L'un des contentieux les plus réguliers que connaît le droit des sociétés est certainement celui relatif à la révocation des gérants. Ce contentieux a entraîné une jurisprudence importante, et les Tribunaux et Cours ont progressivement inclus, dans le droit des sociétés, des principes extérieurs à celui-ci qui auront pourtant pour objet de s'appliquer à certaines procédures du droit des société, allant même jusqu'à confondre les droits que possèdent les parties dans un procès et les droits que possède chaque associé dans le cadre d'une procédure propre aux sociétés. Tel est le cas de la procédure de révocation des dirigeants, procédure pour laquelle la Cour de Cassation le 14 avril 1994 a imposé le principe du contradictoire. Au delà de cette confusion et des problèmes qu'elle apporte d'un point de vue procédurale, il y a l'éternel problème de la mise en jeu de la responsabilité dans le but de réparer le préjudice, ici, nous parlons de la responsabilité personnelle des associés mais aussi de la responsabilité de la société.
Ces notions nous allons les aborder au travers de deux arrêts de la Cour de Cassation du 22 novembre 2005, dans lesquels des gérants de SARL sont révoqués par un ou des associés majoritaires de la société par l'intermédiaire d'une assemblée générale.
Dans la première espèce, l'arrêt société SEFALAB, la révocation n'était pas inscrite à l'ordre du jour, elle était intervenue sur « incident de séance », sans que l'intéressé ne puisse préparé ses observations. L'ex-dirigeant assigne alors l'associé qui a décidé la révocation ainsi que la société afin de voir la décision annulée et obtenir des dommages-intérêts
La Cour d'appel accueillera sa demande de dommages-intérêts et condamnera in solidum la société et l'associé à verser 12 000 euros à ce titre.
Les juges ayant estimés pour retenir la responsabilité personnelle de l'associé que la décision de révocation dans les conditions ou elle était intervenue traduisait une animosité de l'associé à l'encontre de l'ancien gérant, les juges retiennent ensuite la responsabilité de la société pour le non respect de la procédure.
Dans la seconde espèce, l'arrêt MSR, la gérante est révoquée par une assemblée générale, provoquée par des personnes qui n'en avaient pas la compétence et qui n'avaient adressé les convocations que deux jours avant, ne respectant pas le délai stipulé dans les statuts qui était de quinze jours. L'ex-gérante assigne les deux associés afin que soit retenue leur responsabilité personnelle et obtenir des dommages-intérêts
Les juges du fond vont débouter l'ancienne gérante de sa demande estimant que « même si la révocation est intervenue dans des conditions de forme irrégulières, elle a été décidée par les associés pour un juste motif et non pas dans le dessein de nuire à la gérante ».
Le problème qui se posait à la Cour de Cassation était alors de savoir à quel moment la responsabilité de la société ou des associés était engagée quand une décision de révocation de gérant de SARL est prise dans des conditions de forme irrégulières.
Nous allons voir que la décision de révocation peut être valable malgré le non-respect des conditions formelles (1), ensuite il convient d'étudier la mise en jeu de ces responsabilités et les conditions auxquelles elles répondent (2).
[...] Le juste motif permet donc à la révocation de ne pas être annulée et la responsabilité personnelle des associés de ne pas être engagée puisqu'il n'y a pas d'intention de nuire, malgré le fait que les conditions de forme de la décision n'étaient pas respectées Nous préciserons que le fait que la décision n'ait pas comme base un juste motif ne l'annulera en rien, le code de commerce ne le prévoit pas, il indique seulement que la révocation décidée sans juste motif peut donner lieu à des dommages-intérêts. Ce raisonnement est lourd de conséquences, puisque normalement la décision n'a pas besoin d'être motivée. Nous allons voir l'importance de la reconnaissance d'une faute et la violation du principe du contradictoire dans la mise en jeu de la responsabilité des associés et de la société. [...]
[...] B / La nécessité d'un juste motif Dans la deuxième espèce (arrêt MSR) la Cour de Cassation confirme la décision de la Cour d'Appel de Paris du 13 novembre 2002 qui avait débouté l'ancienne gérante de sa demande en indemnité en rappelant que même si la révocation est retenue dans des conditions de forme irrégulières, elle a été décidée par les associés pour un juste motif et non pas dans le dessein de nuire à la gérante En ce qui concerne les irrégularités formelles, l'assemblée générale avait été provoquée par des personnes qui n'en avaient pas la compétence, de plus les délais de convocation n'avaient pas été respectés, ce qui constituait une violation du principe du contradictoire. La Cour refuse de retenir la responsabilité personnelle du simple fait des irrégularités formelles de l'assemblée générale. [...]
[...] L'ex-gérante assigne les deux associés afin que soit retenue leur responsabilité personnelle et obtenir des dommages-intérêts. Les juges du fond vont débouter l'ancienne gérante de sa demande estimant que même si la révocation est intervenue dans des conditions de forme irrégulières, elle a été décidée par les associés pour un juste motif et non pas dans le dessein de nuire à la gérante Le problème qui se posait à la Cour de Cassation était alors de savoir à quel moment la responsabilité de la société ou des associés était engagée quand une décision de révocation de gérant de SARL est prise dans des conditions de forme irrégulières. [...]
[...] En ce qui concerne la révocation sur décision des associés le code nous précise : dans les assemblées, les décisions sont adoptées par un ou plusieurs associés représentant plus de la moitié des parts sociales En outre la révocation doit être inscrite à l'ordre du jour. La jurisprudence admet que la révocation ne soit pas inscrite si figure à l'ordre du jour une mention relative à la gestion de la société. La révocation peut aussi être prononcée à la suite d'incidents graves et imprévus dits incidents de séances La décision de révocation n'a pas à être justifiée, mais s'il y a absence de juste motif cela peut entraîner l'attribution de dommages et intérêts à destination de la personne révoquée. [...]
[...] Le professeur Marie Anne Frison-Roche précise que les décisions tirent leur légitimité du respect des formes, selon son raisonnement si les formes seraient respectées cela renforcerait le pouvoir des associés de révoquer sans motif. Il faut donc voir dans cette intrusion du principe du contradictoire un certain souci d'équité, mais si l'intention des juges, de vouloir faire entendre le gérant avant que la révocation soit décidée, est louable, l'application de ce principe n'a pas sa place dans le processus d'élaboration des délibérations sociales, car admettre qu'un débat s'impose n'est pas consacrer l'exigence du contradictoire. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture