En 1983, l'Organisation mondiale de la santé a enlevé de la classification des maladies mentales l'homosexualité. Il s'agit d'une avancée majeure, permettant aux homosexuels de ne plus vivre dans la honte. Mais les discriminations continuer de perdurer dans les faits. C'est pourquoi, les homosexuels aspirent à une égalité des droits avec les hétérosexuels. Parmi les revendications mises en avant par les associations homosexuelles, le droit de fonder une famille obtient la première place. Ainsi dès 1986 fut créée l'Association des parents gays, qui deviendra par la suite l'Association des parents gays et lesbiens (APGL) destinée à révéler médiatiquement et politiquement la possibilité pour les homosexuels de fonder une famille reconnue en tant que telle.
Cependant, il est inutile de rappeler que le couple homosexuel ne peut procréer. Selon Claire NEIRINCK, « l'adoption, qui consiste à donner un enfant à une famille qui n'en a pas, semble être la technique juridique idéale pour accéder à l'enfant que l'on ne peut concevoir ». Mais le couple homosexuel peut-il légalement adopter ?
Il existe l'adoption interne et l'adoption internationale. La première est régie par la loi du 11 juillet 1966, qui permet deux formes d'adoption : l'adoption plénière et l'adoption simple. Cette dernière a été organisée initialement par le Code de 1804 qui créait un lien de filiation au profit d'un majeur. Celui-ci demeurait dans sa famille d'origine et y conservait tous ses droits. Aujourd'hui, elle est permise quel que soit l'âge de l'adopté. Elle est originale puisqu'elle crée une filiation additive à la filiation biologique. L'enfant a ainsi une double filiation. L'adoption plénière est prédominante. Elle substitue le lien juridique adoptif à la filiation d'origine qui disparaît totalement. L'enfant adopté est rattaché à l'adoptant. La suprématie de l'adoption plénière a d'ailleurs été consacrée par la loi du 5 juillet 1996 permettant la substitution de l'adoption plénière par l'adoption simple lorsque des motifs graves ont été justifiés. Cette disposition a essayé de répondre en partie aux difficultés provoquées par l'échec d'une adoption plénière sans remettre pour autant en cause son caractère irrévocable. Néanmoins, il ne faut pas considérer l'adoption simple comme une institution désuète, cette dernière étant fortement utilisée en pratique. En effet, cette dernière sera par exemple, la seule forme possible d'adoption de l'adoption de l'enfant du conjoint, et nous verrons que cette unique technique juridique a son importance en ce qui concerne les couples homosexuels. Les conditions concernant les adoptants sont donc identiques dans les deux formes d'adoption. Elles sont ouvertes aux membres d'une même famille. Les conditions d'âge et de durée du mariage sont identiques dans les deux formes d'adoption. Elles peuvent être demandées par toute personne âgée de plus de 28 ans. À cette condition d'âge, il est exigé par l'article 344 du Code civil une différence d'âge : l'adoptant devant avoir quinze ans de plus que l'adopté (dix pour l'enfant du conjoint). La loi permet depuis 1966 l'adoption d'un enfant par un couple marié ou par une seule personne (article 343-2). L'adoption d'un enfant se déroule en deux étapes : une étape administrative et une étape judiciaire. La première consiste en un agrément délivré par le président du conseil général aux différents candidats. Le président doit s'assurer que les conditions d'accueil offertes par le demandeur correspondent à l'intérêt de l'enfant. La deuxième consiste en un jugement qui établit la filiation adoptive. Le magistrat doit s'assurer que les conditions légales sont remplies et que le ou les candidats ont bien obtenu l'agrément. Il peut, néanmoins prononcer le jugement d'adoption en l'absence d'agrément administratif si l'intérêt de l'enfant l'exige. Devant le faible nombre d'enfants adoptables en France, il est plus courant de recourir à l'adoption internationale. La loi du 25 juillet 1985 a étendu l'obligation de la délivrance de l'agrément à l'adoption internationale. Depuis celui-ci, relève de la compétence des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance. Cette procédure a été réformée par une loi du 5 juillet 1996 qui a rendu exigible l'agrément au niveau de la phase judiciaire concernant les mineurs étrangers. Ensuite, la loi du 22 juillet 2002 a étendu l'obligation d'agrément au prononcé d'un enfant remis à un organisme autorisé pour l'adoption. La dernière loi, en date du 4 juillet 2005, qui institue une Agence française pour l'adoption (AFA) a réformé le régime de l'agrément dans l'objectif d'améliorer la procédure administrative d'adoption et l'accompagnement des familles. La loi va donner à l'agrément un caractère plus concret et individualisé puisqu'il doit être accompagné une notice de renseignements mentionnant l'âge, le nombre ou les caractéristiques des enfants. Il existe deux voies permettant l'adoption internationale : le recours à l'un des 39 organismes autorisés au niveau départemental par les présidents des conseils généraux et habilités au plan national par le ministre des affaires étrangères pour l'adoption internationale (OAA) ; et l'adoption par démarche individuelle. L'innovation de la loi de 2005 réside dans la création de l'AFA, qui va constituer une troisième voie permettant le recours à l'adoption internationale.
Il semble donc que l'adoption des couples homosexuels est un sujet sensible qui n'est pas à l'ordre du jour. Aucun texte relatif à l'adoption interne ou international ne prévoit la possibilité pour un couple homosexuel d'adopter. Pourtant, le tribunal de grande instance de Paris dans un jugement rendu le 27 avril 2001, a accordé à une femme homosexuelle l'adoption simple des trois enfants de sa compagne.
Enfreindre ou contourner la loi est actuellement le seul moyen pour la plupart des couples homosexuels de devenir parents. La loi exclut, comme nous l'avons vu, le couple homosexuel de l'adoption. Pourtant, il serait évidemment totalement naïf de notre part d'ignorer qu'il existe un grand nombre d'enfants élevés par des homosexuels. Cette réalité nous convie à se poser la question suivante : en effet, s'il existe aujourd'hui différents moyens pour les homosexuels de devenir parents tels que la coparentalité, la procréation médicalement assistée, pourquoi s'attacher à avoir un enfant par le biais de l'adoption ? Tout d'abord, l'adoption semble être la solution si ce n'est la plus simple, en tout cas, la moins compliquée pour les hommes homosexuels désireux de devenir parents. Ensuite, comme nous l'avons déjà évoqué, le droit à l'adoption associé logiquement au droit au mariage revendiqué par les associations homosexuelles s'inscrivent dans un souci d'égalité avec les hétérosexuels. Cependant, il semble que cette demande aussi légitime soit-elle, puisse susciter un certain nombre d'interrogations restées encore sans réponse. Si quelques Etats européens ou d'Amérique du Nord ont institutionnalisé cette pratique, il est encore trop tôt pour en mesurer tous les effets pratiques.
L'Etat français n'a donc pas préféré institutionnaliser, pour l'instant, l'adoption par les couples homosexuels même s'il est possible, en pratique pour un homosexuel de contourner la loi et de pouvoir ainsi adopter. Toutes ces démarches témoignent du réel désir d'enfant ressenti par le couple homosexuel. Toute la question est de savoir si notre droit français assouvira ce désir en reconnaissant légalement l'adoption par le couple homosexuel. La réponse à cette interrogation pourra s'appréhender qu'après l'étude de l'état actuel de l'établissement de la filiation adoptive par les couples homosexuels (I) et par l'étude des différents problèmes que soulève la reconnaissance légale de l'adoption par le couple homosexuel, présageant une évolution incertaine (II).
[...] Certains psychanalystes n'hésitent pas à aller plus loin et à s'exprimer au nom de l'intérêt de la société : l'homoparentalité serait un danger pour la société toute entière. L'homosexualité serait synonyme de déni de la différence des sexes, déni qui conduirait nécessairement à l'amour du même, voire du clonage La société ne peut être qu'hétérosexuelle. C'est seulement ainsi que la société peut s'organiser et durer dans l'histoire On pourrait encore citer d'autres propos mais on s'arrête là. La plupart tendent vers l'homophobie et envisagent même pas le fait que les homosexuels puissent adopter. C'est pourquoi d'autres psychanalystes s'insurgent contre ces positions tranchées. [...]
[...] L'adoption simple est ouverte aux mêmes personnes que l'adoption plénière et, comme cette dernière, est autorisée entre les membres d'une même famille. Cette dernière serait d'ailleurs la forme d'adoption intra-familliale, la plus favorable, n'entraînant pas la rupture du lien familial d'origine. Ainsi, les tribunaux l'accordent plus facilement au sein de la famille : à des grands-parents sur leur petite fille (Aix-en-Provence novembre 1995) ou à une sœur sur son frère (Paris février 1998). Plus étonnant, l'adoption simple a même été accordée alors qu'il s'agissait de contourner l'établissement d'une filiation incestueuse (Rennes janvier 2000). [...]
[...] Les études et les oppositions Le droit évolue en suivant la société. Pour cerner les possibles évolutions du droit de la famille en ce qui concerne l'adoption des homosexuels, il nous faut étudier ce que pense la société elle-même. Beaucoup aimeraient étayer leur avis d'études scientifiques sur le sujet afin de se faire une opinion plus tranchée. C'est pourquoi nous allons voir l'ensemble des études qui ont été faites sur le sujet : études anglo-saxonnes puis françaises ; tout en énumérant les différentes oppositions émises sur ces études mais aussi sur l'adoption des homosexuels en général. [...]
[...] Comme le souligne Madame Gross, la moindre différence risquerait d'être exploitée par ceux qui sont hostiles à l'homoparentalité Pourtant, il doit exister de légères différences. Selon le même auteur, les enfants élevés par des parents homosexuels développent des répertoires moins stéréotypés. Ils semblent plus tolérants puisque les relations homosexuelles ne leur semblent pas inacceptables. En conclusion, nier la probabilité que les enfants élevés par des gays et lesbiennes puissent être légèrement différents est une manière de capituler devant l'idéologie hétérosexiste. [...]
[...] Cette interprétation peut rappeler la querelle des anciens et des modernes. En effet, les modernes considérant que tout ce qui n'est pas interdit par la loi, est toléré. En revanche, pour les anciens, tout ce que la loi ne permet pas explicitement est interdit. Alors, dans cette optique, toute adoption par un homosexuel serait impossible car le cadre légal ne le mentionne pas. En réalité, ce n'est pas tellement le cadre juridique qui ne permet pas actuellement aux homosexuels d'adopter un enfant : l'homosexualité est prise en considération en tant qu'elle présenterait alors des risques pour l'enfant. [...]
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