La loi du 26 mai 2004 relative au divorce apporte des modifications profondes en la matière. Néanmoins, un regard sur la jurisprudence antérieure permet de mesurer plus exactement la portée du changement et de constater que, sur certains points, la loi nouvelle constitue un prolongement plus qu'un bouleversement.
En l'espèce, Madame P. et Monsieur D. se sont mariés le 13 août 1994 à Pau. Ils étaient alors âgés tous deux de 29 ans. N'ayant passé par devant notaire aucun contrat de mariage, ils ont été soumis automatiquement au régime légal de la communauté d'acquêts. Ils n'ont pas eu d'enfants.
Dès 1997, une demande en divorce pour faute a été présentée par Monsieur D. invoquant l'attitude incohérente et parfois violente de son épouse, son incapacité à mener une vie familiale normale, et la dissimulation par celle-ci de la gravité de son état de santé. Madame P. a formé une demande reconventionnelle, invoquant pour sa part l'inobservation par son époux du devoir de secours.
En première instance le Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Pau a prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'épouse et l'a déboutée de toutes ses demandes.
Sur appel de cette dernière, la Cour d'appel de Pau dans le présent arrêt, réforme le jugement de première instance. Elle prononce le divorce aux torts partagés, mais écarte la demande de dommages intérêts qui avait été présentée par chacun des époux sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ainsi que la demande de prestation compensatoire de la part de l'épouse.
Sur le divorce lui-même, la Cour constate que de part et d'autre, il y a eu des violations graves des devoirs du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune. Par contre, sur les demandes de dommages intérêts, la Cour remarque qu'aucun des époux ne rapporte la preuve d'une faute et d'un préjudice distincts de la dissolution du lien conjugal et qu'il ne saurait donc y avoir lieu à réparation sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun. S'agissant de la demande de prestation compensatoire, la Cour fait observe que celle-ci suppose une disparité économique résultant de la dissolution du mariage, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence, le mariage n'ayant que très peu duré.
Cette décision rappelle utilement les conditions du prononcé d'un divorce pour faute (I). Mais elle révèle aussi que les conséquences que l'on y attache souvent ne sont pas systématiques et que les effets d'un tel divorce peuvent être finalement réduits (II).
[...] En conclusion, l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Pau s'inscrit parfaitement dans la ligne des textes et de la jurisprudence de l'époque. Mais les solutions adoptées ne seraient probablement pas très différentes aujourd'hui. [...]
[...] Elle exigeait que toutes les conditions prévues par l'article 242 soient clairement vérifiées, et spécialement le caractère intolérable de la vie commune résultant des fautes commises. La Première Chambre civile de la Cour de cassation, aujourd'hui compétente en la matière, semble vouloir se montrer moins rigoureuse. On peut ajouter une observation sur la procédure qui a abouti au prononcé d'un divorce aux torts partagés. Cette solution n'a été acquise qu'au second degré à la suite d'une demande reconventionnelle de l'épouse. [...]
[...] CA Pau 07 décembre 1998 Madame Marie-Hélène P. née le 06/02/1966 à Pau et Monsieur Christian D. né le 03/01/1966 se sont mariés le 13 août 1994 devant l'Officier de l'état civil de la commune de Pau (Pyrénées- Atlantiques) sans contrat de mariage, aucun enfant est né de cette union. Par déclaration du 1er avril 1997 Madame D. formait appel au jugement du 11 mars 1997 du Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de Pau qui a : - prononcé le divorce des époux aux torts de l'épouse avec les mesures de publicité prévues par la loi et ordonné la liquidation de leurs droits - supprimé la pension alimentaire due par l'époux avec exécution provisoire - débouté Madame D. [...]
[...] La faute de l'épouse pouvait sembler moins évidente. En effet, la jurisprudence considère généralement que l'on ne saurait reprocher à un époux sa maladie à partir du moment du moins où celle-ci ne lui est pas imputable. Mais ce qui était plus précisément reproché ici à l'épouse, c'était d'avoir caché, sinon sa maladie, du moins sa gravité et de ne pas en avoir discuté loyalement avec son mari. À première vue, la dissimulation d'un fait antérieur au mariage devrait être plutôt appréhendée par la voie de la nullité pour erreur. [...]
[...] On voit aussi que, sur le fondement de l'article 1382, l'obtention de dommages intérêts était aléatoire. Encore faut-il, comme le fait remarquer la Cour d'appel, qu'une faute et un préjudice distincts du prononcé du divorce soient établis. Théoriquement, le domaine de l'article 1382 se distinguait ainsi de celui de l'article 266. En pratique, il faut avouer que la distinction n'était pas toujours évidente. La loi du 26 mai 2004 n'a pas supprimé la possibilité pour l'un des époux de réclamer des dommages intérêts. [...]
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