Tribunal des conflits, personne publique, sécurité juridique, loi Grenelle II, supériorité des traités, procès équitable
Dans un arrêt du 8 juillet 1963 dit Société entreprise Peyrot, le Tribunal des conflits admet qu'un contrat conclu entre deux personnes privées peut revêtir le caractère d'un contrat administratif.
Cette même juridiction a du dans un arrêt du 13 décembre 2010 trancher un litige où la question était similaire. Le Tribunal des conflits a donc été amené à déterminer lors d'un conflit positif, quel ordre de juridiction était compétent dans un litige qui opposait le regroupement de sociétés Green Yellow, les sociétés Ksilouest, Ksilest et Ksilnordest à la société anonyme Électricité de France.
[...] Ce droit au procès équitable garanti à tout justiciable de pouvoir faire valoir ses droits en justice et de pouvoir avoir recours à une justice impartiale et indépendante statuant dans un délai raisonnable. Cet art 6 prévoit également que chaque partie doit disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense. En l'espèce, c'est exactement ce que la loi Grenelle II empêchait de faire. En effet, en raison de la portée rétroactive de la qualification de contrat administratif à des contrats qui relevaient du droit privé, les parties ne disposaient pas du temps nécessaire pour préparer leur défense, la loi du 12 juillet 2010 portait atteinte à ce droit. [...]
[...] Si le Tribunal des conflits avait décidé que les contrats d'achat d'énergie électrique à des producteurs autonomes par Électricité de France relevaient des juridictions administratives alors qu'en vertu de la loi du 10 février 2000 ils devaient être régis par les juridictions judiciaires, les parties auraient du remettre en question la totalité de leur défense, car elles auraient été soumises à des règles juridiques différentes aux conséquences différentes. Cette loi Grenelle II portait ainsi une atteinte qualifiée à ce droit fondamental qui est la raison pour laquelle le Tribunal des conflits se permet d'effectuer pour la première fois un contrôle de conventionnalité afin de protéger la sécurité juridique des parties. [...]
[...] II) La garantie de la sécurité juridique grâce à la supériorité des traités Dans cet arrêt, le Tribunal des conflits effectue un contrôle de conventionnalité qui permet de remédier à la mise en danger de la sécurité juridique par la rétroactivité de loi du 12 juillet 2010 Pour cela, elle se fonde sur le droit à un procès équitable qui est un droit fondamental prévu à l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales A - L'exécution du contrôle de conventionnalité par le Tribunal des conflits Cet arrêt du 13 décembre 2010 marque un tournant important dans la jurisprudence du Tribunal des conflits et du droit administratif plus largement, puisque cette juridiction peut désormais effectuer un contrôle de conventionnalité d'une disposition législative lorsque la désignation de l'ordre de juridiction compétente en dépend. En effet, dans cet arrêt il est constaté que la loi Grenelle II met en danger la sécurité juridique des contractants puisqu'elle est venue prévoir la rétroactivité de la qualification de contrat administratif à des contrats relevant du droit privé. De plus, en l'espèce la loi Grenelle II était entrée en vigueur après la naissance du conflit entre les sociétés demanderesses et Électricité de France. [...]
[...] Le préfet de la région d'Ile-de-France a par la suite adressé au tribunal de commerce de Paris un décret déclinatoire dans lequel il expliquait pourquoi ce litige relevait des juridictions administratives. Le tribunal de commerce a rejeté ce décret déclinatoire. Par conséquent, le préfet a pris un arrêté portant élévation du conflit au Tribunal des conflits. Le Tribunal des conflits est donc amené à répondre à la question qui est de savoir si un contrat conclu entre deux personnes privées, mais dont l'une agit pour le compte d'une personne publique relève du droit administratif. Le Tribunal des conflits dans son arrêt du 13 décembre 2010 répond par la négative. [...]
[...] Par conséquent, le tribunal des conflits émet l'idée selon laquelle s'il existe des motifs importants relevant de l'intérêt général alors le Tribunal des conflits ne pourra asseoir l'autorité d'un traité sur l'ingérence du législateur. Pour que l'exception puisse être appliquée, il est donc nécessaire que les motifs impérieux d'intérêt général soient plus importants que le principe de sécurité juridique. Si le tribunal des conflits fait appel dans cet arrêt au droit à un procès équitable prévu à l'article 6 de la CEDH, c'est parce qu'il constitue un droit fondamental qui doit être appliqué au détriment d'une ingérence possible, comme l'illustre cet arrêt, du législateur. [...]
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