La cession d'un fonds de commerce suppose non seulement l'acquisition de biens matériels tels que les outils permettant l'exercice de l'activité, mais également la transmission d'un patrimoine immatériel tels que la clientèle. Ce deuxième aspect est difficile à connaître et à évaluer dans sa substance pour l'acquéreur potentiel. Ainsi le rôle d'information par le vendeur semble primordial pour cerner le plus fidèlement possible la constitution du fonds de commerce que le preneur désire acquérir. Or parfois l'acheteur considère que son consentement a été vicié lors de la conclusion du contrat de vente par le dol du vendeur. Outre la nullité qu'encourt la convention entachée de dol, cette situation peut reconnaître l'attribution d'une indemnité délictuelle à l'acheteur. C'est dans ces circonstances que s'inscrit l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 7 juin 2011.
En l'espèce, une commerçante a cédé son fonds de commerce à une société exerçant la même activité. Seulement l'acquéreur s'estime victime d'un dol par réticence survenu par une mauvaise information du vendeur portant sur la qualification d'une employée dont son contrat de travail fut repris lors de la cession. La société a donc assigné le vendeur en demande d'indemnisation sur le fondement délictuelle en se prévalant d'un dol à son encontre.
[...] Cette combinaison entre un régime de responsabilité délictuelle et une cause de nullité de la convention (bien que non demandé en l'espèce), est clairement l'enjeu de la solution et l'apport principal de l'arrêt. En effet l'on peut constater dans un premier temps que la décision de la chambre commerciale est en contradiction avec la position de la première chambre civile de la Cour de cassation. Un arrêt du 28 mai 2008 de la première chambre civile a admis que l'intention dolosive n'était pas nécessaire pour accueillir une simple demande de dommages-intérêts sur le fondement délictuel. [...]
[...] En l'espèce l'on peut se demander si la société qui a été lésée lors de la vente du fonds de commerce, aurait pu mettre en cause la responsabilité civile délictuelle du vendeur en se prévalant, non pas d'un dol, mais d'une faute caractérisée par une violation d'une obligation d'information. Nous pouvons cependant imaginer que cette obligation d'information trouve sa source dans le régime du dol. Afin d'extrapoler un peu plus loin nous constatons que cette solution peut acculer les futures parties au contrat à devoir s'informer rigoureusement afin d'écarter toute faute d'information de leur part pouvant mettre en cause leur responsabilité civile extracontractuelle. [...]
[...] L'affaire fut portée devant la Cour d'appel de Nîmes. Elle débouta la demande formée par la société en considérant que le vendeur a commis une négligence grave mais que malgré cette faute, la demande d'obtention de dommages-intérêts ne peut être accueillie du fait que le défaut d'information ne serait pas constitutif d'un dol au motif qu'il n'y a pas d'élément intentionnel. De plus, la Cour relève que si l'information avait été connue, l'acquéreur n'aurait pas pour autant renoncé à la conclusion de la vente. [...]
[...] Les juges ont rejeté la demande d'indemnisation délictuelle fondée exclusivement sur le dol. Cette décision démontre que le dol ne peut pas forcément garantir une réparation délictuelle. Malgré cela la notion d'information reste au cœur de la solution. Le juge veut en quelque sort promouvoir une responsabilité précontractuelle dont la demande s'appuierait sur la violation d'une obligation précontractuelle d'information B ) Une décision en faveur d'une plus grande autonomie de la responsabilité précontractuelle Cette solution écartant la demande d'indemnisation délictuelle fondée exclusivement sur le dol, semble inciter les justiciables victimes d'une mauvaise d'information à fonder leur demande de dommages-intérêts sur un autre aspect que le dol (le dol ne suffisant pas à accueillir une simple demande d'indemnisation). [...]
[...] C'est par conséquent le caractère intentionnel qui caractérise principalement le dol B ) La réticence dolosive impérativement subordonnée à la reconnaissance de l'intention dolosive Ici encore, l'arrêt n'apporte pas de nouveauté, il reprend une composante du dol depuis longtemps admise par la jurisprudence. Cet arrêt démontre le rôle primordial de l'intention dans la caractérisation du dol. En effet, la solution affirme qu'en l'espèce il n'était établi ni l'intention de Mme X de tromper la société Outre le fait que la Cour recherche la présence ou non d'un dol afin d'appuyer sa décision, elle illustre que l'intention dolosive est déterminante pour rechercher un dol. Ainsi, il ne peut y avoir de dol que par une intention de tromper l'autre partie. [...]
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