La sanction de la violation du pacte de préférence a fait l'objet d'une importante évolution à l'occasion de cet arrêt de la chambre mixte de la cour de cassation en date du 26 mai 2006. Le pacte dont il est question peut se définir comme un contrat par lequel le propriétaire d'un bien s'engage s'il vend le bien en question à le proposer en priorité au bénéficiaire.
En l'espèce, un acte de donation-partage en date du 18 décembre 1957 contenant un pacte de préférence au bénéfice de Mme X attribuait un bien à Mme A. Un second acte de donation-partage en date du 7 aout 1985 rappelant le pacte attribuait une parcelle dépendant dudit bien à M. A, qui le vendit ensuite à la SCI Emeraude. Mme X invoqua la violation du pacte de préférence et demanda sa substitution dans les droits de l'acquéreur, ainsi que le paiement de dommages intérêts.
Suite au rejet de sa demande par la Cour d'Appel de Papeete par un arrêt du 13 février 2003, Mme X forma un pourvoi en cassation.
Dans cette affaire, il appartient à la Haute Juridiction de déterminer quelles conditions doivent être remplies pour que le bénéficiaire d'un pacte de préférence puisse demander sa substitution au tiers acquéreur du bien litigieux. Elle a en l'espèce jugé que « si le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir sa substitution à l'acquéreur, c'est à la condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu'il a contracté, de l'existence du pacte de préférence et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir ; qu'ayant retenu qu'il n'était pas démontré que la société Emeraude savait que Mme X avait l'intention de se prévaloir de son droit de préférence, la cour d'appel a exactement déduit de ce seul motif, qui la réalisation de la vente ne pouvait être ordonnée au profit de la bénéficiaire du pacte ».
Si cette décision semble être un pas en avant dans le domaine de l'avant-contrat puisque présente la substitution comme un droit (I), c'est tout de même une avancée réduite puisque ce droit est tellement conditionné qu'il apparait très difficile à exercer (II).
[...] La découverte du droit à la substitution pour le bénéficiaire évincé La violation du pacte de préférence consiste pour le promettant à vendre le bien objet du pacte à un tiers sans en proposer au préalable l'achat au bénéficiaire. Elle pouvait jusqu'alors seulement être sanctionnée de deux manières : tout d'abord par le versement de dommages-intérêts de la part le promettant qui manque aux obligations qui découlent du pacte (Civ 3e juillet 1985), et de la part du tiers acquéreur qui engageait sa responsabilité délictuelle. (Civ 1ère juillet 2006) ; ensuite par l'annulation de la vente, en cas de fraude. [...]
[...] Cependant, cette condition posée judicieusement peut être contournée par l'effet de la publication à la conservation des hypothèques du pacte de préférence, comme c'est le cas en l'espèce où le pacte a fait l'objet d'une publication régulière avant la vente contestée .En effet, selon la première chambre civile de la Cour de cassation (11 juillet 2006), le tiers acquéreur commet une faute de négligence en concluant la vente en violation du pacte, puisqu'il doit en connaitre l'existence grâce à la publication. Si la Cour n'avait posé que cette condition de connaissance du pacte à la possibilité de substitution, celle-ci serait possible chaque fois que le pacte est publié. Le bénéficiaire pourrait donc être protégé contre la violation du pacte, même s'il est négligent. C'est un danger pour le tiers acquéreur, qui a été contourné par la deuxième condition posée par la Cour. II. [...]
[...] Une consécration de la substitution artificielle A. Un droit à la substitution excessivement subordonné à la mauvaise foi du tiers Pour éviter les excès de la substitution, la Cour de cassation a posé une seconde condition à la substitution, qui découle de la première. Elle exige en effet que le tiers acquéreur ait connaissance de l'intention du bénéficiaire de se prévaloir du pacte. Bien entendu, si cette condition est remplie, la première l'est aussi, car l'acquéreur ne peut savoir que le bénéficiaire veut se prévaloir du pacte que s'il a connaissance de l'existence de celui-ci. [...]
[...] Commentaire d'arrêt: Chambre Mixte mai 2006 La sanction de la violation du pacte de préférence a fait l'objet d'une importante évolution à l'occasion de cet arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation en date du 26 mai 2006. Le pacte dont il est question peut se définir comme un contrat par lequel le propriétaire d'un bien s'engage s'il vend le bien en question à le proposer en priorité au bénéficiaire. En l'espèce, un acte de donation-partage en date du 18 décembre 1957 contenant un pacte de préférence au bénéfice de Mme X attribuait un bien à Mme A. [...]
[...] L'inconvénient de cette substitution est qu'elle a un effet sur un contrat auquel le bénéficiaire n'est pas partie, c'est-à-dire le contrat de vente entre le promettant et le tiers acquéreur. B. Un droit à la substitution logiquement subordonné à la connaissance du tiers de l'existence du pacte La Cour de cassation en l'espèce ne se prononce pas sur la qualification de l'obligation du promettant, à savoir si c'est une obligation de faire ou de donner. Elle se borne à permettre la substitution du bénéficiaire à l'acquéreur, en la soumettant à deux conditions sans lesquelles ladite substitution est impossible. [...]
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