Ernest S. est né le 4 juin 1928 : il est reconnu par sa mère mais non par son père. Il assigne le 10 juillet 1998 Emile K. afin qu'il soit constaté la possession d'état et produit un acte de notoriété établissant qu'il serait son père naturel. Emile K décède en cours de procédure le 4 mai 1999, de même qu'Ernest S. le 7 mars 2005. Leurs héritiers respectifs, dont Jean-Pierre K, reprennent l'instance. Un appel est interjeté devant la Cour d'appel de Colmar par Ernest S. afin d'obtenir la constatation de la possession d'Emile K. Dans un arrêt du 27 janvier 2003, elle déboute Ernest S. de sa demande.
Un pourvoi en cassation est alors formé par les héritiers d'Ernest S. afin d'obtenir la constatation de la possession. Ils invoquent pour motif que l'expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder. Or en l'espèce la Cour d'appel de Colmar s'est contentée de considérer « qu'il n'était pas besoin d'ordonner une expertise sanguine » et n'a donné aucun motif justifiant son refus : elle a donc violé les articles 311-1 et 334-8 du Code civil ainsi que l'article 146 du nouveau code de procédure civile.
[...] II/ La remise en cause de la distinction par l'ordonnance de 2005 L'ordonnance de 2005 vient remettre en cause les motifs de l'arrêt de 2005 (A') et confirme la dénaturalisation de la possession (B'). Une décision contestable au regard de l'ordonnance de 2005 _ l'ordonnance de 2005 fait désormais que la possession d'état non constatée n'a pas d'effet direct sur la filiation, ceci conformément à la recherche de sécurité juridique du législateur. Dès lors, l'action en constatation de possession d'état a été rangée sous le titre des actions aux fins d'établissement de la filiation : l'existence d'une simple filiation n'a plus aucun effet juridique si elle n'est pas officiellement constatée, c'est-à-dire que c'est la constatation qui établit la filiation et non la possession d'état par elle-même. [...]
[...] _ ce recours systématique à l'expertise biologique permettrait d'éviter le développement des détournements de l'action en constatation de possession d'état qui vise en fait à contourner la fermeture du délai de l'action en recherche de paternité en établissant la filiation par la possession d'état. Ainsi, on éviterait de faire de l'action en constatation de possession d'état une action en recherche de paternité bis. La seule exigence pour recourir à l'expertise biologique dans l'action en constatation de possession d'état serait l'existence des éléments constitutifs de la possession. [...]
[...] _ L'action en constatation de possession peut elle aussi avoir lieu dans un délai de 10ans, mais non pas à compter de la majorité de l'enfant, mais à partir du jour où la personne a été privée de l'état qu'elle réclame. Le délai est donc ainsi considérablement ouvert puisqu'il devient possible d'exercer cette action 10ans après que la possession ait cessé. Ainsi, il devient possible de considérer que la possession cesse au décès du prétendu parent lorsque celle-ci a été continue. _ l'apparence de délai n'est donc qu'un trompe-œil, et il devient aisé de recourir à l'action en constatation de possession lorsque le délai pour l'action en reconnaissance de paternité a expiré. C'est donc un moyen de repousser la limite. [...]
[...] Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile décembre 2005 Ernest S. est né le 4 juin 1928 : il est reconnu par sa mère, mais non par son père. Il assigne le 10 juillet 1998 Emile K. afin qu'il soit constaté la possession d'état et produit un acte de notoriété établissant qu'il serait son père naturel. Emile K décède en cours de procédure le 4 mai 1999, de même qu'Ernest S. le 7 mars 2005. Leurs héritiers respectifs, dont Jean-Pierre reprennent l'instance. [...]
[...] _ Ainsi, poser que l'expertise biologique serait de droit en matière de constatation de la possession reviendrait à examiner directement le fondement biologique. Or, il ne s'agit pas d'établir la filiation comme pour une action en recherche de paternité où le lien biologique est déterminant (d'où le fait que l'expertise biologique est de droit en matière de filiation), mais d'établir l'existence d'une possession. _ L'arrêt du 6 décembre 2006 s'inscrit donc dans cette lignée en reconnaissant à l'action en constatation de la possession un objet et un but distinct de l'action en recherche de paternité. [...]
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