L'état de cessation des paiements est un problème récurrent en droit des procédures collectives, mais il est désormais admis que l'on tient compte du passif exigible, et non du passif exigé, pour déterminer la cessation des paiements qui se caractérise, selon l'article L-131-1 du code de commerce, par l'impossibilité de face à son passif exigible avec l'actif disponible.
L'arrêt de la Cour de cassation rendu en sa chambre commerciale du 3 juillet 2012, n° 11-18.026, apporte un nouveau problème, celui de l'état de cessation des paiements d'une filiale d'un groupe bénéficitaire.
La société Sodimédical, filiale du groupe Lohmann et Rauscher, a déclaré la cessation des paiements à la suite d'une décision du groupe Lohmann et Rauscher de ne plus la soutenir financièrement.
Son passif échu s'élève à 4 515 937 euros dont 3 979 831 représentent le montant du compte courant de la société mère et son actif disponible s'élève à moins de 100 000 euros. De ce fait, la société Sodimédical a essayé d'établir plusieurs plans de sauvegarde qui ont tous été voués à l'échec.
Par conséquent, celle-ci a demandé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire. Les membres du comité d'entreprise contestent cette ouverture de procédure collective et forment tierce opposition.
Les membres du comité d'entreprise, défendeurs au pourvoi, contestent la recevabilité du pourvoi de la société Sodimédical, demandeuse au pourvoi, en estimant que : dans le pourvoi, la société Sodimédical conteste seulement l'appréciation de la Cour d'appel quant à la notion de l'état de cessation des paiements et l'incidence d'une fraude éventuelle et non la preuve que son redressement était manifestement impossible.
[...] La caractérisation objective de l'état de cessation des paiements Les juges du fond cherchent à démontrer que la dette de la société Sodimédical n'était pas ce qu'elle était pour déclarer l'état de cessation des paiements impossible (A.). La Cour de cassation casse leurs décisions en rappelant l'autonomie patrimoniale des sociétés (B.). A Une tentative de la Cour d'appel de prise en considération de la dette L'état de cessation des paiements se définit par l'impossibilité pour une société de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. La jurisprudence l'avait affirmé depuis 1978 et le législateur l'a alors définie dans le code de commerce à l'actuel article L-631-1. [...]
[...] Il en est de même dans l'affaire très médiatisée Coeur de la Défense ou Heart of la Defense La Cour de cassation dans un arrêt rendu en sa chambre commerciale du 8 mars 2011, 10- 13.989 et 10- avait estimé que, tant que la demande n'est pas abusive ou frauduleuse, il suffit aux juges du fond de vérifier les conditions légales de la procédure collective. Les mobiles du débiteur sont ainsi indifférents à la demande d'ouverture d'une procédure, cela va cependant vraisemblablement créer une instrumentalisation de la procédure de liquidation judiciaire quant aux filiales de grand groupe, en bonne ou mauvaise santé. C'est pourquoi il est nécessaire de comprendre pourquoi la Cour de cassation, consciente de ses risques, a tout de même laissé cette opportunité aux groupes d'ouvrir une liquidation judiciaire dont le but essentiel est de procéder à des licenciements. [...]
[...] Il s'agit en effet des arrêts de la Cour de cassation rendus en sa chambre commerciale du 26 juin 2007, 17.821 - 1004 et - 1005. Outre le fait de rappeler que les conditions d'ouverture de la sauvegarde s'apprécient au jour où il est procédé à cette ouverture, la Cour de cassation innove sur le motif suivant : pour l'ouverture de la procédure de sauvegarde d'une filiale, il est indifférent de savoir quelle sera la position que prendra la société mère dans le cadre de la période d'observation et l'éventuelle élaboration d'un plan de sauvegarde et que la situation de la société débitrice doit être appréciée en elle-même, sans que soient prises en compte les capacités financières du groupe auquel elle appartient Ainsi, la Cour de cassation dans les arrêts de 2007 avait estimé qu'il importait peu de prendre en compte la situation financière du groupe dès lors qu'il était bien déterminé que la filiale était en état de cessation des paiements. [...]
[...] Cette impuissance s'exprime, entre autres, par la fameuse loi du 12 mars 2012 dite Pétroplus : les juges appliquent strictement le droit et en cas de carence ou de dysfonctionnement important, c'est au législateur d'intervenir ; après que la politique s'y soit bien sûr mêlée. L'affaire Pétroplus étant très médiatisée, la réactivité du législateur a été très rapide. La loi a donc été votée en urgence 3 semaines de débats - dans le but de préserver les actifs d'une entreprise en difficulté, mais surtout d'empêcher, dans le cadre d'une liquidation judiciaire, le détournement d'actifs d'une entreprise défaillante en sécurisant juridiquement la mise sous séquestre des stocks et des installations de l'entreprise par le biais de mesures conservatoires. [...]
[...] Les mobiles du débiteur ne sont en aucun cas une condition pour demander l'ouverture de la liquidation judiciaire. Ainsi, on aurait pu croire que le raisonnement de la Cour d'appel tenait la route du fait que, par le biais des mobiles du débiteur, celle-ci s'autorisait à prendre en compte l'échec des différents plans de sauvegarde de l'emploi et qu'elle démontrait par des faits probants que la liquidation judiciaire n'avait pour seul but que de licencier et d'en faire prendre en charge le coût d'indemnités de licenciement par la collectivité. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture