Inspirée par le modèle américain des faillites, la loi du 26 juillet 2005 a introduit en droit français une procédure de sauvegarde judiciaire, qui s'ouvre au profit des entreprises n'étant pas encore en état de cessation des paiements. Cette procédure permet notamment de traiter de manière anticipée les difficultés rencontrées par une entreprise. Le recours à cette procédure s'est particulièrement démocratisé durant la crise des subprimes qui tel un effet de domino, a entrainé de nombreuses entreprises dans sa chute. La dynamique du « too big to fail » a d'ailleurs montré ses limites lorsque la banque d'affaires Lehman Brothers a défailli, contaminant dans son sillage toute une série d'acteurs. L'arrêt de la chambre commerciale rendu en date du 8 mars 2011 en est la parfaite illustration.
En l'espèce, une société par actions simplifiée fait l'acquisition d'immeubles par le biais d'une société civile immobilière. Cette SAS, dont l'objet social se limitait exclusivement à détenir un immeuble de bureaux, est elle même détenue à 100% par une holding dont l'objet social résidait dans la gestion du portefeuille de titres de la SAS. L'acquisition des immeubles par la SAS, qui pour l'occasion adopte la forme d'un SPV (Special Purpose Vehicle), est financée par un prêt à taux variable octroyé par la banque « Lehman Brothers ».
[...] Ainsi, en cas de non-paiement, le créancier a la possibilité de devenir le seul actionnaire de la SAS, vu que la holding la détient à Pour se couvrir contre le risque de variation des taux, la SAS a conclu deux contrats financiers type CDS (credit default swap) avec la société Lehman Brothers International qui s'est elle aussi couverte auprès de la société Lehman Brothers Inc Cette créance de prêt détenue par la banque a également été cédée dans le cadre d'une opération de titrisation, à un fonds commun de titrisation, précisément pour que le risque attaché au crédit soit sorti de son bilan et qu'ainsi, les ratios prudentiels puissent être respectés. Mes les deux filiales du groupe qui se sont mutuellement couvertes par CDS sont frappées par la crise des subprimes, elles sont placées en procédure collective dans leur pays respectif et ne peuvent donc plus assurer leurs obligations dans le cadre du contrat de couverture du taux. Or le défaut de couverture est une inexécution contractuelle entrainant la déchéance du terme du prêt souscrit, et donc son remboursement anticipé. [...]
[...] Il ne peut pas non plus exécuter son pacte commissoire sur les titres de la SAS à l'égard de la holding qui les détient à hauteur de 100%, car totalement paralysé par les effets de la sauvegarde. C'est précisément pour cette raison que la Cour de cassation déclare recevable la tierce opposition, le créancier invoquant des moyens qui lui sont propres et l'ouverture de la procédure permettant aux débiteurs d'échapper à l'exécution de leurs obligations ainsi que de le contraindre à négocier leur aménagement Le principe de la force obligatoire des contrats est ainsi fortement mis à mal, ce qui nuit fondamentalement à la sécurité juridique. [...]
[...] La nomination d'un administrateur qui prendra les rênes de l'entreprise, sans pour autant avoir le statut de dirigeant, va s'inscrire dans une dynamique de meilleure gestion, mais aussi de négociation avec les créanciers pour que soit trouvé un plan de sauvegarde, procédant à l'échelonnement de la dette, et peut être même à sa réduction partielle. Sous l'empire de la législation applicable à l'époque des faits, l'article L. 620-1 du Code de commerce prévoyait qu'il appartenait au débiteur de démontrer que les difficultés insurmontables qu'il rencontrait étaient de nature à le conduire à la cessation des paiements Il faut noter que l'ordonnance du 18 décembre 2008 a supprimé cette condition, ce qui depuis rend beaucoup plus facile l'ouverture d'une procédure de sauvegarde. [...]
[...] Or, comme souvent dans les financements de projets adossés à des taux d'intérêt variables, il est souvent exigé de la part du débiteur qu'il souscrive à une couverture, ou edge qui prend notamment la forme d'un contrat financier dont le CDS credit default swap est l'archétype. Le mécanisme de la titrisation permet en effet pour le prêteur de sortir de son bilan le risque lié à l'éventuel défaut de son débiteur dans le remboursement des échéances du prêt. C'est notamment une méthode qui permet de respecter les ratios prudentiels imposés par les accords de Bâle. [...]
[...] Par un arrêt rendu en date du 25 février 2010, la Cour d'appel de Paris accueille la tierce opposition et prononce la rétractation des jugements d'ouverture des deux procédures de sauvegarde. La SAS et la holding forment alors un pourvoi en cassation. Les questions posées aux magistrats de la Cour de cassation sont celles de la recevabilité de la tierce opposition formée par la société de gestion du FCT et de la rétractation des jugements d'ouverture des deux procédures de sauvegarde en faveur de la SAS et de la holding. [...]
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