L'ouverture d'un redressement judiciaire (RJ) ou d'une liquidation judiciaire (LJ) à l'égard d'un groupement peut entraîner une extension de cette procédure à d'autres personnes. L'alliance fragile de la SCI et de la société commerciale d'exploitation a fait l'objet d'un fort contentieux concernant l'extension de procédure fondée sur la confusion de patrimoine.
C'est sur ce point que la Chambre commerciale de la Cour de Cassation, au terme d'arrêts rendus le 7 janvier 2003, a statué.
S'agissant de la 1ère espèce, la société LMT a été mise en RJ. Par jugement du 19 mars 1998, le tribunal a étendu cette procédure à la SCI en retenant la confusion de patrimoine des deux sociétés et la fictivité de la SCI. Un autre jugement a été rendu le 15 octobre 1998, prononçant la LJ de la société LMT ainsi que l'extension de cette procédure à la SCI.
La société LMT a formé appel contre le jugement du 15 octobre 1998 car elle contestait la LJ.
Au terme d'un arrêt rendu le 25 novembre 1998, la Cour d'Appel de Rouen a réformé la décision et a jugé qu'il n'y avait pas LJ et a adopté le plan de continuation présenté par la société LMT.
La SCI a relevé appel des deux jugements. La Cour d'Appel a confirmé le jugement du 25 novembre 1998. Par conséquent, la SCI se pourvoit en Cassation, elle fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement du 19 mars 1998 qui lui a étendu la procédure de RJ.
En outre, dans la deuxième espèce, un jugement du 20 novembre 1995 a décidé l'ouverture de la procédure de RJ à l'égard de 10 sociétés. Il a fixé la date de cessation des paiements (CDP) au 20 novembre 1995. Un autre jugement du 12 février 1996 a décidé l'ouverture d'une procédure de RJ à l'égard de deux autres sociétés dont il a fixé la date de CDP au 9 février 1996. Un dernier jugement du 25 mars 1996 a constaté l'existence de la confusion des patrimoines de ces 12 sociétés. La Cour d'Appel a décidé, par jugement, de reporter au 30 juin 1995 la date de CDP des 10 sociétés.
Le représentant des créanciers et le commissaire à l'exécution du plan font grief à l'arrêt d'avoir décidé le report de la date de CDP des sociétés au 30 juin 1995.
Ainsi, sur quel fondement est retenue l'extension de procédure collective à une ou plusieurs sociétés et de quelle manière la Cour de Cassation maintient-elle le principe d'unicité de la procédure ? Par ailleurs, comment le principe d'unicité de la procédure agit-il sur la fixation de la CDP en cas de report ?
Tout d'abord, dans la 1ère espèce, la Cour de Cassation retient un nouveau critère à la définition de la confusion de patrimoine, celui de relations financières anormales. Elle juge qu'il y a extension de la procédure fondée sur la confusion des patrimoines et non sur la fictivité et que la démonstration de la CDP n'est pas un critère justifiant cette extension.
Ensuite, dans la 2ème espèce, la Cour de Cassation juge que le principe d'unicité de la procédure a pour conséquence sur la fixation de la CDP, en cas de report, une détermination comparative entre le passif exigible et l'actif disponible des sociétés effectuée par le juge.
Nous verrons, dans un premier temps, que l'extension de la procédure collective pour confusion des patrimoines a été retenue par la Cour de Cassation (I).
Dans un second temps, nous verrons les enjeux de l'influence de l'unicité de la procédure sur l'unicité du patrimoine (II).
[...] - La Cour de Cassation use donc d'un nouveau critère pour constater la confusion des patrimoines. En effet, la jurisprudence antérieure parlait de flux financiers anormaux. - Nous pouvons en déduire, d'une part, que le domaine de l'extension de la procédure collective s'en trouve élargi, ce qui facilite sa mise en œuvre. D'autre part, si les juges avaient eu recours à l'ancien critère, ils n'auraient pas pu étendre la procédure de RJ à la SCI puisqu'il n'y avait pas ou plus de flux financiers. [...]
[...] C'est sur ce point que la Chambre commerciale de la Cour de Cassation, au terme d'arrêts rendus le 7 janvier 2003, a statué. S'agissant de la 1ère espèce, la société LMT a été mise en RJ. Par jugement du 19 mars 1998, le tribunal a étendu cette procédure à la SCI en retenant la confusion de patrimoine des deux sociétés et la fictivité de la SCI. Un autre jugement a été rendu le 15 octobre 1998, prononçant la LJ de la société LMT ainsi que l'extension de cette procédure à la SCI. [...]
[...] - La portée de cet arrêt concerne donc l'unicité de la procédure sur la fixation de la date de CDP. - La Cour de Cassation reste ainsi fidèle à la logique d'entreprise unique, laquelle permet de constituer une masse unique de biens (active et passive). - La Cour de Cassation précise que le pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve contradictoires débattue appartient aux juges du fond. - En l'espèce, la Cour de Cassation juge que si, à la date de CDP, il n'était pas démontré qu'à cette même date les deux autres sociétés étaient en CDP et même si la confusion des patrimoines est constatée, il peut y avoir des dates de CDP différentes. [...]
[...] - C'est l'unité des sociétés soumises à la procédure collective unique qui justifie la solution. B Le caractère préjudiciable de l'unicité de la procédure à l'égard des sociétés objets de l'extension - L'extension de procédure ne peut pas avoir lieu si une société fait déjà l'objet d'un plan de continuation ou de redressement. - En l'espèce, l'extension de la procédure de LJ de la LMT à la SCI est arrivée après le jugement constatant l'extension. La CA de Rouen a réformé ce jugement en considérant qu'il n'y avait plus LJ et a accepté le plan de continuation de LMT mais n'en a pas fait bénéficier la SCI. [...]
[...] - Il paraît important de préciser que la conciliation de l'unité de la masse patrimoniale unique du fait de l'extension de procédure et la permanence de la personnalité juridique des différentes personnes visées par la procédure est délicate. Elle donne lieu à de nombreuses incertitudes. - Nous pouvons conclure que les solutions jurisprudentielles s'expliquent tantôt par le maintien de la personnalité juridique des différents débiteurs, tantôt par référence au principe de l'unité procédurale. En l'espèce, la Cour de Cassation a préféré retenir le principe de l'unité procédurale pour fonder l'extension de la procédure. [...]
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