Par un arrêt en date du 29 janvier 2002, la première chambre civile de la cour de cassation a rompu avec sa jurisprudence antérieure pour étendre le bénéfice de l'action en retranchement aux enfants naturels. Pour ce faire, la haute juridiction française se fonde sur l'article 1527 alinéa 2 du Code civil, interprété au regard de la convention européenne des droits de l'Homme. Ce revirement n'est pas surprenant si l'on prend en considération la loi du 3 décembre 2001 modifiant l'article 1527 alinéa 2 en étendant son champ d'application. Ce revirement peut sembler étonnant du fait que la cour de cassation se fonde sur l'article 1527 alinéa 2 ancien et ne fait pas application de la loi nouvelle.
En l'espèce, deux époux ont choisi le régime de la communauté universelle lors de leur mariage en 1983, le contrat de mariage comportant une clause d'attribution intégrale de la communauté à l'époux survivant. Après le décès du mari, sa sœur ainsi que ses neveux et nièces assigna la veuve en liquidation de la succession et de la communauté. Un premier arrêt de la cour d'appel de REIMS en date du 1er juillet 1993 fut partiellement cassé par la cour de cassation le 20 février 1996. Dans le même temps, une jeune femme, enfant naturelle que le défunt avait eue avant son mariage, ayant fait constater sa possession d'état par le juge des tutelles, assigna la famille en opposition au partage et forma tierce opposition à l'arrêt de REIMS. Cette femme réclame sa réserve héréditaire afin que la veuve ne puisse se prévaloir de la clause d'attribution intégrale de la communauté. La cour d'appel la débouta de cette demande au motif que l'article 1527 alinéa 2 ne s'appliquait pas aux enfants naturels. Celle-ci se pourvoit en cassation. La cour de cassation a accueilli ce pourvoi en se fondant de façon étonnante sur l'article 1527 alinéa 2 ancien alors que la loi nouvelle avait été promulguée peu de temps avant. Par ce revirement la cour de cassation consacre l'égalité des enfants légitimes et naturels au regard du principe de non-discrimination selon la naissance édicté par la convention européenne des droits de l'Homme.
[...] Il s'agissait en l'espèce pour la Cour de cassation de savoir si un enfant naturel bénéficiait de la même action en retranchement que l'enfant légitime. L'on peut légitimement s'interroger sur la question de l'opportunité d'un tel revirement face à la loi du 3 décembre 2001. En effet, que ce soit la loi nouvelle ou l'article 1527 alinéa 2 ancien réinterprété, la solution est identique. En effet, désormais, l'enfant naturel ne subit plus de discrimination face à un enfant légitime dans ses droits successoraux, encore faut-il que l'enfant naturel fasse preuve de sa filiation naturelle par la possession d'état. [...]
[...] Arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation janvier 2002 Par un arrêt en date du 29 janvier 2002, la première chambre civile de la Cour de cassation a rompu avec sa jurisprudence antérieure pour étendre le bénéfice de l'action en retranchement aux enfants naturels. Pour ce faire, la haute juridiction française se fonde sur l'article 1527 alinéa 2 du Code civil, interprété au regard de la convention européenne des droits de l'Homme. Ce revirement n'est pas surprenant si l'on prend en considération la loi du 3 décembre 2001 modifiant l'article 1527 alinéa 2 en étendant son champ d'application. [...]
[...] Cette doctrine s'applique donc à toute décision pendante devant la Cour de cassation lors de la promulgation d'une loi. Or, en l'espèce, il ne faut pas oublier de préciser que la loi du 3 décembre 2001 est assortie de mesures transitoires, et que le législateur, en l'édictant, a entendu lui donner un caractère rétroactif. La rétroactivité de cette loi aurait dû conduire la Cour de cassation à déclarer la loi de 2001 applicable en l'espèce. Toutefois, la rétroactivité d'une loi ne touche pas aux pourvois pendants devant la Cour de cassation sauf disposition express. [...]
[...] En effet, le maintien de sa jurisprudence antérieure par la Cour de cassation après la promulgation de la loi du 3 décembre 2001 aurait pu paraître choquant. Ainsi, la Cour de cassation consacre désormais l'égalité des enfants légitimes et des enfants naturels s'agissant de l'action en retranchement Or, la nature de cet arrêt nous amène à nous interroger sur la réelle égalité des enfants : en effet, qu'en est-il des enfants adultérins et adoptifs qui ne sont pas évoqués ici ? [...]
[...] La Cour de cassation a donc pu, en application de cet article 25 II de la loi de 2001, ne pas appliquer cette dernière loi aux instances pendantes devant elle. Pour autant, en consacrant un revirement, la jurisprudence retient une solution identique à la solution législative. Il serait paru fort étonnant que la jurisprudence de la haute juridiction reste identique à celle précédente datant du 8 juin 1982 et qui demeura constante jusqu'à notre arrêt, marquant une discrimination de l'enfant naturel contraire à la convention européenne des droits de l'Homme, mais également contraire à la loi précédemment promulguée. [...]
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