Remise des poursuites n'égale pas remise de dette. Voilà l'audacieuse équation posée par la Cour de cassation dans son arrêt du 22 mai 2007. Une petite formule qui renvoie, sans en avoir l'air, à une grande question : celle de la définition de l'obligation. Plus exactement celle de la persistance de l'obligation lorsque le créancier a renoncé à tous ses moyens de contrainte. Une question qui, pour ne rien gâcher, se trouve ici posée à l'occasion d'un recours en paiement exercé contre une caution, laquelle entendait se prévaloir de la remise des poursuites consentie au débiteur principal pour échapper à sa propre obligation. Un bel arrêt en somme, qui sonne la mobilisation des forces doctrinales.
[...] Dans cette affaire, un créancier avait consenti une remise au débiteur principal en précisant avoir subordonné [son] accord de répartition au maintien de la caution La caution soutenait que cette réserve était nulle comme contraire au caractère accessoire du cautionnement. La Cour de cassation lui donne raison sans pour autant en déduire qu'elle se trouve libérée. Et ce au motif que la réserve des droits contre la caution a été érigée en condition de la remise de la dette principale, la nullité de la réserve emportant l'anéantissement rétroactif de la remise. [...]
[...] 2036) selon lequel la caution ne peut se prévaloir que des exceptions inhérentes à la dette, et non des exceptions purement personnelles au débiteur. En ajoutant que si la remise de la dette est une exception inhérente à la dette, la remise des poursuites, elle, est une exception purement personnelle. La parade peut, d'ailleurs, se réclamer de Pothier, mais aussi et surtout de l'analyse dualiste de l'obligation dont nous avons déjà parlé : on peut, en effet, soutenir que les exceptions inhérentes à la dette sont celles qui affectent le debitum, commun au débiteur et à la caution, tandis que les exceptions purement personnelles au débiteur sont, au contraire, celles qui n'affectent que l'obligatio du débiteur, censément distincte de celle de la caution. [...]
[...] Le lien entre les deux propositions peut se comprendre dans la mesure où la disparition de la dette du débiteur doit avoir pour conséquence que la caution ne peut plus rien réclamer à ce dernier. Décider le contraire reviendrait à admettre que la remise ne vaut que dans les rapports entre le créancier et le débiteur, ce qui ne permet en réalité aucune libération. La Cour de cassation part du postulat différent que la remise n'a porté que sur les seules poursuites. [...]
[...] Cette analyse distingue, dans l'obligation, la dette (le debitum) du pouvoir de contrainte (l'obligatio). Bien qu'elle n'ait jamais eu en France la même audience qu'outre-rhin, cette distinction (qui est là-bas celle du Schuld et du Haftung) fournit une grille de lecture appréciable pour mieux comprendre certaines données du droit des obligations En renonçant aux seules poursuites, le créancier aurait en l'occurrence détaché de la dette, au sens de debitum, le pouvoir de contrainte. Il n'aurait laissé subsister de l'obligation qu'un seul des deux éléments dont la réunion forme l'obligation civile : le lien substantiel. [...]
[...] La caution ne peut se prévaloir de la remise des poursuites consenties au débiteur principal Remise des poursuites n'égale pas remise de dette. Voilà l'audacieuse équation posée par la Cour de cassation dans son arrêt du 22 mai 2007. Une petite formule qui renvoie, sans en avoir l'air, à une grande question : celle de la définition de l'obligation. Plus exactement celle de la persistance de l'obligation lorsque le créancier a renoncé à tous ses moyens de contrainte. Une question qui, pour ne rien gâcher, se trouve ici posée à l'occasion d'un recours en paiement exercé contre une caution, laquelle entendait se prévaloir de la remise des poursuites consentie au débiteur principal pour échapper à sa propre obligation. [...]
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