La désignation d'un expert de gestion dans les groupes de sociétés a connu des difficultés d'applications. C'est ce qu'illustre l'arrêt du 14 décembre 1993 rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation.
Les faits sont un peu complexes. En effet, la Compagnie de la navigation mixte (CNM) est devenue en 1990 actionnaire minoritaire de la société Allianz via holding France (AVHF), en raison de l'apport à cette société AVHF de ses participations dans les sociétés du groupe via Rhin et Moselle. La CNM et le groupe allemand Allianz souhaitaient développer en commun leurs activités d'assurance en France.
Un peu plus d'un an après l'apport, la CNM a découvert que la société mère allemande Allianz AG avait résilié un traité de réassurance qu'elle avait précédemment conclu avec la société Allianz France Iardt qui est la filiale d'AVHF (société dont est actionnaire la CNM). Pour la CNM, cette résiliation avait des conséquences très négatives sur les résultats de la filiale et de sa société mère (AVHF). En effet, elle aurait engendré une « perte importante répercutée dans les comptes consolidés d'AVHF ».
Invoquant l'absence d'information sur cette résiliation, la CNM demande en référé la désignation d'un expert de gestion aux fins essentielles d'examiner les circonstances dans lesquelles le groupe Allianz avait retiré la couverture en réassurance d'Allianz France Iardt et ses conséquences sur les comptes consolidés d'AVHF. Elle demande également à l'expert de procéder à l'examen d'apports partiels d'actifs projetés entre les filiales d'AVHF et demande la suspension de ces opérations dans l'attente de l'expertise de gestion sollicitée.
[...] Le rapport n'est pas destiné aux sociétés de groupe, ni aux minoritaires de la société mère. Ainsi dans notre arrêt, la CNM, actionnaire minoritaire de la société mère, n'avait pas la qualité pour demander une expertise de gestion. En effet, elle mettait en cause la résiliation du traité de réassurance passé entre la filiale de la société mère et une autre société. Il n'y avait aucun lien direct entre la CNM et la filiale. L'expertise de gestion n'est pas recevable quand bien même la résiliation dudit contrat aurait engendré un appauvrissement de la filiale, ce qui aurait eu des conséquences sur les résultats de la société mère et sur les comptes consolidés d'AVHF. [...]
[...] L'actionnaire minoritaire d'une société mère ne dispose pas de la qualité pour demander une expertise de gestion au sein d'une filiale de la société mère. Cette solution peut sembler rude dès lors qu'une opération de gestion réalisée par la filiale peut avoir des conséquences négatives sur la société mère et parallèlement à l'actionnaire minoritaire de cette dernière. Ainsi les actionnaires minoritaires ont dû emprunter une autre voie que celle proposée par l'article 266 de la loi de 1966 pour obtenir une expertise. [...]
[...] Critiques, détournement et conséquence d'une telle décision La solution rendue par la Cour de cassation du 14 décembre 1993 n'est pas satisfaisante pour l'actionnaire minoritaire d'une société mère. Ainsi pour contourner cette solution, les actionnaires minoritaires ont eu recours à l'expertise de gestion Le législateur est ensuite intervenu en 2001 A. L'expertise in futurum : un remède efficace face à une solution lésant l'associé minoritaire d'une société mère L'actionnaire minoritaire d'une société mère ne peut intervenir personnellement au niveau des filiales. [...]
[...] Ainsi la nomination d'un expert de gestion ne serait pas justifiée. La Cour de cassation dans notre arrêt était appelée à répondre à la question suivante : l'apport partiel d'actifs constitue-t-il une opération de gestion et donc peut-il faire l'objet d'une expertise de gestion ? Dans un arrêt antérieur (Cass.com.12 janvier 1993) la Cour de cassation avait considéré que l'apport partiel d'actifs pouvait faire l'objet d'une expertise de gestion lorsque cet apport n'était pas soumis au régime des scissions. En effet, si l'opération (apport partiel d'actifs) avait été placée sous le régime des scissions, elle aurait relevé de la compétence de l'AG et n'aurait donc pas constitué une opération de gestion car l'opération de gestion est une opération prise par un dirigeant. [...]
[...] Commentaire d'arrêt : Cass.com décembre 1993 La désignation d'un expert de gestion dans les groupes de sociétés a connu des difficultés d'applications. C'est ce qu'illustre l'arrêt du 14 décembre 1993 rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation. Les faits sont un peu complexes. En effet, la Compagnie de la navigation mixte (CNM) est devenue en 1990 actionnaire minoritaire de la société Allianz via holding France (AVHF), en raison de l'apport à cette société AVHF de ses participations dans les sociétés du groupe via Rhin et Moselle. [...]
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