« Le professeur Dominique Schmidt en tentant de distinguer « intérêt commun des associés » et « intérêt social » invite à relire l'article 1833 du Code Civil, qui dispose que « toute société doit avoir un objet licite et être constituée dans l'intérêt commun des associés ». Mais si l'invitation avait été acceptée par la doctrine, elle paraissait avoir été déclinée par les praticiens. C'est l'un des mérites du présent arrêt de la Chambre commerciale que de révéler un cas d'exploitation du concept d'intérêt commun. »
[...] Les actions comportent un droit préférentiel de souscription à toutes les augmentations de capital en numéraire, même celles consécutives à une réduction à zéro. On en a contesté l'existence pour la raison que la réduction de capital à zéro ne peut être décidée que sous la condition suspensive d'une augmentation de capital destinée à amener celui-ci au minimum légal et que, par le jeu de la rétroactivité de la condition, le droit préférentiel serait anéanti. Cette analyse ne saurait être suivie : elle conduirait à décider que l'assemblée qui aurait décidé l'augmentation de capital serait inexistante puisque la réduction à zéro ayant été rétroactivement réalisée, les actionnaires qui y auraient participé n'avaient plus cette qualité. [...]
[...] Selon l'expression classique de la Cour de Cassation, l'abus de majorité est établi lorsqu'une décision a été prise contrairement à l'intérêt général et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de ceux de la minorité (Cass. Com avril 1961).Comme l'observe le professeur Schmidt, »l'abus implique deux conditions : la première se rapporte à l'intérêt social, la seconde à l'intérêt commun ».Dès lors qu'un coup d'accordéon a été régulièrement effectué, dans le respect de l'égalité des actionnaires, la voie de l'abus de droit est fermée pour contester l'opération. [...]
[...] C'est l'un des mérites du présent arrêt de la Chambre commerciale que de révéler un cas d'exploitation du concept d'intérêt commun. En l'espèce, confrontée à une grave situation d'endettement, une société cotée (la SA l'Amy) avait décidé sa restructuration sur des bases classiques : réduction du capital à zéro, puis augmentation corrélative du capital avec suppression du droit préférentiel de souscription au profit d'une tierce société (La société Kitty Little Group).Certains actionnaires minoritaires critiquèrent l'opération en agitant le grief de l'exclusion. [...]
[...] Le droit préférentiel de souscription est d'ordre public et à ce titre on ne peut y renoncer par avance. Néanmoins, en vertu de l'article L 225- 135 du Code de commerce, »l'assemblée qui décide ou autorise une augmentation de capital peut supprimer le droit préférentiel de souscription pour la totalité de l'augmentation de capital ou pour une ou plusieurs tranches de cette augmentation ».Cette faculté ouverte à l'assemblée générale de supprimer le droit préférentiel de souscription est générale et vaut pour toutes les augmentations de capital en numéraire. [...]
[...] La situation est pourtant paradoxale. Au moment où intervient en effet la réduction de zéro du capital, les actions n'ont pas disparu puisque leur annulation ne résultera que de l'augmentation subséquente. C'est bien pourquoi l'anéantissement des actions n'emporte pas disparition des sociétés. C'est d'ailleurs de cette analyse que s'était inspirée la société l'Amy puisqu'elle avait régulièrement voté une décision de suppression du droit préférentiel de souscription ; pareille décision n'aurait aucun sens si la réduction à zéro emportait automatiquement disparition des actions et de la qualité d'actionnaire. [...]
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