Jean Carbonnier, mariage, mariage pour tous, mariage aux couples de même sexe, droit de la famille, mariage homosexuel, libéralisation, modèle familial, couple homosexuel, filiation
En 1950, Jean Carbonnier écrit "l'histoire de notre droit civil du mariage depuis 50 ans est l'histoire d'une libération continue". S'inscrit ici l'idée que le droit de la famille, à travers plusieurs vagues de réformes durant tout le XXe siècle, a entendu s'ouvrir de plus en plus aux individus, dans le but d'englober toutes les situations dans un cadre juridique, et ne rien laisser hors du champ d'action du droit. Aussi est incluse l'idée de continuité, qui induirait un processus constant, dans une logique d'évolution.
Dernier témoin de cette "libération" du droit de la famille, l'ouverture du mariage aux homosexuels n'en est pourtant pas moins une libération qui s'est faite dans la douleur, apparaissant presque comme révolutionnaire. Promesse de campagne du candidat Hollande, l'ouverture du mariage aux couples homosexuels a d'abord fait l'objet d'un projet de loi discuté en Conseil des ministres le 7 novembre 2012.
[...] Mais si les modalités pour contracter le mariage sont restées identiques, et ses droits et obligations allégés, le droit au mariage s'est aussi assorti d'une augmentation des possibilités d'en sortir, et donc de la création d'une « liberté de divorce ». En effet, si le divorce était d'abord uniquement possible en cas de faute d'un des mariés, on lui a ajouté en 1975 deux modalités de divorce par consentement mutuel, puis une modalité d'acceptation du principe de la rupture du mariage, créée en 2004. [...]
[...] Ainsi, Portalis considérait que « Les familles sont formées par le mariage [ ] Le mariage soumet les époux à des obligations sacrées envers les enfants qui naissent de leur union. » On associait en effet le mariage à la procréation, élément essentiel de la famille. On considérait que le mariage était avant tout fait pour engendrer la procréation. On parlait alors de famille légitime, puis traditionnelle ou normale, quand elle était mariée et que les enfants qu'elle avait obtenus avaient été engendrés par ce mariage. [...]
[...] Elle a été un instrument démographique, pour repeupler la France après les guerres, et reste un instrument sociologique, forgeant et éduquant les enfants, et économique, pesant une grande part dans les dépenses quotidiennes, et contribuant activement l'équilibre économique de la Société. De ce fait, le Droit a dû en faire un de ses sujets les plus importants, dans le but de minimiser les conflits au sein de la société à l'intérieur de laquelle il a pour mission de faire régner l'ordre. [...]
[...] En effet, si pendant longtemps, le législateur a privilégié le mariage aux autres formes d'union, Napoléon Bonaparte ayant par exemple clairement averti que « les concubins ignorent la loi, la loi les ignore ». Ainsi, jusqu'aux années 1970, le législateur privilégiait le mariage comme structure familiale légitime, considérant les autres comme des « modalités imparfaites de la vie familiale ». Mais sa position a changé au fur et à mesure de l'édiction de nouvelles lois et de la création de nouvelles structures familiales encadrées par le droit, jusqu'à considérer que, selon Carbonnier, « le législateur, ayant enregistré la divergence de choix et l'incertitude des observations, a renoncé à privilégier un modèle familial au détriment des autres ». [...]
[...] C'est sur ce fondement que la matière a connu de si nombreux bouleversements durant les dernières décennies. La libéralisation des mœurs (augmentation du nombre de concubinages et d'enfants nés hors mariage, banalisation des divorces), ou encore les revendications féministes (émancipation de la femme au sein du couple, revendication du droit à l'avortement) ont été des facteurs de réformes sociales, donc de réformes juridiques. On peut considérer qu'il en va de même pour l'ouverture du mariage aux couples homosexuels, pouvant être la conséquence de l'acceptation et de l'intégration grandissante de la population homosexuelle au sein de la Société, l'homosexualité étant restée punie pénalement jusqu'en 1982, et étant considérée comme une pathologie en France jusqu'en 1992. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture