L'amortissement a pour fonction essentielle aussi bien en matière comptable qu'en matière fiscale de constater la dépréciation de l'actif immobilisé de l'Entreprise. Cependant, une distinction existe entre l'actif immobilisé corporel et l'actif immobilisé incorporel. Le Conseil d'Etat dans un arrêt du 17 mai 2000 a dû s'interroger quant à l'amortissement d'une clientèle acquise, actif immobilisé incorporel.
En l'espèce, une société exerce une activité de commercialisation et de distribution de charbon et de fioul domestique. Elle a acquis au cours des années 1984, 1985 et 1986 auprès d'entreprises concurrentes des fonds de commerce de distribution des mêmes produits comprenant des fichiers de clients. Elle a décidé d'amortir le coût de ces acquisitions sur une période de cinq ans, se référant à la 4ème directive européenne du 25 juillet 1978 relative aux comptes annuels de certaines formes de sociétés.
L'administration fiscale à la suite d'un redressement a réintégré aux résultats ces dotations aux amortissements au motif qu'elles avaient été effectuées en violation de l'article 38 sexies de l'annexe III du CGI, lequel n'autorise que la constitution de provisions.
La Cour Administrative d'Appel de Lyon à laquelle le litige a été soumis, a affirmé que les éléments d'actif incorporel immobilisé correspondant à la clientèle acquise par la société n'étaient pas dissociables du fonds de commerce pris dans son ensemble.
La société se pourvoit dans en cassation devant le Conseil d'Etat au motif que la CAA de Lyon a rejeté ses demandes en décharge des impositions supplémentaires d'impôt sur les sociétés.
Le problème de droit qui se pose est de savoir si les divers éléments incorporels du fonds de commerce tels que les fichiers de clientèle peuvent faire l'objet d'un amortissement.
Le Conseil d'Etat faisant application des articles 39 du CGI , 38 sexies de l'annexe III du CGI ainsi que de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987 annule l'arrêt de la Cour Administrative d'Appel au motif que si les éléments de l'actif incorporel immobilisé, représentatif de la clientèle acquise auprès des entreprises concurrentes ont fait l'objet d'une inscription dans la comptabilité de la société, ils ne différaient pas, de par leurs caractéristiques, des éléments représentatifs de la clientèle précédemment attachée au fonds de commerce de la société. Ainsi, les fichiers de la clientèle qui se renouvellent en permanence au fil des années, ne pouvaient pré visiblement pas se déprécier de manière irréversible avec le temps, ils ne peuvent ainsi faire l'objet d'un amortissement.
Ainsi, cet arrêt confirme une évolution vers la reconnaissance du caractère amortissable des éléments incorporels du fonds de commerce (I), mais dont l'application reste difficile (II).
[...] Est alors pris en compte la dépréciation subis par une immobilisation en raison de l'usure ou du temps. Aux termes de l'article 39, du CGI, l'amortissement consiste à répartir le coût d'un élément d'actif sur sa durée probable d'utilisation selon un plan d'amortissement En principe, ne s'amortissent que les immobilisations qui se déprécient avec le temps ou par l'usage. Il n'y a donc amortissement que si l'immobilisation considérée perd de sa valeur de façon irréversible or le fonds de commerce ne se déprécie pas avec le temps, la question de son amortissement est donc discutée. [...]
[...] Cet arrêt renforce les critères déjà évoqués par des arrêts antérieurs de diverses Cour Administrative d'Appel. En effet, trois conditions cumulatives sont dégagées par le Conseil d'Etat dans cet arrêt de 1999 pour qu'un élément incorporel de l'actif immobilisé fasse l'objet d'un amortissement et notamment la clientèle. Tout d'abord, cet élément d'actif doit être identifiable, ensuite, la clientèle acquise doit être dissociable en raison de ses caractéristiques et enfin, il est normalement prévisible que les effets bénéfiques sur l'exploitation de cet élément incorporel prendront fin à une date déterminée. [...]
[...] Le Conseil d'Etat dans l'arrêt Fils Charvet de 2000 se pose la question du caractère amortissable de la clientèle en tant qu'actif immobilisé du fonds de commerce. Pour trancher cette question, le Conseil d'Etat va appliquer les conditions nécessaires à l'amortissement d'un actif immobilisé du fonds de commerce dégagés par la jurisprudence précitée d'octobre 1999. Cet arrêt de 2000 vient donc confirmer l'hypothèse selon laquelle la clientèle, attachée à un fonds de commerce, puisse valablement faire l'objet d'un amortissement, sous réserve bien sûr que les conditions dégagées par la jurisprudence antérieures soient satisfaites. [...]
[...] De plus on peut se demander quel est le champ d'application des critères dégagés en 1999 qu'en s'ils se limitent au cas de la clientèle ou bien s'ils concernent tous les éléments incorporels. La question n'est aujourd'hui pas réglée, mais dores et déjà, on peut penser que la jurisprudence ira dans un sens favorable au droit communautaire. Bibliographie -cozian : précis de fiscalité des entreprises -RJF 7-8/2000 N°883 -DF 2000 N°50 Comm. [...]
[...] Le Conseil d'Etat relève une absence de caractère dissociable des autres éléments de la clientèle, en effet, le caractère dissociable des éléments incorporels du fonds de commerce tels que des fichiers de clientèle, ne saurait résulter de la seule circonstance qu'ils ont été individualisés en comptabilité. De plus, il y a une absence du caractère irréversible, la clientèle se renouvelle en permanence. Cette perception des choses conduit le Conseil d'Etat à écarter toujours cette condition et rend ainsi impossible l'application de l'amortissement. Les critères de 1999 semblent s'être réduits. [...]
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