Si les profondes modifications du droit des entreprises en difficultés depuis les années 1980 ont bouleversé les pratiques, il en est une qu'il est difficile de combattre : celle de la non-révélation des difficultés. En effet, les dirigeants d'entreprises en difficultés ont de multitudes de raisons de taire la situation compliquée à laquelle ils doivent parfois faire face de telle sorte que la liquidation judiciaire est le plus souvent inévitable. La loi du 26 juillet 2005 a donc mis en place des mécanismes pour éviter ces inconvénients. Toutefois, la technique législative parfois imprécise laisse des difficultés d'interprétation que la Cour de cassation doit corriger. C'est ce qu'elle a fait notamment dans un arrêt de la chambre commerciale du 27 mars 2012.
En l'espèce, le dirigeant d'une société s'était porté caution solidaire à hauteur de 120 000 euros auprès d'une banque d'un prêt de 200 000 euros consenti à sa société. La banque bénéficiait par ailleurs d'un nantissement de bons de caisse d'une valeur de 200 000 euros. La société a par la suite été mise en liquidation judiciaire et la créance de la banque a admise au passif de la procédure. Compte tenu de la remise au paiement des bons de caisse, il ne restait dû par la société qu'un peu plus de 14 000 euros. La banque a donc assigné la caution en paiement de la somme restante due par la société placée en liquidation judiciaire. En appel, la caution a recherché la responsabilité de la banque à la fois sur le fondement du devoir de mise en garde du créancier envers la caution et de la disproportion du cautionnement prévue par l'article L341-4 du Code de la consommation, mais aussi sur le fondement de l'article L650-1 du Code de commerce. Toutefois, la Cour d'appel l'a débouté de ses demandes.
[...] En appel, la caution a recherché la responsabilité de la banque à la fois sur le fondement du devoir de mise en garde du créancier envers la caution et de la disproportion du cautionnement prévue par l'article L341-4 du Code de la consommation, mais aussi sur le fondement de l'article L650-1 du Code de commerce. Toutefois, la Cour d'appel l'a débouté de ses demandes. La caution a donc formé un pourvoi en cassation et invoque au soutien de ce pourvoi les moyens suivants. [...]
[...] Mais la réponse de la Cour de Cassation était surtout importante relativement au deuxième moyen qui porte l'article L650-1 du Code de commerce. En effet, concernant l'appréciation de la qualité de caution avertie, la Cour s'est déjà prononcée en ce sens. Et concernant l'ordonnance du juge commissaire qui avait fixé le montant à rembourser ainsi que la pénalité, elle avait l'autorité de la chose jugée et ne pouvait donc plus être remise en cause. La Cour devait donc nécessairement répondre à la question de savoir si la seule disproportion entre le concours consenti et les garanties exigées entraînait la responsabilité du créancier. [...]
[...] La Cour de Cassation, dans cet arrêt, se prononce donc très clairement en faveur de l'interprétation la plus restrictive retenant ainsi l'interprétation la plus conforme à l'esprit de la législation en matière d'entreprises en difficultés. B. La conformité de l'interprétation avec l'esprit de la loi et la jurisprudence. La chambre commerciale pose une ligne d'interprétation qui est particulièrement en accord avec la législation et avec sa jurisprudence antérieure en matière de responsabilité du banquier dispensateur de crédit ayant connaissance des difficultés rencontrées par le débiteur. [...]
[...] Néanmoins, cette notion n'étant pas explicitée, des difficultés subsistent. B. Les difficultés subsistantes quant à la possible responsabilité du banquier. Certaines notions ne sont pas explicitées par la Cour de Cassation et notamment la notion de concours en eux-mêmes fautifs Dans son attendu décisoire, la chambre commerciale mentionne le soutien fautif ce qui peut laisser penser que la faute du créancier devra consister en un soutien abusif ainsi qu'elle l'avait décidé dans sa jurisprudence antérieure à la loi du 26 juillet 2005. [...]
[...] Il pose aussi trois exceptions à cette irresponsabilité : la fraude, l'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou la disproportion des garanties prises. Concernant ces exceptions, deux interprétations étaient possibles et la doctrine était divisée. Certains auteurs retenaient une interprétation extensive et considéraient que cet article posait trois fautes susceptibles d'engager la responsabilité du créancier et qui se suffisent à elles-mêmes. Il suffirait donc, selon ces auteurs, de prouver l'une des trois hypothèses prévues par l'article L650-1 du Code de commerce pour que la responsabilité du créancier puisse être engagée. [...]
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