Biologiquement, la naissance de l'enfant résulte de son accouchement. Affectivement et psychologiquement, elle remonte au-delà, dès sa conception. Le développement de la médecine anténatale et de la pratique de l'écographie permettent au couple de s'imaginer parents avant même la venue au monde de leur bébé. S'il est facteur d'espoir, le progrès médical est aussi source de déception, de tragique retour à la réalité. Dans certains cas, l'embryon ou le fœtus ne deviendra jamais l'enfant que le couple attendait. Il ne naitra pas vivant ni viable et ne sera donc pas reconnu juridiquement, faute de personnalité juridique. D'où la douleur accrue des parents qui non seulement subissent l'épreuve douloureuse du deuil mais qui, de surcroit, ne peuvent inscrire l'enfant sans vie dans la mémoire familiale, faute de pouvoir l'enregistrer à l'état civil. La prise en compte de cette douleur n'est pas restée lettre morte. Par une juste application de la loi, la Cour de cassation, dans un arrêt du 6 février 2008, a permis aux parents endeuillés d'accéder à l'acte d'enfant sans vie, ceci quel que soit le stade de développement du fœtus.
L'acte d'enfant sans vie peut être établi à tout moment de la grossesse. La notion d'« enfant sans vie » s'est semble-t-il élargie, permettant ainsi de faciliter la douloureuse épreuve du deuil.
[...] Les parents peuvent se prévaloir de certains droits sociaux et, notamment, bénéficier des indemnités journalières de maternité et de paternité. De surcroit, l'acte d'enfant sans vie les autorise à réclamer le corps de l'enfant (ce qu'on leur refusait auparavant) afin d'organiser des obsèques, suivies d'une inhumation ou d'une crémation, ce qui contribue incontestablement à l'accomplissement d'un travail de deuil On le voit bien, l'arrêt commenté semble destiné prioritairement aux parents. Il répond à leurs besoins, notamment pour la période difficile du deuil. [...]
[...] Un pas semble avoir été fait par la parution au Journal officiel de deux décrets en date du 22 aout 2008 prévoyant expressément l'inscription à l'état civil des fœtus nés sans vie. [...]
[...] La problématique posée à la Cour de cassation résidait dans le champ d'application de l'article 79-1 du Code civil. Plus précisément, la question était celle-ci : un fœtus de 155 grammes, né sans vie au bout de 18 semaines d'aménorrhée est-il en droit d'être inscrit à l'état civil par le biais d'un acte d'enfant sans vie ? En d'autres termes, il s'agissait de savoir si l'article 79-1, notamment son alinéa subordonnait l'établissement d'un tel acte au poids du fœtus ou à la durée de la grossesse, comme l'a considéré la Cour d'appel. [...]
[...] La démarche de la Cour de cassation a été de remettre en cause cette interprétation, par une lecture plus attentive du texte visé A. L'interprétation traditionnelle de l'article 79-1 alinéa 2 du Code civil La thèse développée par les juges d'appels pour rejeter les prétentions des demandeurs repose sur une interprétation traditionnelle de l'article 79-1 alinéas selon laquelle la délivrance de l'acte d'enfant sans vie n'était pas automatique. En effet, hormis les deux conditions précitées (le décès de l'enfant avant que sa naissance ait été déclarée à l'état civil et, d'autre part, le défaut de production d'un certificat médical indiquant qu'il est né vivant et viable), l'enfant doit avoir atteint un certain seuil de développement. [...]
[...] D'où une éventuelle remise en cause du rôle traditionnel de l'état civil, comme instrument de repérage des individus, dans un but d'identification et de différenciation sociale. Par exemple, outre sa dimension informative, l'intérêt de recenser les fausses couches n'est pas certain Il semble que l'état civil tend, de plus en plus, à prendre en compte l'histoire, la mémoire des familles. Toujours est-il que la suppression du seuil de développement permet aux parents endeuillés de soulager la douleur du deuil. S'ils en émettent le souhait, ils pourront faire établir un acte d'enfant sans vie, et éviter de voir leur fœtus, de moins de 22 semaines ou de moins de 500 grammes, considéré comme un déchet opératoire. [...]
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