liberté contractuelle, principe d'immutabilité, régime matrimonial, mutabilité judiciaire, contrôle judiciaire, commentaire d'arrêt, Cour de cassation, 24 novembre 1987
Deux époux se marient sous le régime de la communauté réduite aux acquêts. Le mari fait donation à son épouse de la moitié indivise d'un terrain dont il est propriétaire, sur lequel ils font construire une villa, semble-t-il avec des frais communs. Par la suite, cette donation est révoquée à l'initiative de l'époux qui assigne son ex-femme pour voir dire et juger qu'il demeure le seul propriétaire de la villa à charge de récompense à la communauté. À quoi elle oppose une convention non écrite dont l'objet était la construction d'un immeuble commun. La Cour d'appel d'Aix-en-Provence, confirmant le jugement de première instance, donne satisfaction à l'ex-épouse en admettant l'existence de la convention qu'elle invoque et en refusant ainsi de considérer que la villa est propre au mari. L'époux forme un pourvoi en cassation.
Le problème qui s'est posé devant la Cour de cassation a été de savoir si en vertu de la liberté contractuelle les époux peuvent modifier la répartition des biens telle qu'elle est prévue par le régime légal. La Cour de cassation casse l'arrêt d'appel au visa des articles 1396 alinéa 3 et 552 du Code civil, car elle retient que « l'existence d'une convention qui altère l'économie du régime matrimonial de communauté réduite aux acquêts, en ce qu'elle modifie sans intervention judiciaire, la répartition entre les biens propres et les biens communs telle qu'elle résulte des dispositions légales, est prohibée ».
[...] Mais, celui qui se prévaut de la propriété du dessus doit en rapporter la preuve par titre ou par prescription. Donc, si on s'en tient au seul plan de la preuve, il est difficilement concevable de faire échec à la règle de l'article 552 du Code Civil sans se prévaloir d'un écrit. La Cour d'appel n'aurait pas dû admettre la validité cette convention. De plus, cette dernière a pour effet de changer la répartition des biens entre les époux et porter, ainsi, atteinte au principe de l'immutabilité du régime matrimonial. [...]
[...] La Cour de cassation, dans un arrêt du 19 mars 2008, a rappelé que cette procédure d'homologation, exigée par la loi, est une procédure gracieuse et non contentieuse. Ce principe de l'immutabilité reste un droit en vigueur en droit français mais constitue de moins en moins un frein à la liberté des conventions matrimoniales. [...]
[...] D'un principe absolu avant 1965 empêchant les époux de modifier voir de changer de régime, on est passé à une immutabilité relative avec la proposition d'une procédure de changement le 13 juillet 1965. A cette époque, le législateur avait subordonné tout changement de régime matrimonial à un contrôle judiciaire, ce que l'on peut constater dans l'arrêt du 24 novembre 2008 : exigence à laquelle était attachée la Cour de cassation. La réforme du 23 juin 2006 a levé le verrou judiciaire sans pour autant abandonner le principe d'immutabilité On dit parfois que cette loi a déjudiciarisé le changement de régime. [...]
[...] En vertu du principe d'immutabilité édicté par l'article 1396 alinéa 3 du Code Civil, les époux ne peuvent pas par simple convention substituer un régime à un autre ou modifier en tout ou partie leur régime matrimonial en décidant par exemple de traiter comme un acquêt de communauté un bien qui devrait être un propre tel qu'il en résulte des dispositions légales régissant le régime de communauté réduite aux acquêts. Ce qui constitue une limite à la liberté contractuelle des époux. Suite à leur divorce, le mari a révoqué la donation de la moitié indivise d'un terrain sur lequel ils ont construit la villa. Cette révocation n'est en l'espèce ni contestée ni contestable. [...]
[...] D'ailleurs, la Cour de cassation casse la décision de la Cour d'appel au visa notamment de l'article 552 du Code Civil, même si elle privilégie le terrain du régime matrimonial en exigeant l'intervention judiciaire. II.L'atténuation du principe par l'admission d'une mutabilité judiciaire A. L'affirmation solennelle du contrôle judiciaire sur tout changement de régime matrimonial La loi du 13 juillet 1965 a été révolutionnaire par le fait qu'elle a proposé une procédure de changement du régime matrimonial. Toutefois, le législateur de 1965 est resté prudent en soumettant toute modification du régime matrimonial à des conditions et formes prescrites par la loi, lesquelles sont d'ordre public en ce qu'elles intéressent les tiers et constituent aussi une mesure de protection des époux. [...]
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