Le CNE connaîtra-t-il le même destin que le CPE ?
C'est à cette question que les juges tenteront de répondre à l'issue de l'interminable contentieux auquel l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 20 octobre 2006 a largement contribué.
Il s'agit en l'espèce d'un litige né entre Monsieur Samzun, mandataire judiciaire, et Melle Linda de Wee, engagée par celui-ci au terme d'un contrat à durée déterminée en raison d' « une surcharge temporaire de travail ».
La demanderesse, ayant finalement signalé, avant la fin dudit contrat, un contrat « nouvelles embauches » au régime duquel elle fut soumise, a saisi le Conseil de prud'hommes suite à la rupture prématurée du contrat par son employeur.
Le 28 avril 2006, le Conseil de prud'hommes de Longjumeau s'est prononcé sur la légalité de l'ordonnance du 2 août 2005 relative au contrat « nouvelles embauches » et a ainsi conclu que : « l'ordonnance du 2 août 2005 instituant le contrat nouvelles embauches est contraire à la convention numéro 158 de l'Organisation internationale du travail » concernant la cessation de travail à l'initiative de l'employeur, et que cette dernière ayant une valeur supérieure à l'ordonnance du 2 août 2005 en vertu de l'article 55 de la Constitution prive celle-ci de tout effet juridique, ce qui signifie que le contrat « dénommé à tort nouvelles embauches (…) s'analyse en contrat à durée indéterminée de droit commun, soumis à toutes les dispositions du Code du travail », et donc soumis au régime protecteur du licenciement.
Monsieur Philippe Samzun ainsi que le procureur de la République d'Evry ont donc interjeté appel de ce jugement, à la suite de quoi le préfet de l'Essonne a adressé un déclinatoire de compétence en faveur du juge de la juridiction administrative au motif que le juge judiciaire ne peut connaître de l'exception d'illégalité d'un acte réglementaire.
Selon les prétentions du préfet, une ordonnance prise sur le fondement de l'article 38 de la Constitution revêt le caractère d'un acte administratif réglementaire dont la légalité doit être appréciée par la juridiction administrative, « au besoin sous la forme d'une question préjudicielle lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire est saisie d'un litige nécessitant l'appréciation de cette légalité ».
De plus, le préfet soutient que le respect de la primauté du droit international sur les normes nationales passe par le renvoi au juge administratif.
Enfin, il invoque le principe de séparation des autorités judiciaires et administratives, en déclarant que « le juge judiciaire qui statue sur l'exception d'illégalité d'un acte administratif, porte atteinte à ce principe ».
La question de droit que l'on peut alors se poser est donc celle de savoir dans quelles mesures le juge judiciaire est-il compétent pour connaître du contrôle des actes administratifs réglementaires ?
Question à laquelle la cour d'appel de Paris répond que la juridiction de l'ordre judiciaire est compétente en matière de contrôle de conventionalité en ce qu'il tend a écarter ou non l'application d' un acte réglementaire et non en ce qu'il tend à l'annuler.
Pour se faire, la cour d'appel qui, après avoir rappelé qu'une ordonnance non ratifiée relève sans aucun doute de la compétence du juge administratif, admet toute fois qu'il est question en l'espèce d'un contrôle de conventionalité et non d'un contrôle de légalité (I). Cette décision, juridiquement sans incidence sur le fond de l'affaire, soulève portant un enjeu politique majeur en la matière (II).
[...] Cour d'appel de Paris octobre 2006 Le CNE connaîtra-t-il le même destin que le CPE ? C'est à cette question que les juges tenteront de répondre à l'issue de l'interminable contentieux auquel l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 20 octobre 2006 a largement contribué. Il s'agit en l'espèce d'un litige né entre Monsieur Samzun, mandataire judiciaire, et Melle Linda de Wee, engagée par celui-ci au terme d'un contrat à durée déterminée en raison d' une surcharge temporaire de travail La demanderesse, ayant finalement signalé, avant la fin dudit contrat, un contrat nouvelles embauches au régime duquel elle fut soumise, a saisi le Conseil de prud'hommes suite à la rupture prématurée du contrat par son employeur. [...]
[...] Cette distinction a toute son importance dans le sens où le contrôle de conventionalité peut aussi bien être opéré par le juge judiciaire (Cour de cassation, Chambre mixte mai 1975, Jacques Vabre que par le juge administratif (Conseil d'Etat octobre 1989, Nicolo alors que le contrôle de légalité relève exclusivement de la compétence de la juridiction administrative (Tribunal des conflits juin 1923, Septfonds La cour d'appel de Paris en déduit qu'il n'est pas nécessaire de soumettre, de façon préjudicielle, la question de la validité de l'ordonnance relative aux contrats nouvelles embauches à l'appréciation du juge administratif dans le sens où il appartient au juge de droit privé, compétent en matière de droit du travail, de juger s'il convient ou non d'écarter la norme étatique litigieuse au cas d'espèce. Elle rejette par conséquent le déclinatoire de compétence du préfet de l'Essonne régulièrement déposé le 19 juillet 2006. II. [...]
[...] Enfin, il invoque le principe de séparation des autorités judiciaires et administratives, en déclarant que le juge judiciaire qui statue sur l'exception d'illégalité d'un acte administratif, porte atteinte à ce principe La question de droit que l'on peut alors se poser est donc celle de savoir dans quelles mesures le juge judiciaire est-il compétent pour connaître du contrôle des actes administratifs réglementaires ? Question à laquelle la cour d'appel de Paris répond que la juridiction de l'ordre judiciaire est compétente en matière de contrôle de conventionalité en ce qu'il tend à écarter ou non l'application d'un acte réglementaire et non en ce qu'il tend à l'annuler. [...]
[...] Des conséquences de cette affirmation En laissant au juge du contrat de travail le soin de se prononcer sur la question de la compatibilité de l'ordonnance du 2 août 2005 à la convention du 22 juin 1982, la cour d'appel rend un arrêt dépourvu d'effet juridique mais dont les conséquences politiques sont considérables A. Une portée juridique dérisoire Comme vu précédemment, la seule affirmation faite par la cour d'appel dans cet arrêt est celle de la compétence du juge judiciaire. Cet arrêt est donc dénué de toute valeur juridique en ce qu'il ne tranche pas sur le fonds de l'affaire. En effet, les juges ne soulèvent pas la question de la compatibilité de l'ordonnance du 2 août 2005 à la convention 158 de l'OIT. [...]
[...] Cette analyse a suscité beaucoup de réactions dans la mesure où certains se sont laissés prendre à parler par exemple de manipulation politicienne Ce qui est sûr, c'est qu'en élevant le conflit devant le Tribunal des conflits, le préfet a cherché à gagner du temps, sans réel succès puisque ce dernier a confirmé la décision rendue par la cour d'appel en estimant que l'ordonnance litigieuse avait été implicitement ratifiée. Il s'agit donc en l'espèce d'un arrêt dont l'intérêt politique écrase sa valeur juridique. [...]
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