L'apparence, notion très controversée par la doctrine a fait l'objet d'une évolution jurisprudentielle quant à son fondement. L'arrêt rendu par l'assemblée plénière le 13 décembre 1962 est un arrêt de principe qui vient consacrer un nouveau fondement.
En l'espèce, C…, président-directeur général de la Banque canadienne société anonyme, a, sous sa seule signature, souscrit au nom de cette banque, envers l'Administration des Domaines, un cautionnement solidaire d'une société de récupération d'épaves, pour une somme de 700000 francs en mai 1953. Ladite administration a alors demandé l'exécution de cette obligation cependant la banque lui a soutenu que celle-ci ne lui était pas opposable, en déclarant que ses statuts exigeaient en ce cas la signature de deux mandataires sociaux habilités. C'est ainsi que l'Administration des Domaines a assigné la Banque canadienne en paiement de la caution.
Le mécanisme du mandat apparent permet-il d'engager le mandant en l'absence de toute faute de ce dernier ?
[...] Telle est la question à laquelle les juges de la Cour de cassation ont été confrontés dans des arrêts du 13 décembre 1962. L'assemblée plénière de la Cour de cassation a considéré dans son arrêt de principe rendu le 13 décembre 1962 que le mandant peut être engagé sur le fondement d'un mandat apparent, même en l'absence de faute susceptible de lui être reprochée, si la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs. [...]
[...] Le problème à résoudre en l'espèce était le suivant : est-il nécessaire, pour qu'une personne soit tenue d'exécuter un engagement pris en son nom par une autre, qui n'a reçu d'elle aucun pouvoir, que l'examen des circonstances qui ont fait croire au cocontractant à l'existence des pouvoirs permette d'affirmer qu'une imprudence du prétendu mandant a contribué a susciter chez le cocontractant cette croyance erronée ? Il s'agit d'examiner si les circonstances sont de nature à éveiller les soupçons du tiers sur la réalité des pouvoirs du mandataire ce qui confère à ce dernier l'obligation de procéder à une vérification de ces pouvoirs. Pour se prévaloir de sa croyance légitime, le tiers doit établir des circonstances l'autorisant à ne pas vérifier les pouvoirs du mandataire. En l'espèce, l'assemblée plénière a retenu l'application de la théorie de l'apparence. [...]
[...] Dans ce dernier cas, le mandataire agit, le plus souvent, au détriment du mandant et en recherchant un intérêt personnel. Il engage donc sa responsabilité contractuelle envers son donneur d'ordre et vis-à- vis des tiers il engage ce dernier, tout au moins si les tiers sont de bonne foi. La charge de la preuve que les conditions de l'apparence sont remplies incombe à celui qui se prévaut de l'apparence, c'est-à-dire en fait le tiers qui a contracté avec le pseudo mandataire (Cass. 1re civ novembre 1980). [...]
[...] Ainsi, une société a été déclarée responsable, sur le fondement du mandat apparent, des agissements de l'un de ses préposés qui s'est fait délivrer une carte accréditive de location de voitures en adressant des lettres sur papier à en-tête de cette société avec indication des références bancaires et cachet de celle-ci. De bonne foi la société de location a ainsi mis des véhicules à la disposition du préposé. D'un autre côté, la théorie du mandant apparent a été rejetée dans le cas d'un octroi de conditions exorbitantes. [...]
[...] On constate donc que l'erreur légitime est devenue un fondement constant de la théorie de l'apparence. Cette théorie a de nombreuses applications surtout dans le domaine des affaires ou dans celui de la gestion des biens familiaux encore que cette théorie soit en recul dans le secteur où elle est née : le droit des sociétés. La solution semble bien rigoureuse pour le mandant qui se retrouve finalement seul engagé à un acte qui n'est pas forcément dans son intérêt. [...]
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