Acte formaliste, le testament olographe est soumis à des solennités énumérées par l'article 970 c. c. : « le testament olographe ne sera point valable, s'il n'est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur ». La jurisprudence à ce sujet a évolué. L'exigence formaliste de l'article 970 c. c s'est trouvée émoussée par l'interprétation qui en a été faite par la jurisprudence. Un premier tempérament existe à la rigueur de la loi : la Cour de cassation a depuis plusieurs décennies jugé qu'un testament non daté ou incomplètement daté échappe à la nullité si sa date complète peut être reconstituée, pourvu qu'elle le puisse à partir d'éléments qui lui sont intrinsèques. Le second tempérament apparaît avec l'arrêt Payan (1983) : une Cour a semblé amorcer une évolution vers plus de libéralisme encore. Renversant sa jurisprudence antérieure, elle a en effet décidé qu'un testament incomplètement daté est valable, alors même que sa date complète ne serait pas reconstituée, dès lors qu'elle est sans importance.
[...] La portée de la jurisprudence Payan est très importante. Portée directe : le résultat immédiat de la solution nouvelle devrait être de raréfier considérablement les cas d'annulation pour irrégularité de la date. Portée indirecte : à présent le légataire dont le titre n'est pas daté ou ne l'est qu'incomplètement dispose de 2 moyens de défense à une exception de nullité : - soit plaider l'indifférence de la date en montrant qu'il ne se pose de question ni de capacité ni de révocation (tempérament nouveau) / soit plaider la reconstitution de la date, en montrant que le testament porte en lui la date de sa confection (tempérament classique). [...]
[...] Peu importe qu'il la donne sciemment ou non. La condition de forme est remplie si par l'analyse de l'acte on peut déduire une date des paroles de cujus auxquelles s'attache ici une force probante exceptionnelle. Analogie avec le droit judiciaire privé. La théorie des équivalents permet de combler les lacunes de certaines mentions obligatoires figurant dans l'acte lui-même. On complète donc les indications insuffisantes par d'autres énonciations puisées dans le corps même de l'acte. La jurisprudence novatrice : la date indifférente Jurisprudence classique. [...]
[...] Ainsi la loi parvient-elle à son but, qui est de prévenir un débat, et donc une incertitude sur la date : ou bien le testament est daté et la date indiquée est présumée exacte en sorte que l'incertitude disparaît ou bien le testament n'est pas daté et il est nul en la forme en sorte que l'incertitude est indifférente. Il est donc clair qu'en exigeant le datage à peine de nullité, le législateur écarte l'aléa inhérent à la preuve de la date. Le formalisme assume donc sa fonction protectrice d'intérêts de fond qu'il garde des risques de la preuve. L'exigence d'une date complète. [...]
[...] Il est ainsi loisible au légataire, non seulement de compléter la date, mais même de suppléer à son absence. Justification. Si la date doit être apposée par le testateur, c'est afin de prévenir un débat aléatoire. Or ce débat n'a pas lieu d'être dès lors que (bien qu'elle n'y soit pas expressément indiquée) la date s'évince du testament lui-même. Car c'est alors dans la parole du testateur que l'on trouve le principe et la racine de la preuve. Pour cette raison elle bénéficie de la présomption d'exactitude, exorbitante du droit commun. [...]
[...] Or il n'est pas rare qu'au cours d'un même mois, un individu rédige plusieurs testaments (en période d'activité testamentaire, les hésitations de la volonté se manifestent fréquemment dans des actes successifs), la date exigée est alors nécessairement une date complète. C'est à cette condition seulement que la règle de forme peut remplir pleinement son rôle préventif. Une sanction nuancée : le double tempérament jurisprudentiel. Le contenu de l'exigence légale est une chose, sa sanction en est une autre. Le ratio legis veut que ce contenu soit strictement compris, elle admet, en revanche, que cette sanction soit nuancée. Depuis longtemps le testament non ou mal daté sort ses effets si sa date peut être reconstituée. [...]
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