La société Leygafinance, importatrice de matières premières, veut conclure un contrat de fourniture avec la société Caisoon Security Limited. Afin de financer l'opération, le « montage » suivant est conçu : le Crédit Lyonnais Luxembourg, sur ordre de la société importatrice, consent à la société Caisoon Security des facilités de caisse qui lui assurent le financement de l'approvisionnement ; le Crédit Lyonnais France garantit à première demande le Crédit Lyonnais Luxembourg ; et la société Leygafinance, importatrice, contre-garantit le Crédit Lyonnais France.
Pour des raisons indéterminées, le contrat de fourniture n'est finalement pas conclu ; l'opération perd ainsi entièrement sa raison d'être. Le Crédit Lyonnais Luxembourg appelle pourtant en garantie le Crédit Lyonnais France qui, à son tour, sollicite la garantie de la société Leygafinance.
La société importatrice, contre garante, invoqua la nullité de la garantie à première demande pour défaut de cause, le donneur d'ordre n'étant pas partie au contrat de base. Sa demande d'annulation s'appuyait sur l'argument selon lequel l'engagement de contregarantie qu'elle avait souscrit était dénué de toute contrepartie puisqu'il s'avérait qu'en définitive, aucun contrat d'approvisionnement n'avait été conclu entre elle-même et la société à laquelle les facilités de caisse avaient été accordées.
Le juge devra donc s'attarder essentiellement sur la question de savoir si le garant peut ou non invoquer la nullité de la garantie à première demande pour inexistence du contrat de base et donc absence de cause ?
[...] Cour de cassation du 5 février 2002 - la garantie à première demande C'est un bel arrêt qui fera date dans la construction prétorienne française de la garantie autonome. Pour la première fois, la Cour de cassation se prononce au sujet de l'une des questions les plus délicates théoriquement, à savoir la détermination de la cause de la garantie. La société Leygafinance, importatrice de matières premières, veut conclure un contrat de fourniture avec la société Caisoon Security Limited. Afin de financer l'opération, le montage suivant est conçu : le Crédit Lyonnais Luxembourg, sur ordre de la société importatrice, consent à la société Caisoon Security des facilités de caisse qui lui assurent le financement de l'approvisionnement ; le Crédit Lyonnais France garantit à première demande le Crédit Lyonnais Luxembourg ; et la société Leygafinance, importatrice, contre-garantit le Crédit Lyonnais France. [...]
[...] Dans un arrêt confirmatif, la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 5 février 2002 confirme le jugement de première instance et déboute la société Leygafinance de sa demande. Elle estime en effet que la cause de l'engagement ne se situe non pas dans la participation au contrat de base mais dans l'intérêt économique que pouvait en tirer le garant. Non satisfaite de cette décision, la société Leygafinance forma un pourvoi en cassation aux moyens que d'une part, la garantie serait nulle pour absence de cause en raison de sa non-participation au contrat de base ; d'autre part, en raison du caractère léonin de la garantie, justifiée par une absence de contrat de base et donc de contrepartie. [...]
[...] Pour autant, doit-on situer la cause de l'engagement du garant dans l'existence du contrat de base ? La solution, déjà retenue pour le cautionnement, n'est pas sans risque, comme celui d'abâtardir le régime des garanties autonomes en y introduisant ce que leur essence réprouve : le principe de l'accessoire et l'opposabilité des exceptions. C'est d'ailleurs pour cette raison que le juge donne de la cause une définition stricte : elle n'est que l'intérêt économique du donneur d'ordre à la conclusion du contrat de base. [...]
[...] Ce qui prime ici est l'efficacité du mécanisme, notamment dans le cadre d'une garantie à première demande. Même si la solution peut sembler rude pour le garant, il ne fait qu'assumer les conséquences des actes qu'il a conclus. En effet, il n'avait en l'espèce aucune certitude quant à la réalisation du contrat de fourniture et on peut imaginer qu'il n'aurait pas pu, contractuellement subordonner sa contre garantie à la réalisation du contrat de fourniture, lui évitant ainsi des désagréments. Le maintien de la garantie et les refus de la nullité semblent donc adaptés à ce mécanisme. [...]
[...] Cette solution semble en accord avec la nature juridique de la garantie autonome. En effet, il s'agit d'un contrat unilatéral et suivant le courant doctrinal dominant, c'est la cause subjective qui doit être retenue dans ce type de convention. Autrement dit, c'est le but poursuivi par l'engagé, ici le garant qui doit être considéré comme étant la cause de son engagement. Or, on constate que c'est bien l'espoir de conclusion d'un contrat de fourniture qui a poussé la société Leygafinance à se porter garantie pour les facilités de caisse accordées par le Crédit Lyonnais Luxembourg. [...]
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