Issue du droit administratif, la notion de faute séparable des fonctions a été reprise en droit des sociétés. C'est cette question qui va être statuée dans cet arrêt de la chambre commerciale en date du 20 mai 2003.
En l'espèce, la gérante d'une SARL a cédé en cette qualité deux créances à un tiers, créances qu'elle avait déjà cédées auparavant à un établissement de crédit. Le tiers décide alors de la poursuivre en réparation du préjudice dû au défaut de paiement des créances cédées.
La Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, dans un arrêt en date du 4 mai 1999, condamne la gérante, qui forme alors un pourvoi en cassation.
Elle fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu sa responsabilité personnelle, en invoquant le fait que sa faute ne pouvait pas être détachable de ses fonctions.
La question se pose alors de savoir si la responsabilité personnelle d'un dirigeant peut être engagée s'il a commis une faute séparable de ses fonctions.
La Cour de cassation répond par la positive à cette question, puisqu'elle juge que "la responsabilité personnelle d'un dirigeant à l'égard des tiers ne peut être retenue que s'il a commis une faute séparable de ses fonctions". Elle précise ensuite la notion de faute séparable, en établissant qu'il s'agit d'une faute intentionnelle, "d'une particulière gravité", et "incompatible avec l'exercice normal" des fonctions du dirigeant.
[...] Commentaire d'arrêt de la chambre commerciale de la cour de cassation en date du 20 mai 2003 Issue du droit administratif, la notion de faute séparable des fonctions, a été reprise en droit des sociétés. C'est sur cette question que va statuer dans cet arrêt de la chambre commerciale en date du 20 mai 2003. En l'espèce, la gérante d'une SARL a cédé en cette qualité deux créances à un tiers, qu'elle avait déjà cédées auparavant à un établissement de crédit. [...]
[...] En effet, la notion de dirigeant pourrait s'appliquer à d'autres personnalités comme les dirigeants de groupement de droit privé (association, syndicat, GIE). De même, elle pourrait être étendue aux mandataires sociaux n'exerçant pas les fonctions de direction. Il serait donc judicieux de délimiter plus clairement le champ d'application de cette définition, pour en éviter une trop large application, voire une trop grande interprétation. C'est sans doute la raison pour laquelle un certain nombre d'auteurs estiment que cette définition n'est que la prémisse d'une autre plus achevée. [...]
[...] L'intérêt de cette étude paraît résider dans le fait que la Cour de cassation consacre une définition qu'elle avait déjà ébauchée. En effet, si cette décision pose pour la première fois expressément la définition de la faute séparable, il n'en est pas moins qu'elle l'avait déjà appliquée dans la jurisprudence. Mais cette définition paraît à maints égards contestable de par son manque de précision et son ambiguïté. Dans cet arrêt la cour de cassation pose une définition de la faute séparable des fonctions du dirigeant susceptible d'engager sa responsabilité personnelle Mais cette définition peut faire l'objet de plusieurs critiques (II). [...]
[...] De plus, la responsabilité ne pourra jamais être engagée en cas de faute non intentionnelle. Il faut toutefois préciser que cette définition ne semble restrictive que si l'on considère qu'elle a une portée générale. Cependant, en l'espèce, le principe a été positivement mis en œuvre, puisqu'il a abouti à l'engagement de la responsabilité du dirigeant. Mais cette définition peut également se voir reprocher son manque de précision. A. Une définition imprécise accordant un trop large pouvoir aux juges du fond 1. [...]
[...] 225-251, prévoyaient l'engagement de la responsabilité individuelle ou solidaire du dirigeant, à l'égard de la société ou des tiers, notamment pour ses fautes de gestion. Or la cour semble opérer, par cette position communément admise, une ré-interprétation de ces articles. En effet, en n'admettant l'engagement de la responsabilité des dirigeants qu'en présence d'une faute détachable de leur fonction, elle leur offre un bouclier face à l'engagement de leur responsabilité personnelle. Si cet arrêt confirme l'exigence d'une faute détachable pour engager la responsabilité personnelle du dirigeant, il n'en s'en contente pas et s'aventure enfin à la définir. [...]
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