Depuis une quinzaine d'années, l'action directe imparfaite retenue par les juges du fond n'est plus applicable devant les juridictions civiles. Cette théorie a disparu au profit de l'action directe parfaite, voie d'action soutenue par le législateur et par la Cour de cassation qui n'a d'ailleurs, en l'espèce, pas manqué de rappeler aux juges du fond la nouvelle interprétation de la loi de 1975 qui doit être suivie (I). Mais cette évolution jurisprudence, malgré l'intervention du législateur en 1975 et en 1981, a bien du mal à s'imposer aux juges du fond (II)
[...] Commentaire de l'arrêt de la chambre criminelle de la cour de Cassation du 16 mai 1995 Introduction Le contrat d'entreprise est généralement conclu à titre onéreux. Il doit normalement être rémunéré en argent par le maître de l'ouvrage, faute de quoi, comme l'avait souligné Pothier, il constituerait un contrat innommé. Le paiement effectif du sous-traitant est une préoccupation constante du législateur depuis la loi du 31 décembre 1975, notamment au regard de son article 12. Le législateur a voulu donner à ce dernier la certitude qu'il recevrait son paiement, en le faisant bénéficier d'un système de garanties légales (action directe contre le maître de l'ouvrage) ou obligatoire (comme le cautionnement d'un établissement financier). [...]
[...] Cette divergence entre juge du fond et Cour de cassation trouve sa justification dans le caractère exceptionnel qu'ont les actions directes. En effet, les juges du fond, tout comme certains membres de la doctrine, considèrent que les actions directes imparfaites sont inhérentes à la présence d'un groupe contractuel, dont elles seraient une conséquence inéluctable. Il s'agit donc du principe le plus facilement applicable et donc le plus largement appliqué. En revanche, les actions directes parfaites sont considérées comme exceptionnelles, et donc rarement appliquées. [...]
[...] En l'espèce, le sous-traitant n'est pas payé en raison de la cession de créance de l'entrepreneur principal. Il ne peut pas non plus se retourner contre le maître de l'ouvrage car ce dernier, étant honnête, a déjà réglé les sommes qu'il devait à la Banque de Savoie, empêchant ainsi la SEEV de demander son paiement à la Cogema par voir d'action directe en raison de l'application de la théorie de la double limite. Donc, même si tout est fait depuis longtemps pour protéger les sous-traitant, l'action directe parfaite reste une solution théorique que les juges du fond refusent toujours d'appliquer au profit de l'ancienne théorie de l'action directe imparfaite. [...]
[...] Selon la théorie de la Cour de cassation, l'action directe est applicable quelle que soit la date à laquelle la créance a été cédée. Mais certains auteurs, ainsi que les juridictions du fond, réfutent cette possibilité, ils refusent l'action directe parfaite, ils refusent de protéger le sous-traitant car la créance ne peut être immobilisée alors même que le contrat de sous-traitance n'existe pas. Un scepticisme quant à l'application de cette théorie est bien présent, et la jurisprudence quant à elle, reste partagée quant à son application. [...]
[...] Jusqu'à ce moment, la créance contre le sous-débiteur demeure dans le patrimoine du débiteur principal, où elle peut être éteinte par un paiement, ou saisi, ou cédé. Mais il s'agit d'une action fragile, dont l'efficacité dépend de la célérité du créancier, après que sa créance soit devenue exigible. En l'espèce, la Cour d'appel avait retenu cette solution. La SNCLT ayant déjà cédé sa créance envers la Cogema à la banque de Savoie et la Cogema ayant réglé sa dette auprès de cette banque, la SEEV n'a pu obtenir le paiement de sa créance. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture