La Cour de cassation dans un arrêt du 29 juin 2010 statue sur l'équilibre du contrat au moment de son exécution et sur la caducité du contrat pour imprévision.
Une société d'exploitation de chauffage (société SEC) et la société Soffimat ont conclu un contrat d'une durée de 12 ans portant sur la maintenance de deux moteurs d'une centrale de production de co-génération moyennant une redevance forfaitaire annuelle. Cependant, les circonstances économiques ont évolué en cours d'exécution du contrat et la société Soffimat s'est alors trouvée face à de graves difficultés liées à la hausse du coût des matières premières qu'elle utilisait pour réaliser les travaux de maintenance. Elle refuse alors de remplir ses obligations, la prestation de la société SEC (contrepartie) étant devenue ridicule et le contrat étant devenu alors profondément déséquilibré. La société SEC a alors exigé en référé l'exécution des engagements pris contractuellement par la société Soffimat.
La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 27 mars 2009 a donné raison à la société SEC au motif que l'obligation de la société Soffimat n'est pas sérieusement contestable. Elle la condamne alors à exécuter son engagement contractuel. La société Soffimat décide alors de former un pourvoi en Cassation.
Les juges de la Cour de cassation se sont alors posé la question de savoir si un co-contractant pouvait se fonder sur un équilibre contractuel gravement défaillant lié à des circonstances imprévisibles intervenues lors de l'exécution du contrat pour remettre en cause le contrat ?
[...] Il intervient en tant que protecteur de l'équilibre contractuel. Même si le juge intervient dans le contrat en cas d'imprévision cette intervention est toutefois limitée. En effet, il ne se permet pas d'ingérence dans le contrat, c'est-à-dire qu'il ne révise pas le contrat ayant déjà été conclu par les parties, mais se contente de le rendre caduc, il ne comporte aucun effet rétroactif, ne constitue pas une annulation. De plus, le fait d'utiliser l'absence de cause pour rendre caduc le contrat limite également la théorie de l'imprévision. [...]
[...] Cette loi s'inscrirait dans la logique de plusieurs autres textes de pays membres de l'union européenne comme la Grèce, le Portugal, l'Italie ou encore l'Allemagne qui ont depuis de nombreuses années consacré la théorie de l'imprévision. Par ailleurs, des projets de réformes du droit des obligations en cours prônent l'introduction de la théorie de l'imprévision dans le Code de commerce. Ainsi, l'arrêt du 29 juin 2010 s'inscrit bien dans le courant actuel tendant à consacrer en droit la théorie de l'imprévision. [...]
[...] Ainsi, les partisans de cette théorie prônent notamment un principe de liberté contractuelle c'est-à-dire que les individus sont libres de s'engager ou non. S'ils s'engagent, ils sont libres de déterminer le contenu de leur relation et un principe de force obligatoire du contrat c'est-à-dire que la liberté des individus leur donne la possibilité de ne pas s'engager. Mais s'ils s'engagent, ils doivent respecter leurs engagements. Or, dans cet arrêt le juge intervient fortement dans le contrat. En effet, le principe voudrait que l'on laisse libre appréciation aux parties de l'équilibre contractuel. [...]
[...] Commentaire d'arrêt - Cour de cassation juin 2010: l'équilibre du contrat L'admission par les juges de la Cour de cassation de la caducité du contrat pour imprévision : une solution originale. Les juges de la Cour de cassation prononcent une décision audacieuse et innovante en admettant implicitement la théorie de l'imprévision Ils se fondent pour cela sur la notion de nullité du contrat pour absence cause pour justifier en droit leur décision L'utilisation inédite de la théorie de l'imprévision. Les juges de la Cour de cassation utilisent dans cet arrêt la théorie de l'imprévision pour prononcer la caducité du contrat. [...]
[...] En l'espèce , les juges de la Cour de cassation se servent de cette notion d'absence de cause pour prononcer la caducité du contrat. En effet, c'est un changement imprévisible des circonstances qui a supprimé la cause de l'engagement souscrit par le débiteur de l'obligation de révision des moteurs. C'est l'évolution des circonstances économiques et notamment l'augmentation du coût des matières premières et des métaux au cours de l'exécution du contrat qui a provoqué un déséquilibre de son économie, de sa profitabilité dans la mesure où l'engagement du débiteur de l'obligation de révision s'est trouvé privé de contrepartie réelle, au regard du montant devenu ridicule de la redevance que devait lui verser son cocontractant, laquelle avait été fixée au jour de la conclusion du contrat en contemplation de circonstances économiques radicalement différentes. [...]
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