Les biens qui sont affectés à l'exploitation de l'entreprise individuelle bénéficient d'une autonomie sur le terrain fiscal et comptable, ce qui permet à l'exploitant de former une « masse privée » et une « masse professionnelle ». En vertu du principe de liberté d'affectation comptable, l'entrepreneur est libre de déterminer le périmètre des éléments affectés à l'exploitation, ce qui est lourd de conséquences sur le plan fiscal.
En l'espèce, Mme noël, entrepreneuse individuelle, achète le local dans lequel elle exerçait son activité.et l'affecte dans son patrimoine privé tandis qu'elle maintient à l'actif de son entreprise le droit au bail précédemment acquis. Elle consent par la suite un bail commercial à une société, touchant à ce titre une indemnité dite de « droit d'entrée » dans le contrat, qu'elle considère comme une plus-value professionnelle, ce qui lui permet de bénéficier d'une exonération. L'administration, qui ne l'entend pas de cette façon, y voit un supplément de loyer imposable dans la catégorie des revenus fonciers. Mme Noël saisit alors le tribunal administratif afin de contester cette décision. Les juges du fond rejettent sa demande. Elle forme un pourvoi devant le Conseil d'Etat.
Un entrepreneur ayant maintenu un droit au bail dans son patrimoine professionnel, alors même qu'il a décidé d'inscrire, dans son patrimoine privé, le local d'exploitation acquis ultérieurement, peut-il bénéficier du régime des plus-values professionnelles lors de la cession de ce droit au bail ?
[...] Il s'agit là d'une jurisprudence fiscale dérogatoire, le Conseil d'Etat adoptant une position contraire à celle de la Cour de cassation qui considère, en se fondant sur l'art du C.civ., que le bail disparaît en cas d'acquisition du bien loué par le locataire principal (Civ. 3ème juillet 1971). En matière fiscale la règle est différente, en raison, là encore, du principe d'étanchéité des patrimoines privé et professionnel de l'entrepreneur. La Cour d'appel administrative qui défendait une conception civiliste s'est, en effet, faite casser par l'arrêt du CE du 3 juillet 2009. Une solution singulière en matière de droit au bail : la double qualité de l'entrepreneur. [...]
[...] Une solution réaffirmant le principe de libre affectation du chef d'entreprise. En matière de bénéfices industriels et commerciaux, la détermination du périmètre du patrimoine professionnel n'est pas fonction de la nature des biens. Ce critère, jugé trop incertain, fut abandonné par le Conseil d'Etat dans un arrêt d'assemblée plénière du 24 mai 1967. Ainsi, l'entrepreneur peut affecter le bien dans son patrimoine privé ou dans son patrimoine professionnel indépendamment de sa destination réelle. Cette solution n'était pas évidente à admettre eu égard à l'art. L. [...]
[...] En raison du principe de séparation des patrimoines, il y a eu survie du droit au bail au bilan de l'entreprise, droit au bail qui est constitutif d'un élément d'actif incorporel immobilisable cessible, soumis au régime des plus et moins- values professionnelles. En vertu de l'art septies du CGI, cela permettrait à Mme Noël de bénéficier d'une exonération. Elle ne sera donc soumise à aucune imposition sur la cession de son droit au bail. Répercussions fiscales de la schizophrénie de l'entrepreneur individuel : un double avantage. [...]
[...] Un contribuable-propriétaire percevant des loyers. On l'avait vu dans l'arrêt Meissonnier et on le voit ici encore, en tant que propriétaire, l'individu perçoit des loyers qui proviennent de son patrimoine professionnel. Or ces derniers, considérés comme des charges pour l'entreprise, peuvent être déduits du bénéfice imposable de celle-ci. Un contribuable-entrepreneur percevant le prix de la cession de droit au bail. Outre la perception de ces loyers, il suffira au contribuable de brandir sa casquette d'exploitant afin de toucher le prix de la cession de droit au bail, laquelle pourra, selon la jurisprudence Noël, bénéficier du régime des plus et moins-values professionnelles et, le cas échéant, d'une exonération totale d'imposition. [...]
[...] II) Conséquences fiscales du principe d'autonomie des patrimoines. Le principe d'autonomie des patrimoines va avoir des conséquences fiscales en matière de cession de droit au bail mais également concernant la schizophrénie de l'entrepreneur individuel déjà évoquée ci-dessus Répercussions fiscales de la survie du droit au bail en matière de cession de celui-ci. Une solution reprenant les critères classiques de qualification d'un pas-de-porte en complément de loyer. Les droits d'entrée perçus par le propriétaire ayant le caractère d'un supplément de loyer sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers. [...]
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