L'exclusion d'un associé afin d'éviter une dissolution judiciaire pour mésentente a pu être sollicitée sur le fondement du droit commun des obligations (article 1184 du Code civil).
Les faits de l'espèce se prêtent à cette jurisprudence, en effet, une mésentente au sein d'une SNC (Société en Nom Collectif) conduit un des associés à demander la dissolution judiciaire de la société, ses coassociés s'y opposent en prétendant que les conditions d'une telle mesure ne sont pas réunies et proposent comme solution subsidiaire le rachat de ses droits sociaux. La Cour d'Appel de Paris, dans un arrêt du 25 mars 1993 prononce la dissolution de la société et refuse de faire droit à la demande de rachat des parts sociales sur le fondement de l'article 1844-7 5°. Les coassociés forment alors un pourvoi. La Cour de Cassation, qui devait se prononcer sur la possibilité pour la juridiction saisie de la demande de dissolution de la société pour justes motifs d'obliger l'associé demandeur à céder ses droits sociaux à la société ou à ses coassociés, rejette la pourvoi, confirmant ainsi la décision rendue en appel.
[...] L'opportunité d'une dissolution anticipée pour justes motifs basée sur la mésentente des associés est d'autant plus claire dans les sociétés de personnes dominées par un fort intuitu personae. En l'espèce, la société est une Société en Nom Collectif, une société constituée entre deux ou plusieurs personnes ayant la qualité de commerçantes, tenues personnellement et solidairement de toutes les dettes sociales et auxquelles sont attribuées des parts d'intérêts qui ne peuvent être cédées qu'avec le consentement de tous les associés ; société où l'intuitu personae est donc dominant, et dans laquelle la mort d'un associé peut entraîner la disparition de l'être social, on comprend alors qu'une mésentente puisse mettre à mal l'existence même de la société, encore plus si celle-ci est sérieuse L'article 1844-7 précise que la mésentente doit paralyser le fonctionnement de la société. [...]
[...] Exclure cet associé permettrait alors de remettre en marche la société après une période de paralysie due à la mésentente en faisant disparaître le détracteur mais surtout permettre la pérennité de la société. La dissolution pour justes motifs est une action originale qui emprunte au droit commun de la résolution judiciaire (article 1184 du Code civil) et au droit spécial des sociétés : la dissolution repose sur la double constatation de la disparition de l'affectio societatis et de l'inaptitude de la société à remplir sa fonction économique d'organisation de l'entreprise. [...]
[...] L'exclusion de l'associé pour éviter la dissolution anticipée de la société faisait l'objet d'un débat doctrinal persistant, certains auteurs soutenant l'idée que la mésentente entre associés pouvait devenir un motif d'exclusion d'un associé de la société, en s'appuyant sur des décisions allant en ce sens, d'autres auteurs, s'appuyant sur une jurisprudence contraire, s'opposaient à cette possibilité. Les auteurs en faveur de l'exclusion de l'associé cherchaient un fondement textuel pour justifier cette exclusion, l'article 1184 du Code civil a alors été sollicité, fondement incertain. En l'espèce, la proposition des coassociés de la société de racheter les parts de l'associé à l'origine de la demande de dissolution anticipée allait dans le sens d'une exclusion aux fins d'assurer le maintien de la vie sociale. [...]
[...] De plus, la pérennité de la société avancée au soutien de l'exclusion ne serait qu'hypothétique, dans la mesure où chaque associé apporte une contribution nécessaire à la société, notamment dans les sociétés de personnes. Le cas d'espèce est concerné par cet argument, car il s'agit d'une SNC, et l'associé menacé d'exclusion avait une importance notable dans le fonctionnement de l'être social, un rôle prépondérant selon les termes de la Cour car il disposait de des parts sociales de la SNC. [...]
[...] Com.25 février 1964, Cass. Com juin 1992, concernant une demande de dissolution anticipée pour mésentente formée par un associé d'une SARL, la Cour d'Appel avait fait droit à la demande de l'associé en constatant la mésentente, la Cour de cassation saisie d'un pourvoi casse la décision rendue en appel au motif que la Cour d'Appel n'avait pas recherché si l'associé demandeur était ou non à l'origine de la mésentente). Cette prétention a été avancée par les coassociés formant le pourvoi, selon eux, l'associé demandant la dissolution pour mésentente est justement à l'origine de celle-ci, l'associé ayant eu selon eux un comportement abusif et frauduleux. [...]
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