Portalis, dans les travaux préparatoires du code civil, définissait le mariage comme « la société de l'homme et de la femme qui s'unissent pour perpétuer leur espèce, pour s'aider par des secours mutuels à porter le poids de la vie et pour partager leur commune destinée ». Plus de deux siècles après, ce qui à l'époque semblait évident fait aujourd'hui débat. Les mœurs ont profondément évolué depuis 1804, et à l'heure actuelle se pose la question du mariage de personnes appartenant toutes deux au même sexe.
En France, le premier mariage civil entre deux hommes a été célébré le 5 juin 2004 entre Stéphane C et Bertrand C par le maire de Bègles, monsieur Noël Mamère. Le 11 juin 2004, le procureur de la République a demandé au président du tribunal de grande instance de Bordeaux l'autorisation de faire assigner les deux hommes devant sa juridiction aux fins d'annulation de l'acte du 5 juin 2004. L'affaire a été plaidée le 29 juin 2004 et par jugement rendu le 26 juillet 2004, l'acte du 5 juin 2004 a été déclaré nul. Selon le TGI de Bordeaux en date du 26 juillet 2004, « la différence de sexe entre les époux est une condition de fond du mariage, tant en droit interne qu'en droit européen. Il en résulte qu'une union entre deux hommes doit être annulée ». Les deux hommes ont fait appel de cette décision.
Stéphane et Bertrand C s'étant domiciliés à Saint Aubin de Médoc et non pas à Bègles, ont fait appel contre le ministère public pris en la personne du procureur général près la cour d'appel de Bordeaux, du jugement rendu à leur encontre le 26 juillet 2004 par le tribunal de grande instance de cette ville.
Les époux soutiennent que le ministère public n'est pas recevable dans son action, faute de texte précis interdisant le mariage entre personnes de même sexe. Selon eux, l'action du ministère public ne sollicite pas l'annulation sur le fondement d'une incompétence territoriale de l'officier d'état civil ou d'une fraude à la loi, les cas de nullité à mariage auxquels se réfère le ministère public ne contiennent pas de condition de différence de sexe. En conséquence ils souhaitent tous deux que soit déclarée l'irrecevabilité de la demande pour défaut de droit d'agir.
Enfin, ils estiment que l'opposition au mariage et la demande en annulation fondée sur le non respect de la condition de différence des sexes constituent une privation de jouissance du droit au mariage contraire aux dispositions des articles 8,12 et 14 combinés de la Convention.
Le ministère public, quant à lui, sollicite la confirmation de l'annulation sur la seule question de l'absence de différence de sexe. Il renonce expressément à tout moyen tiré de l'absence de publication régulière, de l'inexactitude du domicile déclaré et de la célébration du mariage au mépris de son opposition.
Le présent litige a été présenté comme fait de société et les appelants ont développé sur le sujet une argumentation juridique vaste et de grande qualité. Le ministère public a donc souhaité y répondre en effectuant un rappel quasi-exhaustif des thèses en cause.
Toutefois, la cour n'a pas statué sur l'irrégularité de la procédure, (le fait que le maire de Bègles a outrepassé son mandat de représentant de l'État en refusant de se soumettre à une injonction fondée sur le droit existant, ce qui n'était pas établi dans cette décision), et a axé son arrêt sur le problème de la différenciation de sexe entre deux époux. Le problème soulevé ici n'est donc pas celui de l'absence de publication régulière ou d'inexactitude de domicile.
Le problème soulevé dans cet arrêt n'est pas des moindres, il s'agit de savoir si quelle est la validité d'un mariage entre deux personnes de même sexe ?
La cour d'appel de Bordeaux, dans son arrêt de la sixième chambre civile en date du 19 avril 2005, a répondu par la négative et a confirmé le jugement de première instance, en considérant que la différence de sexe est une condition de l'existence même du mariage. La célébration organisée entre deux hommes ne peut être considérée comme un mariage, en conclusion pour la cour, l'acte qui en a été dressé doit être annulé.
Dans cet arrêt, la cour d'appel établi un rappel catégorique de la nullité d'un mariage entre homosexuels en se basant sur la différenciation de sexe obligatoire entre les époux (I), elle rappel cependant que d'autres structures sont ouvertes aux homosexuels en faisant toutefois un appel au législateur pour voir leur situations s'améliorer (II).
[...] Comme l'affirme la cour d'appel de Bordeaux, il ne lui appartient pas de trancher un tel problème de société, qui ne peut, dans une démocratie, que faire l'objet d'un débat politique et d'une éventuelle intervention du législateur Ce n'est donc pas à elle (et encore moins à moi) de trancher sur un problème de cette taille. La CEDH a répondu le 26 février 2002, avec une extrême prudence à la question de l'adoption d'enfant par un couple homosexuel, en limitant ce droit mais en laissant toutefois une grande marge d'appréciation aux différents états. Le grand pas semble à plus ou moins long terme inévitable. Mais dans l'optique où celui-ci se produira, quand se produira-t-il ? Comment ce changement sera-t-il perçu aux yeux de la population ? Qu'adviendra-t-il de l'homoparentalité ? [...]
[...] Il n'y a donc pas d'équivoque possible, le code civil impose à l'officier d'état civil de recueillir la déclaration de deux personnes de sexe différent qui se prennent pour “mari et femme”. Cette affirmation peut être liée à la présomption de paternité que l'on retrouve à l'article 312 du code civil. En effet, les différentes évolutions législatives ont maintenu la notion de filiation commune aux époux et le premier juge a justement rappelé l'importance à cet égard de cette présomption puisque le code civil à cet article énonce que “l'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari”. La notion de père est ainsi liée étroitement à celle de mari. [...]
[...] Le ministère public, quant à lui, sollicite la confirmation de l'annulation sur la seule question de l'absence de différence de sexe. Il renonce expressément à tout moyen tiré de l'absence de publication régulière, de l'inexactitude du domicile déclaré et de la célébration du mariage au mépris de son opposition. Le présent litige a été présenté comme fait de société et les appelants ont développé sur le sujet une argumentation juridique vaste et de grande qualité. Le ministère public a donc souhaité y répondre en effectuant un rappel quasi-exhaustif des thèses en cause. [...]
[...] Vers quels types d'unions évoluons-nous ? [...]
[...] Que se soit sur la base de texte Européen ou nationaux, notre pays n'autorise pas ce type de mariage, mais la cour rappelle cependant que d'autres institutions existent II- Un rappel de l'existence d'autres institutions propices aux couples homosexuels tout en y faisant un appel à l'évolution de leur statut La cour d'appel met en avant l'existence d'autres structures adaptées aux couples homosexuels mais elle ne manque cependant pas d'ouvrir une porte au législateur Un rappel de l'existence de structures diverses adaptées à l'union des personnes de même sexe La cour reconnaît la possibilité aux couples homosexuels de conclure des conventions régissant leur vie commune. En effet, le couple homosexuel a longtemps été ignoré par le droit français. La loi du 15 novembre 1999 instaurant le Pacte Civil de Solidarité (PACS) a mis un terme à la discrimination opérée jusque-là. [...]
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