L'utilisation de comptes courants d'associés, qui consiste pour ces derniers à prêter de l'argent à leur société sous la forme d'un compte courant, est une pratique répandue qui comporte de nombreux avantages, aussi bien pour la société elle-même que pour les associés prêteurs.
En effet, cette méthode, simple et nécessitant très peu de formalités administratives, constitue à la fois un mode de financement efficace pour la société et un placement financier intéressant pour les associés.
En l'espèce, M. Gambet est actionnaire de la société anonyme Gamm. Alors qu'il demandait le remboursement du solde de son compte d'associé, le 27 octobre 1992, l'assemblée générale des actionnaires a décidé que les comptes courants d'associés seraient bloqués pour deux ans à hauteur de 110 000 Francs.
Le 23 janvier 1993, M. Gambet assigne la société devant le juge des référés pour obtenir une provision. Le 2 avril 1993, il a à nouveau assigné la société devant le tribunal de commerce statuant sur le fond.
Le tribunal de commerce a condamné la société à lui rembourser le solde de son compte courant, ainsi qu'une somme à titre de dommages-intérêts.
Suite à ce jugement, le 24 décembre 1993, l'assemblée générale des actionnaires de la société a de nouveau décidé de bloquer les comptes courants à hauteur cette fois de 250 000 francs pour une nouvelle durée de deux ans.
M. Gambet conteste cette nouvelle décision. Il assigne donc à nouveau la société.
La solution des juges de première instance n'est pas connue. Un appel est interjeté. La Cour d'appel condamne la société Gamm à payer une provision sur le solde de son compte à M. Gambet.
La société se pourvoit alors en cassation. La société conteste la décision de la Cour d'appel. Elle considère tout d'abord qu'il n'y a pas dans cette affaire, abus de majorité, les avances en compte courant constitueraient « un apport indispensable pour maintenir le montant minimal requis du capital social ».
[...] La Cour de cassation, dans son arrêt du 24 juin 1997 rejette le pourvoi. Elle considère la décision de blocage contraire l'article 153 de la loi du 24 juillet 1966. Plus encore, elle considère qu'il y a une confusion entre l'apport et le dépôt mais également entre l'apport et le prêt. Il va donc falloir rechercher si pour ce qui est de l'apport en compte courant, il existe un droit à remboursement plus encore, nous verrons l'aménagement de ce droit à remboursement effectué dans cet arrêt (II). [...]
[...] La nature de l'obligation du dépôt est de conserver la chose. En l'espèce, M. Gambet déposerait des fonds et la société devrait les conserver. La finalité de l'opération serait alors plus dans l'intérêt de la personne du déposant (M. Gambet) car la société n'aurait pas le droit d'user des fonds (sinon, il y aurait un abus de confiance) Par ailleurs, en réponse au troisième moyen, la Cour de cassation considère qu'il y a également confusion entre l'apport en compte courant et le prêt. [...]
[...] En effet, le prêt n'ayant pas de terme, il est considéré comme exigible à vue ; par conséquent, il peut être mis fin à ce prêt de façon unilatérale. Toutefois, on notera qu'en principe, le prêt est fait pour servir les intérêts de l'emprunteur et non du prêteur. Dès lors, celui qui met usuellement fin au prêt est l'emprunteur. De fait, cela limite la dépendance de la société au prêteur, argument qui plus est défendu par la société en l'espèce, qui rappelait son besoin de cet apport en compte courant. [...]
[...] Pour ce faire, il faut l'accord de l'unanimité des associés. Mais, à partir du moment ou l'avance en compte courant est un prêt, la décision de blocage relève de la convention des parties ; en ce sens, elle doit être prévue explicitement dans les statuts ou accepté sans équivoque par l'associé créancier, ce qui en l'espèce n'était pas le cas. La Cour de cassation rappellera dans un arrêt (19 octobre 1999 Cie général de Chauffe/ sté Géma-Investissements) que dans les sociétés de capitaux, l'associé n'est tenu des dettes sociales que dans les limites de son apport. [...]
[...] En effet, doivent être rejetés les moyens fondant l'opposabilité à l'associé du blocage des sommes sur l'exigence de maintien du capital social ou la soumission du remboursement à la préalable contribution de l'associé aux pertes de la société. Du point de vue de la société Gamm, le blocage des comptes courants était une mesure bénéfique dans la mesure où il assurait à la société la disposition de capitaux pendant une duré déterminée, une fois encore, c'était une mesure de protection. La décision de blocage des comptes courants a également été contestée dans l'arrêt sur le terrain de l'abus de majorité. La notion d'abus de majorité s'applique aux décisions d'assemblée générale. [...]
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