La précision du régime fiscal des profits réalisés par les personnes physiques en cas de rachat de leurs actions par la société dont ils sont actionnaires était attendue. Le CE, dans son arrêt du 29 décembre 2000 répond donc à cette attente en adoptant une position claire sur la question.
Messieurs Paul et Pierre Roesch détenaient chacun 46% des titres de la SA Plastic. Le 26 février 1979, cette dernière a décidé d'une part d'augmenter son capital de 300 000 francs par un prélèvement sur la réserve de réévaluation et par la création de 3 000 actions nouvelles d'une valeur nominale de 100 francs attribuées gratuitement aux actionnaires à raison d'une action nouvelle pour une action ancienne, et d'autre part, la SA Plastic a décidé de procéder au rachat de 2 000 actions au prix unitaire de 750 francs en vue de leur annulation pour ramener le capital social de la SA à 400 000 francs. Messieurs Roesch ont indiqué qu'ils avaient cédé à la société Civile Immobilière du Velin, dont ils étaient les seuls associés, 1 000 actions chacun de la SA Plastic au prix unitaire de 750 francs et que la SA avait racheté ces actions au même prix unitaire à la société civile immobilière du Velin.
L'administration a considéré que cette cession avait un caractère fictif et le tribunal administratif de Grenoble ainsi que la cour administrative d'appel de Lyon lui ont donné raison. Monsieur Paul Roesch s'est donc pourvu en cassation contre l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Lyon en date du 28 février 1996.
Le Conseil d'Etat, dans cette espèce a donc dû se demander à quel régime fiscal se rattache les gains réalisés par une personne physique lors du rachat de ses actions par la société dont elle est actionnaire et dans quelle mesure un abus de droit a pu être constitué.
La Haute Juridiction, dans son arrêt du 29 décembre 2000 a considéré que le gain réalisé constituait un boni de cession se rattachant fiscalement au boni de liquidation, et à ce titre est imposé selon la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, et a relevé également la présence d'une opération fictive constituant un abus de droit.
C'est donc par ces motifs, que le Conseil d'Etat a rejeté le pourvoi de Monsieur Roesch.
Cette espèce amène donc le CE à retenir l'existence d'un abus de droit en présence d'une opération fictive (I), mais également à préciser le régime fiscal d'un rachat d'action d'une société de ses propres titres, avec une interprétation qui n'est pas sans divergences avec l'administration fiscale (II).
[...] Une divergence avec l'administration fiscale Le CE adopte une position différente par rapport à l'administration concernant l'interprétation du régime de rachat d'actions, solution qui semble cependant avoir été influencée par la nouvelle législation. Une interprétation différente du rachat d'action. Le CE et l'administration ont une interprétation différente du régime du rachat d'actions d'une société de ses propres titres. En effet, pour l'administration ce rachat ne constitue qu'une forme de distribution de l'actif aux actionnaires. Dès lors, pour l'imposition d'une telle opération, elle se fonde sur les articles 112-1 et 161 al2 du CGI. [...]
[...] Le CE en déduit donc que le boni de cession en cas de rachat d'actions est fiscalement de la même nature que le boni de liquidation. Ayant un caractère de revenu distribué, le boni de cession est donc imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sauf si le législateur en dispose autrement. Cependant, le CE conserve sa jurisprudence qui limite l'assiette de l'imposition à la différence entre le prix d'achat et le prix de souscription lorsque les titres ont été souscrits à l‘origine ou entre le prix de rachat et le prix d'acquisition lorsque les titres ont été acquis au cours de la vie sociale. [...]
[...] L'influence de la loi nouvelle sur le CE. L'arrêt Roesch a été rendu que peu de temps après la loi nouvelle du 2 juillet 1998. En effet, les dispositions fiscales de son article 41 précisent expressément et pour la première fois que le rachat par une société de ses titres en vue d'une attribution aux salariés ou le rachat dans le cadre d'un plan de rachat d'actions relèvent du régime d'imposition des plus values mobilières imposables au taux proportionnel. Dès lors, les gains résultant du rachat d'actions en vue d'une réduction de capital non motivée par des pertes ne relèvent pas de ce régime. [...]
[...] Cependant, il adopte une position différente quant à l'analyse du rachat d'action par rapport à l'administration. L'existence d'un boni de cession en présence d'un gain réalisé lors d'un rachat d'actions d'une société de ses propres titres Le CE précise pour la première fois le régime du rachat d'actions tout en réaffirmant sa position concernant l'interprétation de l'article 161 du CGI. La précision du régime fiscal du rachat d'actions tenant à une jurisprudence antérieure confuse. Dans cet arrêt, le CE affirme clairement quel est le régime fiscal du rachat d'actions d'une société de ses propres titres. [...]
[...] En effet, dans un arrêt en date du 9 janvier 1985, le CE a considéré que le gain réalisé à la suite d'un rachat d'actions par une société de ses propres titres en vue d'une annulation constituait un revenu distribué. De plus, dans l'arrêt Gardet du 8 juillet 1992, le CE a jugé que les gains réalisés dans cette même situation ne constituaient pas des dividendes mais des plus values. Malgré les divergences des solutions retenues par le CE, ce dernier ne cesse d'affirmer que l'article 161 du CGI est le seul fondement autonome d'imposition. La réaffirmation de l'article 161 du CGI comme fondement autonome de l'imposition. [...]
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