La responsabilité personnelle des dirigeants sociaux fait l'objet d'une jurisprudence aussi audacieuse qu'insaisissable. En dépit des dispositions de la loi, qui ne la restreignent nullement mais indiquent seulement dans quels cas la responsabilité peut être engagée (articles L. 223-22 et L. 225-251 du Code de commerce, article 1850 du Code civil), on sait qu'une jurisprudence maintenant bien assise émanant des différentes formations de la Cour de cassation limite la responsabilité personnelle des dirigeants aux cas où ils ont commis une « faute séparable de leurs fonctions » qui leur soit imputable personnellement.
En l'espèce la gérante d'une SARL avait cédé en cette qualité deux créances à un tiers, alors que ces mêmes créances avaient été cédées antérieurement à un établissement de crédit. Poursuivi par le second cessionnaire en réparation du préjudice résultant du défaut de payement des créances cédées, la gérance tenta de s'abriter derrière le large bouclier la faute non séparable des fonctions.
Elle fut condamnée par un arrêt de la Cour d'appel de Saint Denis de la réunion le 4 mai 1999 au motif qu'un gérant qui utilise sciemment des procédés malhonnêtes pour tromper les tiers ne peut prétendre avoir agi au nom de la société et ainsi espérer échapper à ses responsabilités, et donc que Mme X avait commis une faute de gestion séparable de ses fonctions de gérante et qu'elle devait en supporter les conséquences. Cette dernière se pourvoit donc en cassation, en avançant le moyen selon lequel la responsabilité personnelle d'un dirigeant ne peut être retenue que s'il a commis une faute séparable de ses fonctions et qui lui soit imputable personnellement.
Le problème juridique est donc ici de savoir s'il existe réellement une faute personnelle du dirigeant séparable de ses fonctions ? (...)
[...] En ce qu'il édicte une définition générale de la faute séparable des fonctions, l'arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 20 mai 2003 est incontestablement un arrêt important. Mais, du fait même que cette décision entend indiquer aux arrêts ultérieurs la voie à suivre dans la caractérisation de la faute séparable des fonctions, son apport concret se trouve nécessairement réduit. De plus, la question de la distinction entre faute personnelle et faute du dirigeant, pourtant fondamentale et intellectuellement antérieure à la qualification de faute séparable des fonctions, reste encore à régler. [...]
[...] Cette dernière se pourvoit donc en cassation, en avançant le moyen selon lequel la responsabilité personnelle d'un dirigeant ne peut être retenue que s'il a commis une faute séparable de ses fonctions et qui lui soit imputable personnellement. Le problème juridique est donc ici de savoir s'il existe réellement une faute personnelle du dirigeant séparable de ses fonctions ? La Chambre commerciale retient la responsabilité de Mme en reconnaissant que la responsabilité personnelle d'un dirigeant à l'égard des tiers ne peut être retenue que s'il a commis une faute détachable de ses fonctions. [...]
[...] Les tiers peuvent-ils reprocher au dirigeant la faute commise dans l'exercice de ses fonctions, qui lui serait alors imputable personnellement, ou cette faute ne doit-elle peser que sur la société, engagée par les actes de son organe ? Cet arrêt pose une définition de la faute personnelle du dirigeant détachable de ses fonctions en des termes assez généraux c'est donc une jurisprudence à préciser et encadrer (II). I. La définition générale de la faute du dirigeant séparable de ses fonctions. [...]
[...] Ainsi, la faute séparable des fonctions du dirigeant, qui permet au tiers d'engager sa responsabilité personnelle, est celle qui est, tout à la fois : commise intentionnellement par le dirigeant ; d'une particulière gravité ; incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales. La définition ainsi formulée appelle un certain nombre d'observations quant à sa portée, qui apparaît particulièrement large. En effet, le présent arrêt vise le dirigeant sans plus de précisions. La définition de la faute séparable qui est retenue devrait, de ce fait, être applicable à tous les dirigeants de société et elle apparaît transposable aux dirigeants d'autres groupements de droit privé comme les associations, syndicats, groupements d'intérêts économiques . [...]
[...] Commentaire de l'arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 20 mai 2003. La responsabilité personnelle des dirigeants sociaux fait l'objet d'une jurisprudence aussi audacieuse qu'insaisissable. En dépit des dispositions de la loi, qui ne la restreignent nullement mais indiquent seulement dans quels cas la responsabilité peut être engagée (articles L. 223-22 et L. 225- 251 du Code de commerce, article 1850 du Code civil.), on sait qu'une jurisprudence maintenant bien assise émanant des différentes formations de la Cour de cassation limite la responsabilité personnelle des dirigeants aux cas où ils ont commis une faute séparable de leurs fonctions qui leur soit imputable personnellement. [...]
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