La Cour de cassation a tenté de trouver un juste milieu entre les devoirs des coassociés refusant à un associé la cession de ses parts à un tiers. Cependant cette jurisprudence diffère selon le mode de désignation de l'expert relatif à l'article 1843-4 du Code civil. C'est ce que nous avons pu constater lors d'un arrêt du 2 novembre 2011 de la chambre commerciale de la Cour de cassation. En l'espèce, un associé de SARL a notifié à cette dernière et à ses coassociés son projet de cession de ses parts à un tiers. La société a refusé l'agrément du cessionnaire. Les deux coassociés ont par la suite demandé la prolongation du délai de trois mois qui leur était imparti pour procéder à l'acquisition des parts ainsi qu'à la désignation d'un tiers pour évaluer la valeur des dites parts. Avant l'expiration du délai, l'expert remet son rapport, mais les coassociés s'abstiennent de toute manifestation concernant l'acquisition des parts durant ce temps. Le cédant les assignés ensuite afin d'être autorisé à céder ses parts au cessionnaire initial. Il est débouté en première instance. Cependant, la Cour d'appel de Versailles rend un arrêt infirmatif au motif que les coassociés ne se sont jamais formellement engagés à acquérir les parts du cédant durant le délai imparti et que s'en remettre à l'estimation d'un expert ne suffit pas à le démontrer. Les coassociés forment alors un pourvoi au moyen que la demande concernant la désignation d'un expert pour la détermination du prix des parts doit s'apparenter à une manifestation ferme et définitive d'acquérir lesdites parts. Ils ajoutent par ailleurs que le rapport de l'expert avait été rendu dans le délai imparti et qu'ils avaient aussi versé un acompte en vue de l'acquisition des parts sociales de l'associé cédant.
[...] Ils ajoutent par ailleurs que le rapport de l'expert avait été rendu dans le délai imparti et qu'ils avaient aussi versé un acompte en vue de l'acquisition des parts sociales de l'associé cédant. On pouvait dès lors se demander si la manifestation ferme et précise dans le délai imparti de la volonté d'acquérir les parts sociales d'un associé cédant permet-elle aux autres associés de faire échec à la cession initialement prévue avec un tiers de la société. En l'occurrence, la question était de savoir si la désignation d'un expert permet-elle aux coassociés de manifester leur volonté d'acquérir dans le délai imparti les parts d'un associé auquel on a refusé l'agrément. [...]
[...] Les obligations impératives des coassociés : Une préservation de l'associé cédant Selon les deux solutions concernées, c'est-à-dire les alinéas 3 et 4 de l'article L223-14 du code de commerce, les obligations varient. En l'occurrence, l'arrêt concernait l'alinéa 3 et a précisé qu'« il faut que l'acquéreur ait manifesté son intention d'acheter à un prix égal à la valeur fixée par l'expert avant l'expiration du délai Si cette notification est négligée, l'associé cédant retrouvera sa liberté et pourra céder au premier cessionnaire. On retrouve ainsi la pensée doctrinale selon laquelle la valeur des parts est déterminée par l'expert et non le prix définitif de celles-ci. [...]
[...] C'est sur la première lecture du rôle de l'expert que repose le moyen du pourvoi des coassociés. En effet, ceux-ci considéraient que le rapport de l'expert suffisait à démontrer leur volonté d'acquérir les parts sociales de l'associé cédant. Selon eux, dès lors qu'après refus d'agrément ils ne bénéficiaient pas d'un droit de repentir, la demande de désignation de l'expert équivaudrait à la volonté définitive de former la cession. Ainsi, l'associé cédant n'aurait plus qu'à accepter ou utiliser son droit de repentir et ne pourrait plus faire jouer le délai pour céder à un tiers. [...]
[...] La désignation d'un expert d'un commun accord ou par le juge : La fixation de la valeur des parts Dans le cadre de cette jurisprudence, la question était de savoir quel rôle allait avoir l'expert dans la cession des parts de l'associé cédant avec les associés qui avaient refusé l'agrément. Comme a pu le constater J.-C. Hallouin lors de l'analyse de cet arrêt, deux lectures du rôle de l'expert sont possibles : soit on considère que l'expert de l'article 1843-4 fixerait [ ] le prix et la remise du rapport formerait la vente soit on considère au contraire que l'expert n'a seulement pour rôle que de déterminer la valeur des parts sociales. [...]
[...] Cette décision pourrait dès lors s'entendre comme une solution parallèle à la désignation de l'expert par accord commun de l'associé cédant et des coassociés. En effet, si l'associé cédant et les coassociés se sont mis d'accord sur ce point, la jurisprudence considère qu'ils ont réalisé leur accord sur la chose et le prix (Chambre commerciale octobre 1992). Or, la Cour de cassation démontre ici qu'il faut empêcher de soumettre l'associé cédant à une telle obligation s'il n'a pas émis cet accord. [...]
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