En droit français, tout créancier a ce qu'on appelle un droit de gage général, consacré par les articles 2092 et 2093 du Code civil. Il permet à tout créancier de saisir tout bien dans le patrimoine de son débiteur au moment des poursuites, pour le faire vendre et se faire payer sur le prix. Les créanciers privilégiés ont en plus un droit de préférence, mais les créanciers chirographaires n'ont que le droit général.
Or, il y a des risques de dépérissement de ce droit, inhérents à la qualité de créancier chirographaire. Pour éviter que ces risques soient accrus par l'action même du créancier, le droit met en place différents mécanismes : on distingue principalement l'action oblique et l'action paulienne. Cette dernière permet à un créancier de faire déclarer inopposables des actes d'appauvrissement passés par un débiteur en fraude de ses droits, en application de l'article 1167 du Code civil. Si les conditions de mise en œuvre de cette action ne suscitent plus grand émoi en doctrine, et sont largement reconnues comme l'exigence d'un acte d'appauvrissement, frauduleux et préjudiciable, le résultat de l'action est en revanche sujet à débats doctrinaux et conflits de jurisprudences, au sein même de la Cour de cassation.
En effet, dans deux espèces, du 30 mai 2006 et du 9 juillet 2003, ayant donné lieu à des arrêts respectivement de la 1re et 3e Chambre civile, la Cour supérieure a été amenée à se prononcer quant aux effets de l'action paulienne.
Ces deux arrêts étudiés successivement posent la même question de droit, à laquelle la Cour de cassation apporte deux réponses différentes : l'inopposabilité paulienne a-t-elle la nature d'une action révocatoire, entraînant le retour de la créance dans le patrimoine du débiteur principal, ou laisse-t-elle le créancier saisir sa créance directement dans le patrimoine du tiers acquéreur ?
[...] Mais même dans ces décisions, telles que celle du 9 juillet 2003, la Haute Cour affirme souvent que l'effet de l'action paulienne ne se produit qu'à l'égard du créancier demandeur, et qu'à la mesure de son intérêt. Or, comme la nullité est toujours intégrale et erga omnes, il est absurde d'ordonner le retour d'un bien dans le patrimoine du débiteur, impliquant la révocation de l'aliénation frauduleuse, tout en considérant que cette aliénation subsiste au profit des tiers, et donc que finalement l'acte n'est anéanti qu'inter partes. [...]
[...] Il serait bon que les autres formations de la Cour de cassation s'accordent sur cette jurisprudence, sans quoi une Assemblée plénière viendra sans doute mettre un terme à ces divergences. Quoi qu'il en soit, il semble clair que l'inopposabilité paulienne, bien qu'imparfaite en cas de sous-aliénation, ne doit pas entrainer le retour des biens dans le patrimoine du débiteur, mais les laisser être saisis chez le tiers acquéreur. [...]
[...] Civ 1ère mai 2006, et Civ 3e juillet 2003 l'action paulienne En droit français, tout créancier a ce qu'on appelle un droit de gage général, consacré par les articles 2092 et 2093 du Code civil. Il permet à tout créancier de saisir tout bien dans le patrimoine de son débiteur au moment des poursuites, pour le faire vendre et se faire payer sur le prix. Les créanciers privilégiés ont en plus un droit de préférence, mais les créanciers chirographaires n'ont que lui. [...]
[...] La société a formé un pourvoi en cassation, demandant à pouvoir saisir l'objet de sa créance directement dans les mains du tiers acquéreur, en l'espèce le fils et la femme du débiteur principal. La 1ère chambre civile de la Cour de cassation a cette fois contredit la jurisprudence de la 3e chambre civile en cassant sans renvoi l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris, au visa de l'article 1167 du Code civil, estimant que le créancier poursuivant peut faire saisir l'objet de sa créance entre les mains du tiers. [...]
[...] Une action aux effets satisfaisants mais toujours imparfaite Avec la solution de la 1ère Chambre civile en date du 30 mai 2006, l'action paulienne devient plus cohérente. Le créancier peut désormais saisir l'objet directement entre les mains du tiers contractant, la créance ne réintégrant plus le patrimoine du débiteur principal. C'est donc la tâche du créancier qui s'en trouve simplifiée, celui-ci n'étant plus obligé d'assigner le débiteur. De plus, la Haute Cour confirme deux principes : celui selon lequel le créancier ne peut saisir une somme ne s'élevant qu'à la hauteur de sa créance, et pas d'avantage, ainsi que celui selon lequel en cas de sous aliénation, le créancier a sur le tiers acquéreur une créance de somme d'argent. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture