Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 5 mai 2004, droit des entreprises en difficulté
La loi n° 94-475 du 10 juin 1994 a profondément remanié le droit des entreprises en difficultés. Elle a notamment apporté des modifications au traitement des contrats en cours au moment de l'ouverture d'une procédure collective. L'article L621-28 du Code de commerce aménageait un report d'ouverture de l'action en revendication concernant les contrats en cours. Mais quid du contrat de vente mobilière avec clause de réserve de propriété dans le cadre d'une procédure collective ?
En l'espèce, il s'agissait d'une vente de bien meuble, une machine, dont le vendeur s'était réservé la propriété jusqu'à paiement complet du prix. Cependant, avant que le prix ne soit payé, l'acheteur avait fait l'objet de l'ouverture d'une procédure collective, et mise en redressement judiciaire.
Le 18 décembre 1998, la société Brown et Sharpe avait vendu à la société Mécasat une machine avec réserve de propriété jusqu'à paiement complet du prix. Le 1er avril 1999, la société Aérosat, qui avait entre-temps, absorbé la société Mécasat, avait été mise en redressement judiciaire. Un plan de cession avait par la suite été adopté le 29 septembre 1999 au profit de la société Sai investissement.
La société vendeuse, Brown et Sharpe avait donc revendiqué la machine par lettre du 19 octobre 1999 adressée au commissaire à l'exécution du plan et saisi le juge-commissaire d'une requête en revendication le 20 octobre 1999.
[...] B/La réponse de la Cour de cassation aux interrogations doctrinales : prémonition de la réforme de 2005 Une solution identique, mais moins explicite de la Cour de cassation avait déjà fait couler beaucoup d'encre en 2001. La doctrine s'était beaucoup interrogée suite à l'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 3 avril 2001. Notamment, les interrogations portaient sur la question de savoir pourquoi ce contrat en particulier se voyait privé de report de délai quant à l'action en revendication. La Cour de cassation, en 2001, s'était contentée d'exclure ce contrat du champ d'application des articles L621-28 et L621-115 du code de commerce. [...]
[...] Le propriétaire d'un meuble détenu par le débiteur en procédure collective peut exercer une action en revendication afin de se faire restituer le bien. Une fois le jugement d'ouverture intervenu, la procédure collective instaure un régime exorbitant du droit commun. Ce régime se manifeste notamment par l'interdiction pour le créancier de payer les dettes nées antérieurement au jugement d'ouverture. Dans le cas du redressement judiciaire, il s'agit de poursuivre l'activité. L'administrateur a donc le pouvoir d'opter pour la poursuite des contrats en cours dans la mesure où ils sont utiles à l'activité. [...]
[...] Com septembre 2004), solidifiant la solution en la matière. Dans ce dernier arrêt du 28 septembre 2004, la Cour de cassation avait considéré que la subrogation de l'acheteur dans les droits du vendeur quant à une machine en l'espèce, ne modifiait pas la solution. Le contrat ne pouvait pas être considéré comme étant en cours. La Cour de cassation avait conclu à une tout autre solution en matière immobilière. En effet, elle avait considéré le contrat de vente immobilière avec réserve de propriété comme un contrat en cours. [...]
[...] Une solution contraire aurait pour effet de risquer que le délai ne commence jamais à courir sans action de la part de l'administrateur judiciaire. Or, le créancier a tout intérêt à exercer l'action en revendication le plus rapidement possible. Cette solution de la Cour de cassation précisée en l'espèce est donc pragmatique et peut être justifiée par l'intérêt du créancier malgré l'ouverture de la procédure collective. Une fois n'est pas coutume. Dans ce cas d'espèce, la solution n'est pas favorable au vendeur qui se trouve forclos pour avoir appliqué le mauvais point de départ du délai de revendication. [...]
[...] Un contrat en cours au sens des dispositions à cet égard implique la possibilité pour l'administrateur d'opter pour ou contre la continuation du contrat. S'il opte pour la continuation du contrat, il paye immédiatement le prix (L621-122 al 4 du Code de commerce). Par ailleurs, le juge- commissaire a le pouvoir de statuer sur le sort du contrat (L621-123 du Code de commerce). Dans le cas de la réserve de propriété, cela revient à éteindre l'obligation du débiteur puisque le paiement intégral du prix entraîne le transfert de propriété. [...]
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