« Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité », disait Victor Hugo. C'est-à-dire que les actions librement entreprises par chacun s'accompagnent forcément de conséquences, que l'on doit assumer en toutes circonstances. Mais, dans le cadre de la formation d'un contrat, qui est censé être l'expression la plus pure de la volonté libre des parties, il est possible de moduler cette responsabilité, de stipuler des clauses qui vont la limiter en cas de manquement contractuel. Ainsi, contrairement à ce qu'a pu affirmer Victor Hugo, lorsque la liberté des contractants augmente, leur responsabilité peut être décrue.
C'est de ce thème des clauses de responsabilité en général et des clauses limitatives de réparation en particulier, que traite l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, datant du 29 juin 2010.
En l'espèce, une société d'équipements automobiles forme plusieurs contrats avec une entreprise d'informatique. Cette dernière est tenue, par les clauses de son engagement, d'équiper son cocontractant d'un logiciel de gestion, qui n'était pas encore disponible au moment de la conclusion du contrat. Entre temps, l'entreprise informatique fournit un logiciel provisoire à la société d'équipement. Mais cette solution provisoire occasionne de graves difficultés et la société d'équipement déplore la non-livraison du logiciel de gestion à la date convenue. Insatisfaite de l'exécution des obligations de son cocontractant, la société d'équipement interrompt le paiement des redevances à l'entreprise informatique qui avait cédé ces dernières à une société de crédit.
[...] Une définition des conditions de mise en œuvre des clauses limitatives de réparation, favorable à leur pérennité La Cour rappelle ici la nécessité du respect de la cohérence du contrat dans la mise en œuvre des clauses de responsabilité reprenant une jurisprudence très favorable à ces dernières A. La nécessité du respect de la cohérence du contrat Dans cet arrêt, la Haute juridiction nous livre les différentes conditions d'application d'une clause limitative de responsabilité. Ces dernières sont des clauses librement stipulées par les contractants, sur le fondement de l'article 1134 du Code civil, permettant de moduler leur responsabilité contractuelle en cas d'inexécution de leurs obligations. [...]
[...] Commentaire d'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 29 juin 2010 : les clauses limitatives de réparation Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité disait Victor Hugo. C'est-à-dire que les actions librement entreprises par chacun s'accompagnent forcément de conséquences, que l'on doit assumer en toutes circonstances. Mais, dans le cadre de la formation d'un contrat, qui est censé être l'expression la plus pure de la volonté libre des parties, il est possible de moduler cette responsabilité, de stipuler des clauses qui vont la limiter en cas de manquement contractuel. [...]
[...] Une définition de la faute lourde favorable à la pérennité des clauses limitatives de réparation La Cour envisage ici de manière subjective la faute lourde en allant à contresens du mouvement d'objectivation de cette dernière A. Une faute lourde envisagée de manière subjective La faute lourde ne peut résulter du seul manquement à une obligation contractuelle, fut-elle essentielle, mais doit se déduire de la gravité du comportement du débiteur répond la Cour de cassation au demandeur au pourvoi qui entendant obtenir la non-application de la clause limitative de responsabilité de son partenaire contractuel en objectant l'existence de la faute lourde. [...]
[...] L'article 1125 al 2 de l'avant-projet Catala propose qu'une clause limitative de responsabilité soit toujours réputée non écrite si elle est contraire à la cohérence du contrat. Somme toute, cette solution apportée par la Cour de cassation est extrêmement favorable à la liberté des contractants, car, même si elle soumet la validité des clauses limitatives de réparation à un impératif de cohérence avec le contrat, elle réduit grandement le contrôle qui était fait auparavant de ces clauses. C'est une reprise d'un revirement jurisprudentiel en la matière qu'exerce ici la Cour, pour le plus grand bonheur des partisans de la clause limitative de responsabilité. B. [...]
[...] Ces divergences entre deux arrêts de cassation sur la même affaire s'expliquent par le fait qu'entre le 13 février 2007 et le 29 juin 2010, un important revirement de jurisprudence favorable aux clauses de responsabilité a été dessiné. En effet, avant le 13 février 2007, date du premier arrêt en cassation, c'était une jurisprudence du 22 avril 2005 qui régissait le régime d'application des clauses limitatives de responsabilité. Cet arrêt de 2005 était très radical en la matière : il ne s'agit plus d'interdire une exonération des conséquences d'une obligation essentielle par le biais d'une clause limitative, mais d'empêcher les contractants d'aménager conventionnellement les suites de l'hypothétique inexécution d'une obligation essentielle. [...]
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