Traditionnellement, la pratique et les juges faisaient prévaloir la nature réelle du cautionnement réel. La particularité de sa situation, dans le panorama des sûretés, n'a soulevé de difficultés qu'à partir du moment où les auteurs se sont interrogés sur la vraie nature de ce contrat. Ils ont commencé à se demander s'il ne comportait pas en réalité une dose d'engagement personnel, voire s'il ne relevait pas complètement de la catégorie des sûretés personnelles. Le trouble a donc été jeté sur la nature du cautionnement réel d'abord par la doctrine et cette discussion n'a eu des répercussions en jurisprudence que du fait de l'augmentation des recours juridictionnels.
En conséquence, invitée à se prononcer sur le bien fondé de la qualification retenue par la Cour d'Appel, mentionnée plus haut, la Chambre civile du 2 décembre 2005, par un arrêt de la Chambre mixte, semble répondre à deux questions restées latentes jusqu'à là, ou tout du moins qui avaient connu préalablement des réponses diverses :
1. Quelle terminologie juridique, et dès lors quel régime, s'appliquent-ils à une technique jusqu'alors mentionnée dans la pratique des affaires et la jurisprudence comme « cautionnement réel », en l'espèce l'assurance du paiement d'une dette par une valeur mobilière dématérialisée ? Est-elle un cautionnement, avec les limites de l'article 1415 du Code civil ? Est-elle un nantissement, avec celles de l'article 1424 du même code ?
2. Quel est l'effet de l'évolution du cadre matrimonial, voulu par le législateur en accompagnement de cette évolution des mœurs mettant au rang des archaïsmes la notion de « pater familias », sur cette pratique du cautionnement réel ; sachant que cette question puisse n'être qu'un alibi.
Laissant de côté la seconde interrogation, nous chercherons, dans une première partie, à identifier quel est le régime du cautionnement réel de M. X… selon la Chambre mixte en son arrêt du 2 décembre 2005 ; en ayant soin de préciser le régime général du cautionnement, sans pour autant exposer celui du nantissement, et retracer les arguments de la jurisprudence antérieure.
Dans une seconde partie, nous verrons quelles sont les conséquences techniques et pratiques, qui ont été rendues implicites par ce revirement de jurisprudence.
A ce titre, nous reprendrons au cours de notre commentaire l'expression « sûreté réelle innommée » utilisée par le Pr. Bernard Vareille, professeur de droit à l'Université de Limoges et présumé un des inspirateurs du revirement de jurisprudence.
[...] Le cautionnement réel au regard du droit des obligations. On doit d'abord faire remarquer que la doctrine donne une explication assez rhétorique à la position de la Cour de cassation formulée à l'arrêt du 2 décembre 2005. Par exemple, Laurent Aynès, professeur à l'Université Panthéon-Sorbonne (Paris a démontré, dans un article intitulé Une Chambre mixte se prononce sur la nature du cautionnement réel que le raisonnement de la Cour était articulé autour de l'analyse du cautionnement réel au regard du droit des obligations (Recueil Dalloz 206, p.733). [...]
[...] Les griefs contre le revirement de jurisprudence du 2 décembre 2005. La distinction, opérée par la jurisprudence du 2 décembre 2007, entre le cautionnement et le cautionnement réel sur la base de l'engagement personnel est pour le moins curieuse. Valérie Avena-Robardet, dans son article Le cautionnement réel n'implique aucun engagement personnel (Recueil Dalloz 2006, p. s'interroge sur la portée du revirement de jurisprudence en ces termes : Certes la décision de la Chambre mixte du 2 décembre 2005 est en complète harmonie avec celles qui ont exclu le cautionnement réel du formalisme des articles 1326 du Code civil, des bénéfices de discussion et de division, ou encore du bénéfice de l'obligation annuelle d'information de la caution. [...]
[...] Interrogations quant au régime juridique du cautionnement réel On doit souligner de l'arrêt de cassation du 2 décembre 2005, que la Chambre mixte retient les motifs de Cour d'appel de Limoges pour laquelle l'article 1415 n'est pas applicable au nantissement de titres entrés dans la communauté, une sûreté réelle consentie pour garantir la dette d'un tiers n'impliquant aucun engagement personnel à satisfaire à l'obligation d'autrui et n'étant pas dès lors un cautionnement, lequel ne se présume pas (article 2292 du Code civil). Comment opère la Cour de cassation pour parvenir à cette conclusion et pour définir ce régime ? Il est probable que la Cour ait articulé son raisonnement en deux étapes : 1. [...]
[...] Toutefois, avant de parvenir à cette harmonie sphérique, la valse jurisprudentielle a soulevé des interrogations et des inquiétudes. Elles portent sur le manque d'autorité de la décision intervenue ; mais aussi sur les risques pour la sécurité juridique suite aux nombreuses fluctuations de jurisprudence. Certes, l'arrêt de la chambre mixte de 2005 a mis fin aux fluctuations jurisprudentielles de 1995 et 2002. La formation en chambre mixte donne, en effet, à ses décisions une portée bien supérieure à celle d'une simple chambre, qu'elle soit commerciale ou civile. [...]
[...] Cette thèse présente donc une grande complexité, l'application du régime juridique du cautionnement simple ne s'expliquant que pour des raisons d'opportunité et de morale pour protéger un philanthrope qui s'engage au bénéfice d'un autre. La jurisprudence, même si elle a parfois pris des décisions pouvant étayer cette thèse, ne lui a pas donné de réel prolongement juridique. En revanche, les juges ont pu admettre un cautionnement réel teinté d'engagement personnel conformément à la thèse du cautionnement réel mixte. Conclusion L'arrêt du 2 décembre 2005 a entendu préciser la nature et le régime juridiques du cautionnement réel au regard du régime matrimonial. [...]
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