garantie légale d'éviction La jurisprudence considère depuis 1992 que la clause de non-rétablissement dans un contrat de vente du fonds de commerce n'efface pas la garantie mentionnée à l'art 1626 du code civil Cet article, pris dans le cadre de la vente du fonds de commerce, a la même portée que la clause en question. Pourtant les contractants estiment parfois qu'il est nécessaire de l'inclure dans le contrat Subsistance de la garantie légale Si au terme du délai mentionné dans une clause de non-rétablissement, le vendeur pouvait passer outre les autres garanties légales, une telle clause serait défavorable pour l'acheteur. C'est pourquoi la cour de cassation a jugé en 1992 que la garantie conventionnelle d'éviction n'effaçait pas celle légale. [...]
[...] C'est donc une autre définition de la précision qui concerne la réflexion suivante. En effet, la clause de non-rétablissement donne la possibilité aux contractants d'aller plus loin que les dispositions de la loi. En l'espèce, non seulement un délai est instauré mais il est, de surcroît, interdit au vendeur de se rétablir dans une activité similaire. On ne se focalise pas sur idée de concurrence qui aurait pour but de récupérer la clientèle cédée, même si c'est effectivement ce qu'il s'est passé. [...]
[...] Or, la clientèle est un élément du fonds de commerce. Selon un arrêt de la chambre des requêtes du 29 juillet 1908, l'article 1626 du code civil emporte pour le vendeur d'un fonds de commerce le devoir de s'abstenir de tout acte de nature à diminuer l'achalandage et à détourner la clientèle du fonds cédé. De ce point de vue, la garantie conventionnelle d'éviction d'une clause de non-rétablissement équivaut à la garantie de l'article 1626. Est qu'une telle stipulation permet au vendeur de passer outre la garantie légale d'éviction dés le terme de la clause du contrat. [...]
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