Cour de cassation, 3e Chambre civile, 14 décembre 2022 - Lorsque le remboursement d'un prêt familial et amical n'est pas immédiatement exigé, les sommes issues de ce prêt peuvent-elles constituer un actif disponible pour le débiteur ?

Extraits

[...] Toutefois, il semble que le créancier avait été surpris par la décision des juges de la chambre de qualifier les sommes issues d'un prêt d'actif disponible. Les sommes issues d'un prêt familial non immédiatement exigé, qualifiées d'actif disponible Dans l'arrêt du 14 décembre 2022, la Cour de cassation a déduit du caractère non immédiatement exigé du remboursement du prêt la qualification d'actif disponible pour les sommes prêtées. La Cour fait ainsi une analyse de cause à effets. Dès lors et au vu de la rédaction de l'arrêt, il semble possible de retenir que si le prêt en tant que tel faisait partie du passif immédiatement exigé du débiteur, les sommes prêtées n'auraient pas constitué un actif disponible. [...]

[...] Ce postulat, qui s'inscrit dans une jurisprudence constante (Tribunal de commerce de Lille mai 1987) est particulièrement enviable puisqu'il s'agit de bien vérifier que le débiteur n'est plus en mesure de payer les dettes dont il fait face. Toutefois, une remarque est à mettre en avant : en effet, écarter l'état de cessation des paiements n'est pas sans incidence, et ce surtout au vu des faits de l'arrêt. Le rejet de l'état de cessation des paiements est réalisé après assignation en liquidation judiciaire. [...]

[...] Le 3 juin 2021, la Cour d'appel de Dijon prononce la résolution du plan et la liquidation judiciaire du débiteur. Elle a notamment écarté la qualification d'actif disponible du prêt en estimant que même si le prêt familial n'était pas exigé, celui-ci ne permettait pas de désintéresser la caisse sans créer une nouvelle dette. La cessation des paiements est, donc selon les juges du fonds, caractérisée. Un pourvoi est formé en cassation par le débiteur. Selon lui, la cour d'appel a violé l'article L631-1 et L640-1 du code de commerce. [...]

[...] Une justification de la solution de la Cour de cassation face au créancier serait de dire que le créancier en l'espèce est une caisse sociale à savoir un créancier institutionnel. Ce créancier n'a ainsi peut-être pas « besoin » de recevoir la somme en l'espèce, ainsi l'assignation en liquidation judiciaire relèverait comme l'estime une partie de la doctrine d'un « droit à la faillite ». Or qu'y a-t-il de mal à obtenir une chance de se redresser face à la procédure collective ? [...]

[...] Cour de cassation, troisième Chambre civile décembre 2022 - Lorsque le remboursement d'un prêt familial et amical n'est pas immédiatement exigé, les sommes issues de ce prêt peuvent-elles constituer un actif disponible pour le débiteur ? Selon le professeur François Xavier LUCAS, « tout le monde s'accorde à penser que la cessation des paiements est une notion difficile à définir et à encercler dans une définition théorique. La cessation des paiements fait ainsi couler (encore aujourd'hui) l'encre des juges ». L'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation est particulièrement révélateur de la difficulté des créanciers, mais aussi des juges à cerner l'étendue du périmètre de la cessation des paiements et ainsi de parvenir à prouver cette dernière. [...]