droit des affaires, arrêt du 20 mai 2003, faute du dirigeant, responsabilité du dirigeant, cession de créances professionnelles, loi du 24 juillet 1966, théorie de la faute détachable, preuve de la faute, lien de causalité, article 1240 du Code civil, responsabilité civile, article 1850 du Code civil, article L 223-22 du Code de commerce, article L 225-251 du Code de commerce, arrêt du 8 mars 1982, droit des sociétés, arrêt du 28 avril 1998, faute intentionnelle, dol, article 1137 du Code civil, arrêt du 9 décembre 2014, arrêt du 15 mai 2007, arrêt du 5 juillet 2017, arrêt du 18 février 2014
Les faits soumis à l'attention de ladite juridiction sont les suivants, la gérante d'une société a d'abord cédé deux créances à une autre personne morale, en l'espèce une banque, elle a ensuite cédé une seconde fois les mêmes créances à un de ses fournisseurs. C'est cette cession successive des mêmes créances qui est à l'origine du litige, puisque la seconde société cessionnaire n'en a pas reçu le paiement.
Ainsi, l'absence de remboursement des créances cédées à l'égard de la seconde société cessionnaire l'a conduite à assigner en première instance la gérante de la société cédante. Suite à un jugement inconnu, le dirigeant de la société cessionnaire a interjeté appel devant une Cour d'appel, qui a accueilli la demande initiale en retenant la responsabilité de la gérante de la société cédante au motif qu'elle a commis une faute séparable de ses fonctions, faute qui lui est imputable personnellement. Non contente, la gérante de la société cédante a formé un pourvoi devant la Cour de cassation qui l'a examiné le 20 mai 2003.
De fait, la demanderesse reproche à la Cour d'appel d'avoir retenu sa responsabilité selon le moyen unique qu'elle n'aurait fait que céder une seconde fois des créances ultérieurement cédées sans apporter la preuve que ces cessions successives constituaient une faute détachable de ses fonctions de dirigeante, alors que selon la gérante, elle avait agi au nom et pour le compte de la société dans l'exercice de ses fonctions, violant ainsi l'article 52 de la loi du 24 juillet 1966.
[...] Enfin, pour ce qui est de l'incompatibilité de la faute avec l'exercice normal des fonctions sociales, on peut émettre une critique dans le cas du présent arrêt. En effet, en l'espèce la gérante a cédé des créances, or ce mode de gestion n'est pas du tout incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales, cependant, on peut comprendre que la rupture avec la normalité tient ici en un certain « abus » de cette prérogative de dirigeant. Ainsi, bien que l'acte de cession de créances ne soit pas détachable des fonctions de dirigeant en soi, c'est la récurrence intentionnelle de cette action sans ignorer le possible dommage que cela pouvait engendrer qui rend finalement l'acte incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales. [...]
[...] De plus, il est ardu de réussir pour un tiers à prouver que la faute du dirigeant est détachable de ses fonctions et qu'elle lui ait en plus imputable personnellement. Ainsi, la Cour de cassation en voulant protéger davantage le dirigeant de société, rendu presque intouchable ce dernier. En effet, cela a conduit la juridiction à exonérer les dirigeants même pour des fautes de gestions graves ou pour un dol dans l'exécution du contrat comme le révèle l'arrêt rendu en Chambre commerciale le 28 avril 1998. La Cour de cassation a donc contribué à créer une certaine irresponsabilité de fait du dirigeant. [...]
[...] Ainsi, pour pouvoir retenir une telle responsabilité, on comprend implicitement que la haute cour a trouvé la preuve des trois éléments traditionnels de la responsabilité du dirigeant à l'égard des tiers. À savoir, la preuve de la faute, du préjudice et du lien de causalité selon l'article 1240 du Code civil qui pose le principe général de la responsabilité civile. Le régime de la responsabilité du dirigeant de société tel que dépeint dans l'arrêt d'espèce ne semble donc pas différent des autres. [...]
[...] La Cour de cassation devait donc répondre à la question suivante, quand et dans quelles mesures la faute du dirigeant et sa responsabilité à l'égard des tiers peuvent-elle être retenues ? Pour répondre à la question, la Cour de cassation rejette le pourvoi au moyen d'un bel attendu du principe rappelant la nécessité d'apporter la preuve d'une faute séparable des fonctions du dirigeant afin d'engager sa responsabilité à l'égard des tiers. Elle émet également une définition somme toute précise de la notion puis vérifie la présence d'une telle faute pour conclure que le moyen n'est pas fondé. [...]
[...] Ensuite, il convient de préciser les termes de la définition. Ainsi, la faute séparable est d'abord une faute intentionnelle, c'est-à-dire une faute commise sans nécessairement vouloir nuire à autrui, mais avec la conscience que cela pourra causer un dommage. De ce fait, on peut parfois qualifier la faute intentionnelle de dolosive, d'ailleurs, en l'espèce, la Cour de cassation relève que la gérante a volontairement trompé la seconde société cessionnaire par des « manœuvres » et indique également que sans ces actes, elle n'aurait pu obtenir la livraison des fournitures attendues. [...]
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