Depuis la loi du 13 juillet 1967, mais surtout depuis la loi du 25 janvier 1985, le législateur a totalement transformé l'esprit du droit des procédures collectives. Alors que la satisfaction des créanciers avait toujours été l'objectif fondamental d'une procédure, celui-ci s'est vu détrôner par la volonté de parvenir au sauvetage de l'entreprise. De là, ont vu le jour des règles d'application immédiate en cas d'ouverture d'une procédure collective comme l'arrêt du paiement des créances et l'arrêt des poursuites contre le débiteur tendant au paiement d'une somme d'argent. Dans l'objectif de parvenir au sauvetage de l'entreprise en difficultés, la Cour de cassation est allée au-delà de la lettre des textes en opérant un élargissement de leur domaine. L'arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 9 juillet 1996 est une illustration de cette conception extensive.
Des époux avaient conclu un contrat de construction d'une maison individuelle avec une société. Or, la société a été mise en redressement judiciaire le 9 juillet 1991. A cette même date un jugement a prononcé la résolution du contrat de construction et déclaré que les parties devaient être remises en l'état où elles se trouvaient avant sa signature. Les époux ont donc assigné la société en justice aux fins de la voir condamner à démolir et à enlever à ses frais la construction.
[...] Il ne semble pas qu'avec la réforme du 23 juin 2006, la jurisprudence sera plus rigoureuse quant à l'application des dispositions sur l'arrêt des poursuites individuelles en cas d'ouverture d'une procédure collective. En effet, le législateur de 2006 n'a fait que reprendre strictement les dispositions des articles 33 et 47 de la loi de 1985 aux articles L622-7 et L622-21 du Code de commerce. Sans doute approuve-t-il alors la position de la Cour de cassation qui favorise largement le sauvetage de l'entreprise en essayant de contenir par tous les moyens son passif. [...]
[...] Or, pour cela la Cour de cassation anticipe sur une inexécution de l'obligation du débiteur. Celle-ci n'est pourtant pas inéluctable. En effet, bien que l'article 1142 du Code civil énonce que l'inexécution d'une obligation de faire se résout par des dommages-intérêts, la jurisprudence a élaboré toute une construction tendant à favoriser l'exécution en nature et non en équivalent d'une obligation de faire. En effet, les créanciers ne peuvent que préférer l'exécution forcée de son obligation par le débiteur plutôt que de recevoir à la place une somme d'argent car ils se sont engagés à la base pour que soit réalisée cette obligation. [...]
[...] La Cour de cassation semble faire peu de cas de la construction jurisprudentielle élaborée en matière de droit des obligations lorsqu'il s'agit de procédures collectives. Il existerait un moyen néanmoins de concilier les objectifs des procédures collectives et le régime des obligations de faire, en soumettant à la suspension des poursuites l'action visant à l'exécution d'une obligation de faire dans la seule éventualité où l'exécution en nature est inexorablement impossible. C'est une idée avancée par M. Cabrillac. En effet, dans le cas où l'exécution en nature est impossible, l'exécution en équivalent s'impose par conséquent. [...]
[...] Commentaire de l'arrêt du 9 juillet 1996 de la Chambre commerciale de la Cour de cassation de Versailles Depuis la loi du 13 juillet 1967, mais surtout depuis la loi du 25 janvier 1985, le législateur a totalement transformé l'esprit du droit des procédures collectives. Alors que la satisfaction des créanciers avait toujours été l'objectif fondamental d'une procédure, celui-ci s'est vu détrôner par la volonté de parvenir au sauvetage de l'entreprise. De là, ont vu le jour des règles d'application immédiate en cas d'ouverture d'une procédure collective comme l'arrêt du paiement des créances et l'arrêt des poursuites contre le débiteur tendant au paiement d'une somme d'argent. [...]
[...] Les époux ont donc assigné la société en justice aux fins de la voir condamner à démolir et à enlever à ses frais la construction. La Cour d'appel de Versailles a accueilli leur demande dans un arrêt en date du 3 juin 1994 aux motifs que l'obligation de remise en état inhérente à la résolution du contrat s'analyse en une prestation en nature de démolition et retrait des ouvrages édifiés, cette restitution de terrain en son état initial ne tombant pas sous le coup de l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985 qui est relatif à l'interdiction de toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et qui tend à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent. [...]
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