Qu'attendre d'un divorce sinon qu'il débouche sur un remariage ?
Cette phrase provocante traduit une certaine réalité. Le nombre des divorces ayant depuis 1975 considérablement augmenté, le nombre de remariages après divorce s'en est par voie de conséquence logique démultiplié à son tour.
Dans ces conséquences personnelles, le divorce n'empêche pas le remariage. Au regard de ses conséquences pécuniaires, le rôle du remariage n'est pas très évident. En effet, il peut donner lieu au versement d'une prestation compensatoire ou d'une pension alimentaire. Cette dernière est allouée en principe dans le strict cadre du divorce pour rupture de la vie commune ou au travers d'un choix dans le divorce sur requête conjointe et représente la survie du devoir de secours. Dans cette optique, le remariage impose aux nouveaux époux un devoir de secours concurrent du premier et peut ainsi être apprécié comme un événement qui fait partie intégrante de la vie juridique de la pension alimentaire. C'est pour cela que l'article 283 CC pose pour principe que le remariage du créancier fait cesser la pension alimentaire. Il est alors considéré comme normal que le remariage du débiteur soit l'occasion d'une révision autorisée par la loi.
[...] Cependant, le législateur a apporté une exception concernant les donations en faveur du mariage. L'ancien article 1096 al 2 CC prévoyait que ces donations ne seront point révoquées par la survenance d'enfants Cette règle est maintenue par l'article 1096 al 3 CC qui dispose que les donations faites par les époux de biens présents ou de biens à venir ne sont pas révoquées par la survenance d'enfants Cette règle de la révocation trouvait sa raison d'être dans la protection des enfants survenus. [...]
[...] Saisie à son tour, la cour d'appel de Paris a retenu que l'exception est inapplicable et la révocation de droit, si l'enfant né après la donation n'est pas issu du mariage de l'époux donateur avec le donataire ; en effet, dans ce dernier cas, l'enfant est dépourvu de vocation héréditaire à l'égard du donataire et la donation le dépouille de tout droit sur le bien donné (CA Paris juin 1986). La survenance d'enfants constitue donc une spécificité pour les donations entre époux puisqu'elle échappe à la règle de droit commun des donations matrimoniales. La réforme réalisée par la loi du 26 mai 2004, entrée en vigueur au 1er janvier 2005, ne dispose d'aucune disposition transitoire concernant la question des donations déguisées ou par interposition de personnes ainsi que celle de l'irrévocabilité de biens présents entre époux. [...]
[...] L'ancien article 275 al 2 CC qui permet de subordonner le divorce au paiement effectif d'une prestation en capital n'instaure pas un empêchement au remariage et n'est donc pas contraire à l'article 12 de la CESDH (civ 1re mars 2007). Par ailleurs, lorsque les époux divorcent, leur remariage entre eux rend caduque la prestation judiciairement fixée (civ 1re octobre 2007). Ainsi, un second mariage rend caduque la prestation compensatoire qu'avait engendrée un précédent divorce. La Cour de cassation a jugé que le remariage du débiteur et du créancier d'une prestation compensatoire emporte la caducité non rétroactive de cette obligation. [...]
[...] Les nouvelles dispositions s'appliquent à toutes les donations propter nuptias. S'agissant des biens présents et des avantages matrimoniaux prenant effet au cours du mariage, c'est la règle de l'irrévocabilité qui prévaudra. Les époux conserveront le bénéfice des donations et avantages qu'ils s'étaient consentis. Bien que le mariage soit à l'origine de ces donations ou avantages, la dissolution du lien matrimonial n'a plus d'effet sur leur sort. Cette solution est facilement justifiée, car au moment où elle est faite, l'intention libérale existe. [...]
[...] Cependant, la survenance d'enfants lors du remariage change la donne. En effet de la même façon que le remariage du créancier de la prestation compensatoire avec un conjoint fortuné peut conduire à la suppression de la prestation compensatoire (CA Agen avril 2003) ou à sa limitation (CA Besançon juin 2002) au titre du changement important dans les ressources du bénéficiaire visé par l'article 276-3 CC, le remariage du débiteur et l'arrivée de nouveaux enfants, qui augmentent ses charges, peuvent justifier la révision à la baisse de la prestation (civ 1re juin 2005). [...]
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