Par sa décision du 24 février 2006, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation se prononce sur la valeur de la signification de l'ordonnance de référé effectuée celui qui poursuit l'exécution à titre provisoire et la nature de la responsabilité de ce plaideur en cas d'infirmation ultérieure de cette décision.
Par une ordonnance de référé, les cessionnaires d'un fonds de commerce ont obtenu la cessation de toute activité commerciale d'un commerçant, sous peine d'astreinte. L'ordonnance de référé a été infirmée par un premier jugement. Le commerçant fait assigner les cessionnaires en réparation de son préjudice né de l'exécution de l'ordonnance. Par un second jugement, les cessionnaires ont été condamnés à verser des dommages et intérêts au commerçant.
La Cour d'appel d'Aix en Provence, par son arrêt du 29 mai 2001, infirme le jugement et subordonne le droit à réparation du commerçant à une faute des cessionnaires.
La deuxième Chambre civile de la Cour de cassation, par sa décision du 10 juillet 2003, casse l'arrêt d'appel pour fausse application de l'article 1382 du Code civil. Elle considère que « l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques et périls de celui qui la poursuit, à charge par lui, d'en réparer les conséquences dommageables ».
La Cour d'appel de renvoi de Lyon, en date du 10 juillet 2003, rejette la demande en réparation du préjudice subi par le commerçant au motif que ses adversaires n'ont effectué aucun acte d'exécution forcée de l'ordonnance qui a été spontanément exécutée par lui. Dés lors, il ne peut obtenir réparation du préjudice subi du fait de cette exécution.
Le commerçant se pourvoit en cassation et fait grief à l'arrêt d'appel d'avoir violé l'article 1382 du Code civil en excluant toute responsabilité des cessionnaires alors que l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques et périls de celui qui l'a obtenue. Il considère, en outre, qu'il était légalement tenu d'exécuter l'ordonnance de référé lui interdisant, sous astreinte, de poursuivre son activité commerciale.
Celui qui exécute une ordonnance de référé devenue exécutoire à titre provisoire par sa signification peut-il obtenir réparation du dommage causé par cette exécution, même sans faute de son adversaire, en cas d'infirmation ultérieure de cette ordonnance ?
L'Assemblée plénière de la Cour de cassation, par son arrêt du 24 février 2006, répond par l'affirmative et considère, sur le fondement de l'article 31 de la loi du 9 juillet 1991, que l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques de celui qui la poursuit, à charge par lui, si le titre est ultérieurement modifié d'en réparer les conséquences dommageables.
[...] B - La valorisation de la signification et ses dérives D'un côté, les effets de l'ordonnance de référé ont été diminués alors, que de l'autre, la portée de la signification a été renforcée. D'une part, le décret du 28 décembre 2005 a eu pour but de renforcer l'exigence d'effectivité des décisions de 1re instance et a ainsi assoupli les effets de l'ordonnance de référer. L'article 524 du Code de procédure civile prévoit alors que le premier Président de la Cour d'appel peut arrêter l'exécution provisoire, de droit, de l'ordonnance de référé en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 du Code de procédure civile et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. [...]
[...] Il est donc indispensable de protéger cette partie contre les conséquences d'une décision infirmée. Par cette conception, il est fait application de la théorie du risque profit ou du risque d'activité qui implique que celui qui crée, par son activité, un risque pour autrui doit répondre de ses conséquences dommageables et en supporter la charge. Le second principe est celui de l'exécution provisoire qui déroge au principe de l'appel et contredit directement le principe de l'effet suspensif. La partie perdante devra être protégée par le mécanisme de la responsabilité du dommage causé par l'exécution. [...]
[...] La deuxième Chambre civile de la Cour de cassation, par sa décision du 10 juillet 2003, casse l'arrêt d'appel pour fausse application de l'article 1382 du Code civil. Elle considère que l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques et périls de celui qui la poursuit, à charge par lui, d'en réparer les conséquences dommageables La Cour d'appel de renvoi de Lyon, en date du 10 juillet 2003, rejette la demande en réparation du préjudice subi par le commerçant au motif que ses adversaires n'ont effectué aucun acte d'exécution forcée de l'ordonnance qui a été spontanément exécutée par lui. [...]
[...] La Cour de cassation vise l'article 31 de la loi du 9 juillet 1991 qui dispose que l'exécution est poursuivie aux risques et périls du créancier qui, si le titre est ultérieurement modifié, devra restituer le débiteur dans ses droits en nature ou en équivalent Sur ce fondement, elle énonce celui qui poursuit l'exécution d'une ordonnance de référé s'expose au risque de devoir restituer son adversaire dans ses droits si l'ordonnance de référé est ultérieurement infirmée et de réparer les conséquences dommageables. En l'espèce, la Cour de cassation remet la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt d'appel. Cependant, l'Assemblée plénière va plus loin que la jurisprudence traditionnelle en considérant que l'ordonnance de référé, ayant été signifiée à la requête des créanciers, leur adversaire était tenu de l'exécuter. La Cour de cassation confère donc une valeur particulière à la signification qui a pour objet de porter le jugement à la connaissance des parties. [...]
[...] La signification devient un élément déterminant de la mise en exécution de l'ordonnance de référé. La seule signification a alors pour effet de constituer la poursuite de l'exécution. Par conséquent, l'ordonnance de référé doit être exécutée dés sa notification et ne peut être mise en exécution que par sa signification. La signification devient ainsi le point de départ et la condition préalable de l'exécution provisoire. Est une exécution provisoire le droit accordé, par la loi ou par le juge, à la partie bénéficiaire d'un jugement d'en poursuivre l'exécution malgré l'effet suspensif des voies de recours du délai ou des recours exercés. [...]
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