Les arrêts du 11 et 12 juin 2002 sont indissociables et sont constitutifs d'un apport majeur dans la pratique des procédures collectives, en effet, il situe désormais le fait générateur d'une créance de dépens au moment de la décision de condamnation.
En l'espèce, M.X et la société Hôtel de France ont conclu un contrat de bail sur un immeuble à un usage commercial le 14 novembre 1994. Après plusieurs défauts de paiement M.X a intenté une action en résiliation du contrat de bail le 12 septembre 1998 afin d'obtenir le paiement des loyers et charges ainsi que la condamnation au paiement des dépens et d'une indemnité due au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile (NCPC).
Devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, la société Hôtel de France invoque le fait que l'action en résiliation intentée par M.X était antérieure au jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, qu'il s'en suit que la créance de dépens et celle résultant de l'application de l'article 700 du NCPC sont antérieures audit jugement. La société affirme que la cour d'appel a violé les articles L621-32 et L621-40 du code de commerce et 696, 699 et 700 du NCR car le débiteur d'une procédure collective ne peut être condamné au paiement des dépens et frais (...)
[...] Dans sa décision du 17 mars 92 (chambre commerciale), la cour de cassation avait précisé que la créance de dépens était couverte par l'article 40, si l'action avait été régulièrement poursuivie. Au final, la distinction opérée par ces arrêts prévoit seulement que les frais de dépens ne constituent une dette de procédure bénéficiant de la priorité de paiement (institué par l'article L621-32 du code de commerce) que si le débiteur est demandeur. Les arrêts du 24 novembre et du 8 janvier 2002 de la chambre commerciale ont réaffirmé les solutions antérieures, néanmoins, de nombreuses cours d'appels n'étaient pas convaincues. [...]
[...] De plus, entre l'introduction de la demande en justice et l'issue de l'instance, le décalage vient de la lenteur de la justice qui va générer du passif, ce qui va causer un préjudice aux autres créanciers antérieurs et postérieurs puisque le passif va être gonflé artificiellement (théorie de Arlette Martin-Serf, article 40). Il y aura donc une rupture d'égalité entre les créanciers qui seront munis de sûretés sur leur créance. De plus, les frais de dépens sont étrangers à la poursuite de l'activité, cela paraît anormal que les créanciers de dépens bénéficient d'un régime préférentiel. [...]
[...] Une unification attendue de la jurisprudence sur le fait générateur de la créance des dépens. Jusqu'à présent, pour la cour de cassation, les frais de procédure étaient liés au déclenchement de l'instance : ce n'était pas la décision de justice (nouveau critère instauré par notre espèce) statuant sur les dépens qui généraient la créance de dépens, le fait générateur se situait bien en amont, au moment de la demande initiale. Ce n'était donc pas la décision de la condamnation aux dépens qui faisait naître la créance de dépens mais le droit préexistant, c'est-à-dire que la demande initiale d'un quelconque demandeur contre une société mise entre temps en redressement judiciaire ou en liquidation. [...]
[...] La rupture avec les solutions antérieures. Selon Arlette Martin-Serf, les juridictions du fond étaient divisées Deux décisions de principe de la chambre commerciale, en date du 9 décembre 1997 et du 17 février 1998 avaient exclu du bénéfice de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 les dépens auxquels était condamnée une partie soumise à une procédure collective lorsque l'action en justice avait été intenté antérieurement au jugement d'ouverture, peu important que les dépenses aient été prononcés par une décision de justice rendue après le jugement d'ouverture. [...]
[...] Pour retenir ce paiement privilégié on retient le critère de la postériorité au jugement d'ouverture de la décision qui prononce la condamnation aux dépens. C'est un critère au moins qui a le mérite d'être simple, dans la note de Lienhard , le juge a le pouvoir de moduler la condamnation en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de partie condamnée au regard de l'article 700 du NCPC ce qui justifie l'apport de cette décision à savoir la naissance de la créance au moment de la décision de condamnation. [...]
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